Comprendre la violence sexuelle
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La violence sexuelle et l’agression sexuelle : De quoi parle-t-on?
Les pages de ce dossier présentent des contenus qui portent principalement sur la violence sexuelle, qui englobe tous les actes de violence se manifestant de façon sexuelle et qui inclut, notamment, les agressions sexuelles. Toutefois, selon les sources de données rapportées et le contexte, le terme agression sexuelle est utilisé lorsque l’information présentée concerne cette forme spécifique de violence sexuelle. Les définitions de chacun de ces termes sont présentées dans ce texte.
Faits saillants
- La violence sexuelle est un terme générique qui englobe un continuum d’actes de violence physique ou psychologique qui se manifestent de façon sexuelle ou qui ciblent la sexualité.
- L’agression sexuelle est une forme de violence sexuelle. Elle est définie dans les Orientations gouvernementales en matière d’agressions sexuelles comme un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par une personne sans le consentement de la personne visée ou en l’absence de consentement valide, notamment lorsque cela implique des personnes mineures.
- D’un point de vue légal, au Canada, l’agression sexuelle est une voie de fait de nature sexuelle en vertu du Code criminel. Pour qu’il y ait une agression sexuelle, plusieurs éléments doivent être présents, comme un contact de nature sexuelle et une absence de consentement.
- D’autres termes sont couramment utilisés pour parler de gestes de violence qui ont un caractère sexuel, comme l’abus sexuel, l’infraction sexuelle, l’infraction à caractère sexuel ou l’infraction d’ordre sexuel, le viol et la violence à caractère sexuel.
Les définitions de la violence sexuelle
Le concept de violence sexuelle est plus large que celui d’agression sexuelle. Il englobe un continuum d’actes de violence physique ou psychologique qui se manifestent de façon sexuelle ou ciblant la sexualité commis contre une autre personne sans son consentement et sans respect à son égard1,2. En plus des agressions sexuelles, la violence sexuelle inclut, entre autres, le harcèlement sexuel, l’exploitation sexuelle et la cyberviolence sexuelle.
Comme mentionné sur le site web du gouvernement du Québec, la violence sexuelle peut prendre plusieurs formes et se manifester à divers degrés de gravité2. Dans la plus récente Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance 2022-2027, le concept de violence sexuelle fait notamment référence aux problématiques d’agression sexuelle, d’exploitation sexuelle et de harcèlement sexuel, incluant leurs diverses manifestations. Toutes ces manifestations sont ancrées dans une dynamique de rapport de force, exposent les personnes victimes à des séquelles multiples et portent atteinte à leurs droits fondamentaux3.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit, quant à elle, la violence sexuelle comme :
« tout acte sexuel, tentative pour obtenir un acte sexuel, commentaire ou avances de nature sexuelle, ou actes visant à un trafic ou autrement dirigés contre la sexualité d’une personne en utilisant la coercition, commise par une personne indépendamment de sa relation avec la personne victime, dans tout contexte, y compris, mais sans s’y limiter, au foyer et au travail ».
En plus des agressions sexuelles, l’OMS inscrit, dans sa définition, des formes de contraintes très variées comme le viol, le mariage forcé ou la cohabitation forcée, l’esclavage sexuel, les actes de violence contre l’intégrité sexuelle des femmes et le harcèlement sexuel4.
Les définitions de l’agression sexuelle
Selon la perspective gouvernementale
Dans les Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle (ci-après, Orientations) publiées par le gouvernement du Québec en 2001, l’agression sexuelle est définie de la façon suivante :
« Une agression sexuelle est un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée ou, dans certains cas, notamment dans celui des enfants, par une manipulation affective ou par du chantage. Il s’agit d’un acte visant à assujettir une autre personne à ses propres désirs par un abus de pouvoir, par l’utilisation de la force ou de la contrainte, ou sous la menace implicite ou explicite. Une agression sexuelle porte atteinte aux droits fondamentaux, notamment à l’intégrité physique et psychologique et à la sécurité de la personne. »5
Cette définition, proposée dans les orientations, est plus large que les articles du Code criminel qui réfèrent à l’agression sexuelle, et inclut d’autres infractions sexuelles (p. ex. contacts sexuels, incitation à des contacts sexuels, leurre, publication non consensuelle d’images intimes)6.
