Définition

Au Québec, les mots utilisés pour décrire le problème ont évolué de l’abus, aux mauvais traitements, et à la maltraitance en 2010. Tous ces mots sont employés comme des synonymes, en dépit du fait que le mot « abus » constitue un anglicisme, soit un emprunt à l’expression elder abuse. Bien qu’il existe de nombreuses définitions de la maltraitance qui suscitent toutes des débats et des remises en question, voici celle qui, sans être consensuelle, rallie le plus d’acteurs à travers le monde; en 2002, lors d’une rencontre internationale regroupant des chercheurs, des associations de personnes aînées, des praticiens et des planificateurs de politiques publiques, l’OMS adoptait, par la Déclaration de Toronto, une définition de la maltraitance envers les personnes aînées [9]. Le gouvernement du Québec s’en est inspiré dans les PAM-1 et 2. Voici la définition proposée dans le PAM-2 :

« Il y a maltraitance quand un geste singulier ou répétitif, ou une absence d’action appropriée, intentionnel ou non, se produit dans une relation où il devrait y avoir de la confiance, et que cela cause du tort ou de la détresse chez une personne aînée » [8].

Cette définition pose la violence (geste singulier ou répétitif), la négligence (l’absence d’action appropriée), le fait que ce n’est pas l’intentionnalité qui compte, mais plutôt les résultats obtenus, la relation de confiance et l’importance des conséquences, que ces dernières soient ou non apparentes. À noter que cette définition exclut toute forme d’atteinte physique, morale ou matérielle de la part d’étrangers. Les nombreuses critiques de cette définition ciblent notamment la difficulté de son opérationnalisation en recherche [10,11].

Au Québec, cette définition a donné des assises au développement d’un langage commun. En 2015, devant le constat que de nombreux acteurs n’avaient pas la même conception et ne référaient pas aux mêmes éléments pour décrire les formes et les types de maltraitance, un travail de clarification conceptuel a été engagé [12]. Il a mené à la reconnaissance de deux formes de maltraitance (violence et négligence), ainsi qu’à l’identification de sept types de maltraitance (tableau 1). Cette clarification a été intégrée au PAM-2. 

Tableau 1 - Types de maltraitance 

Types de maltraitance

Définition

Exemples sous forme de violence

Exemples sous forme de négligence

Maltraitance psychologique

Gestes, paroles ou attitudes qui constituent une atteinte au bien-être ou à l’intégrité psychologique.

Chantage affectif, manipulation, humiliation, insultes, infantilisation, dénigrement, menaces verbales et non verbales, privation de pouvoir, surveillance exagérée des activités, etc.

Rejet, indifférence, isolement social, etc.

Maltraitance physique

Gestes ou actions inappropriés, ou absence d’action appropriée, qui portent atteinte au bien-être ou à l’intégrité physique.

Bousculade, rudoiement, coup, brûlure, alimentation forcée, administration inadéquate de la médication, utilisation inappropriée de contentions (physiques ou chimiques), etc.

 

Privation des conditions raisonnables de confort ou de sécurité, non-assistance à l’alimentation, à l’habillement, à l’hygiène ou à la médication lorsqu’on est responsable d’une personne en situation de dépendance, etc.

Maltraitance sexuelle

Gestes, actions, paroles ou attitudes à connotation sexuelle non consentis, qui portent atteinte au bien-être,

à l’intégrité ou à l’identité sexuelle.

Propos ou attitudes suggestifs, blagues ou insultes à connotation

sexuelle, promiscuité, comportements exhibitionnistes, agressions

à caractère sexuel (attouchements non désirés, relation sexuelle

non consentie), etc.

Privation d’intimité, non-reconnaissance ou déni de la sexualité, de

l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, etc.

Maltraitance matérielle ou financière

Obtention ou utilisation frauduleuse, illégale, non autorisée ou malhonnête des biens ou des documents légaux de la personne, absence d’information ou mésinformation financière ou légale.

Pression à modifier un testament, transaction bancaire sans consentement (utilisation d’une carte bancaire, transactions Internet, etc.), détournement de fonds ou de biens, prix excessif demandé pour des services rendus, usurpation d’identité, etc.

Ne pas gérer les biens dans l’intérêt de la personne ou ne pas fournir les biens nécessaires lorsqu’on en a la responsabilité, ne pas s’interroger sur l’aptitude d’une personne, sa compréhension ou sa littératie financière, etc.

Maltraitance organisationnelle

Toute situation préjudiciable, créée ou tolérée par les procédures d’organisations (privées, publiques ou communautaires) responsables d’offrir des soins ou des services de tous types, qui compromet l’exercice

des droits et libertés des personnes.

Conditions ou pratiques organisationnelles qui entraînent le non-respect des choix ou des droits de la personne (ex. : services offerts de façon brusque), etc.

Offre de services inadaptée aux besoins des personnes, directive absente ou mal comprise de la part du personnel, capacité organisationnelle réduite, procédure administrative complexe, formation inadéquate du personnel, personnel non mobilisé, etc.

Âgisme

Discrimination en raison de l’âge, par des attitudes hostiles ou négatives, des gestes préjudiciables

ou de l’exclusion sociale.

 

Imposition de restrictions ou de normes sociales en raison de l’âge, réduction de l’accessibilité à certaines ressources, préjugés, infantilisation,

mépris, etc.

Indifférence à l’égard des pratiques ou des propos âgistes lorsqu’on en est témoin, etc.

Violation des droits

Toute atteinte aux droits et aux libertés individuels et sociaux.

Imposition d’un traitement médical, déni du droit de choisir, de voter, d’avoir son intimité, de prendre des risques, de recevoir des appels téléphoniques ou de la visite, de pratiquer sa religion, de vivre son orientation sexuelle, etc.

Non-information ou mésinformation sur ses droits, ne pas porter assistance dans l’exercice de ses droits, non-reconnaissance de ses capacités, etc.

Source : Guide de référence pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées, 2e édition [13].