Encadré 2- Les pensionnats au Canada
Pendant plus de 100 ans, une large proportion d’enfants autochtones ont été retirés de leur milieu familial et obligés de fréquenter les pensionnats. Pour la Commission de vérité et réconciliation du Canada, l’établissement et le fonctionnement des pensionnats se sont avérés être des éléments centraux au génocide culturel exercé à l’égard des peuples autochtones. L’objectif de ce mécanisme était de « séparer les enfants autochtones de leur famille afin de limiter et d’affaiblir les liens familiaux et culturels et d’endoctriner les enfants autochtones pour qu’ils adhèrent à une nouvelle culture » [50].
Au Canada, les premiers pensionnats ont été créés dans les années 1880, et ont exercé leurs activités jusqu’à la fin des années 1990. Au Québec, les premiers pensionnats catholiques et anglicans ont été ouverts au début des années 1930 [50]. Sur les 135 établissements répertoriés au Canada, 11 étaient établis dans la province. Quelque 13 000 enfants au Québec les auraient fréquentés [47].
Les nombreux témoignages exprimés par d’anciens élèves et leurs proches, de même que le dépouillement de documents d’archives, ont révélé que les pensionnats ont compromis la santé et le bien-être des enfants qui les ont fréquentés. De nombreux élèves ont subi des sévices physiques, psychologiques et sexuels, ont été victimes de négligence, et plusieurs d’entre eux ont succombé à des maladies infectieuses, notamment la tuberculose [5,50,78,82,83].
De plus, la pauvreté de l’enseignement donné par un personnel non qualifié et le sous-financement des établissements ont également compromis le développement global de générations d’Autochtones [5,78]. Le système des pensionnats a généré au Canada des changements socioculturels majeurs chez les peuples autochtones, notamment des atteintes importantes au plan du développement des compétences sociales et des habiletés parentales [5,50,83–85].
Les répercussions ne se limitent pas aux élèves qui ont fréquenté ces établissements. Les conjoints des survivants, leurs enfants, leurs petits-enfants, les membres de leur famille élargie et leur collectivité sont également affectés [1,6,36,47,50,81,83,86,87]. Selon la théorie des traumas [76], les traumatismes collectifs passés et contemporains sont susceptibles de contribuer à la transmission intergénérationnelle de comportements délétères [83,88] et à une certaine « normalisation de la souffrance » [36]. Au Québec, les résultats de l’Enquête régionale sur la santé des Premières Nations du Québec (2008) indiquent que, parmi les répondants des Premières Nations, 69,5 % de tous les adolescents et 79,1 % de tous les enfants avaient une relation directe avec une personne qui a fréquenté un pensionnat [89].