Selon la perspective légale
Depuis 1983 au Canada, l’infraction d’agression sexuelle remplace les infractions de viol et d’attentat à la pudeur. Pour en savoir plus, voir la section sur l’évolution des lois en matière d’agression sexuelle.
Au Canada, en vertu du Code criminel, une agression sexuelle est une voie de fait de nature sexuelle qui survient lorsqu’il y a un contact de nature sexuelle en l’absence de consentement. Il s’agit d’une infraction en vertu du Code criminel7. L’agression sexuelle se classe selon trois degrés de gravité, soit l’agression sexuelle (art. 271), l’agression sexuelle armée, menaces à une tierce personne ou infliction de lésions corporelles (art. 272) et l’agression sexuelle grave (art. 273). Plus précisément, pour qu’il y ait une agression sexuelle, plusieurs éléments doivent être présents :
- Un contact : Le contact physique peut constituer une agression sexuelle même s’il se fait sur les vêtements.
- La nature sexuelle : La nature sexuelle de l’agression est déterminée objectivement selon, notamment, les circonstances qui l’entourent, comme la ou les parties du corps qui ont été touchées, les paroles échangées et les gestes commis. Ainsi, dans une poursuite criminelle, l’État n’a pas besoin de prouver que la personne accusée avait l’intention que son comportement soit de nature sexuelle.
- Une absence de consentement : L’absence de consentement survient (1) lorsque la personne victime ne consent pas au contact de nature sexuelle ou (2) lorsque la loi prévoit que son consentement n’est pas valide. Le consentement existe lorsqu’une personne manifeste, par ses paroles ou ses actes, son accord au contact de nature sexuelle. Ainsi, il n’est pas nécessaire qu’une personne refuse le contact sexuel par ses paroles ou ses gestes; il suffit qu’elle n’ait pas manifesté son accord pour qu’il y ait absence de consentement. Le consentement doit aussi être concomitant à l’activité sexuelle et peut être retiré à tout moment. De plus, le droit considère qu’une personne ne peut donner son consentement si elle est incapable de le formuler (handicap, intoxication), si elle est inconsciente ou si elle est incitée ou engagée à l’activité par abus de confiance, de pouvoir ou d’autorité (p. ex. sous menace). Le consentement n’est pas valide dans les situations où il est donné par une personne en situation de dépendance ou par une personne de moins de 16 ans, sauf dans les cas d’exceptions spécifiquement mentionnées dans la loi.
- Une intention criminelle : En plus de ces éléments qui constituent l’acte criminel (actus reus), la personne auteure de l’acte doit également avoir une intention criminelle (mens rea) afin que l’on puisse considérer qu’il s’agit d’une agression sexuelle. Ainsi, la personne auteure d’un contact sexuel non consenti pourrait ne pas avoir d’intention criminelle si elle avait une croyance sincère, mais erronée que l’autre personne avait consenti à l’acte.
Selon les études scientifiques et les enquêtes populationnelles
Par ailleurs, les définitions de l’agression sexuelle utilisées dans les études scientifiques ou les enquêtes populationnelles varient d’une étude à l’autre. Elles réfèrent généralement à des agressions sexuelles avec contact physique, qui incluent, notamment, des contacts sexuels ou des actes de pénétration. Par exemple, dans les deux grandes enquêtes canadiennes qui documentent l’agression sexuelle, soit l’Enquête sociale générale (ESG) sur la victimisation et l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés (ESEPP), les agressions sexuelles vécues à l’enfance se rapportent à « des activités sexuelles forcées ou aux tentatives d’activités sexuelles forcées » et à « des contacts sexuels non désirés commis par une personne adulte ». Pour les agressions sexuelles subies à l’âge adulte, les manifestations incluses sont un peu plus exhaustives et incluent aussi le fait « d’avoir eu des relations sexuelles sans être en mesure d’y consentir, comme en étant sous l’effet d’une drogue ou de l’alcool ».
- Pour en savoir plus sur les méthodologies de ces enquêtes, consultez la page Sources et considérations méthodologiques.
Ainsi, les résultats des études et des enquêtes, comme lorsque l’on rapporte la prévalence des agressions sexuelles commises et subies dans une population donnée, doivent donc être interprétés en fonction de la définition retenue par celles-ci.
Autres termes couramment utilisés
Il peut être difficile de se retrouver parmi tous les termes utilisés pour parler de gestes à caractère sexuel non désirés. En plus des termes couramment utilisés, comme violence sexuelle et agression sexuelle, d’autres termes sont aussi employés dans les médias et l’espace public pour désigner ces violences. Ils sont principalement tirés d’anciennes lois ou de lois actuelles, et doivent parfois être utilisés avec prudence.
Abus sexuel
Le terme abus sexuel est particulièrement utilisé lorsqu’on parle d’agression sexuelle commise envers une ou un enfant (personne âgée de moins de 18 ans). Sur le plan linguistique, le terme abus sexuel est un calque de l’anglais sexual abuse et réfère au « fait d’user mal d’une position d’autorité ou d’une relation de confiance »9. Ce terme est fréquemment employé au Québec et en Europe francophone, notamment dans certains textes de loi9. Toutefois, le recours au terme abus sexuel n’est pas recommandé, car la notion d’abus réfère davantage à l’usage excessif d’un droit10, alors qu’il n’existe pas d’usage normal d’une ou d’un enfant à des fins sexuelles. Le terme abus a aussi pour effet de minimiser la situation et d’exclure le caractère violent d’une agression sexuelle11.
Au Québec, la Loi sur la protection de la jeunesse utilise le terme abus sexuel pour désigner les situations où une personne âgée de moins de 18 ans subit ou encourt un risque sérieux de subir des gestes à caractère sexuel inappropriés en raison de son âge et de son développement, avec ou sans contact physique, de la part de ses parents ou d’une autre personne, et lorsque ses parents ne prennent pas les moyens nécessaires pour mettre fin à la situation (art. 38, al. 2, par. d)12. En l’occurrence, le terme abus sexuel peut être employé dans la mesure où la Loi sur la protection de la jeunesse couvre des situations où une personne agit de manière excessive dans la commission d’un acte sexuel qu’elle pourrait normalement poser sans porter préjudice. Par exemple, on pourrait parler d’abus sexuel au sens de cette loi lorsque des parents ont des relations sexuelles devant leurs enfants.
Infraction sexuelle, à caractère sexuel ou d’ordre sexuel
Peu importe le terme utilisé, l’infraction sexuelle, l’infraction à caractère sexuel ou l’infraction d’ordre sexuel réfèrent toutes à un geste sexuel commis sans le consentement de la personne et interdit par la loi. Les termes sont parfois utilisés de manière interchangeable, même si des différences peuvent être relevées selon les sources qui les rapportent. Par exemple, Statistique Canada et le ministère de la Sécurité publique du Québec, bien qu’ils présentent tous les deux des données sur les infractions sexuelles selon le Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l’affaire (DUC), incluent des infractions différentes dans leurs définitions d’infractions sexuelles.
L’infraction sexuelle, plus spécifiquement, est couramment utilisée comme terme parapluie pour désigner à la fois les crimes d’agression sexuelle et les autres infractions d’ordre sexuel prévues dans le Code criminel. Au Canada, en vertu du Code criminel, les infractions d’ordre sexuel incluent différents crimes de nature sexuelle posés envers des personnes d’âges divers selon les dispositions en question. Les contacts sexuels, l’inceste, le voyeurisme, l’exploitation sexuelle et la publication non consensuelle d’une image intime sont des exemples d’infractions d’ordre sexuel. D’autres crimes sexuels, bien que désignés comme des infractions tendant à corrompre les mœurs, comme la pornographie juvénile et le leurre, sont généralement compris, dans le langage familier, comme des infractions d’ordre sexuel.
Viol
Depuis 1983, au Canada, l’infraction de viol a été remplacée par les infractions d’agression sexuelle dans le Code criminel (art. 271, art. 272 et art. 273)7. L’infraction de viol exigeait la preuve qu’un homme âgé de 14 ans et plus avait eu des relations sexuelles avec pénétration avec une femme autre que son épouse sans son consentement. Ainsi, en droit, l’utilisation actuelle du terme « viol » est désuète et inexacte, et devrait plutôt être remplacée par « agression sexuelle impliquant une pénétration ». Toutefois, l’usage du mot « viol » est courant et utilisé par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour faire référence à une agression sexuelle avec pénétration, et il demeure l’équivalent francophone du terme rape en langue anglaise. Dans le langage familier, certaines personnes emploient le terme « viol » afin de représenter plus correctement la violence qu’elles ont subie.
Violence à caractère sexuel
En droit, le terme violence à caractère sexuel est principalement utilisé dans le contexte des établissements d’enseignement supérieur en raison de la loi à cet effet. En vertu de la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur (ch. P.22.1), la notion de violence à caractère sexuel s’entend par toute forme de violence commise par le biais de pratiques sexuelles ou en ciblant la sexualité, dont l’agression sexuelle. Elle s’entend également par toute autre inconduite qui se manifeste notamment par des gestes, paroles, comportements ou attitudes à connotation sexuelle non désirés, incluant celle relative aux diversités sexuelles ou de genre, exprimés directement ou indirectement, y compris par un moyen technologique. Selon cette définition, les manifestations de harcèlement sexuel constituent également des violences à caractère sexuel13. Le ministère de l’Enseignement supérieur, dans son Plan d’action visant à prévenir et à contrer les violences à caractère sexuel en enseignement supérieur 2022-2027, adopte aussi cette définition14.
Références
- Info-aide violence sexuelle (29 août 2023). « Les formes de la violence sexuelle », dans Info-aide violence sexuelle, [en ligne], <https://infoaideviolencesexuelle.ca/comprendre/les-formes-de-la-violenc…; (consulté le 17 juillet 2024).
- Gouvernement du Québec (15 novembre 2023). « Formes de violences », <https://www.quebec.ca/famille-et-soutien-aux-personnes/violences/violen…; (consulté le 16 juillet 2024).
- Gouvernement du Québec (2022). Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance 2022-2027, [en ligne], Québec, Secrétariat à la condition féminine, <https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publication…; (consulté le 3 novembre 2022).
- Organisation mondiale de la santé (2012). Comprendre et lutter contre la violence à l’égard des femmes, [en ligne], Organisation mondiale de la santé, <https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/86236/WHO_RHR_12.37_fr…; (consulté le 14 mars 2022).
- Gouvernement du Québec (2001). Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, [en ligne], Québec, Ministère de la Santé et des Services sociaux, <https://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/fichiers/2000/00-807-1.pdf> (consulté le 3 mars 2022).
- Gouvernement du Québec (2024). Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance 2022-2027 - Mise à jour 2024, [en ligne], Québec, Secrétariat à la condition féminine, <https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/org/SCF/publications/plan…; (consulté le 16 juillet 2024).
- Code criminel, L.R.C., ch. C-46 (1985). Ministre de la Justice du Canada, <https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/C-46/> (consulté le 24 novembre 2022).
- Association des centres jeunesse du Québec (2000). Guide d’intervention lors d’allégations d’abus sexuel envers les enfants, Montréal, Association des centres jeunesse du Québec.
- Office québécois de la langue française (2021). « Abus sexuel », dans Grand dictionnaire terminologique, [en ligne], <https://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=26507456> (consulté le 8 mars 2022).
- Office québécois de la langue française (2001). « Abus », dans Grand dictionnaire terminologique, [en ligne], <https://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8366795> (consulté le 16 mars 2022).
- Zaccour, S., et M. Lessard (2021). « La culture du viol dans le discours juridique : Soigner ses mots pour combattre les violences sexuelles », Revue Femmes et Droit, vol. 33, n° 2, p. 175‑205.
- Loi sur la protection de la jeunesse, RLRQ, ch. P-34.1 (1977). LégisQuébec : Éditeur officiel du Québec, <http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/P-34.1> (consulté le 29 novembre 2021).
- Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur, ch. P-22.1 (2017). LégisQuébec : Éditeur officiel du Québec, <https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/P-22.1> (consulté le 8 mars 2022).
- Ministère de l’Enseignement supérieur (2022). Plan d’action visant à prévenir et à contrer les violences à caractère sexuel en enseignement supérieur 2022-2027, [en ligne], Québec, Gouvernement du Québec, <https://www.quebec.ca/education/accompagnement-etudiants/soutien-etabli…; (consulté le 21 mars 2023).
Rédaction : Maude Lachapelle, conseillère scientifique, INSPQ
Collaboration : Dominique Gagné, conseillère scientifique, INSPQ
Catherine Moreau, conseillère scientifique, INSPQ
Béatrice Hénault-Arbour, conseillère scientifique, INSPQ
Révision externe : Michaël Lessard, avocat et professeur de droit, Université de Sherbrooke.