L'intimidation chez les adultes

Faits saillants

  • L’intimidation chez les adultes est une problématique peu documentée.
  • Différentes manifestations d’intimidation peuvent faire partie de phénomènes plus larges comme la violence conjugale ou la maltraitance envers des adultes en situation de vulnérabilité.
  • Les adultes peuvent être victimes de cyberintimidation.
  • Certaines stratégies, telles que le changement des normes sociales, peuvent contribuer à prévenir l’intimidation à l’âge adulte.

Le terme intimidation est souvent utilisé à tort pour nommer différents gestes d’agression posés en personne ou en ligne, et plus particulièrement chez les adultes. Plusieurs éléments doivent être présents pour conclure qu’il s’agit bel et bien d’une situation d’intimidation (caractère répétitif, inégalité des rapports de force, geste généralement délibéré ayant pour effet de nuire ou de faire du mal), et il faut donc faire preuve de prudence avant de qualifier un geste d’intimidation. Pour en savoir davantage à propos de l’intimidation (définition et considérations méthodologiques), consultez la section De quoi parle-t-on?

L’intimidation peut être vécue à différents stades de la vie, notamment à l’âge adulte. Cependant, l’intimidation chez les adultes est une problématique peu documentée. L’information disponible concerne principalement la cyberintimidation vécue par les jeunes adultes en milieu collégial et universitaire et par la population générale. L’intimidation vécue par les jeunes adultes en contexte sportif est également documentée.

L’intimidation vécue à travers des phénomènes connexes

Différentes manifestations d’intimidation vécue à l’âge adulte peuvent faire partie de phénomènes plus larges et passibles de sanctions ou être confondues avec d’autres types de violence. À titre d’exemple, l’intimidation peut faire partie du cycle de la violence conjugale et peut être une composante de la maltraitance vécue par des adultes en situation de vulnérabilité. Les phénomènes connexes à l’intimidation incluent notamment la discrimination, l’homophobie, la transphobie, le racisme et les violences sexuelles1. En contexte de travail, on parlera de harcèlement psychologique. Même si certaines caractéristiques du harcèlement psychologique en milieu de travail peuvent s’apparenter à celles de l’intimidation, il est préférable de s’en tenir au concept de harcèlement psychologique en milieu de travail puisqu’il réfère à une définition légale précise comportant des obligations légales pour l’employeur. Pour en savoir plus, consultez Harcèlement psychologique au travail.


Portrait de la cyberintimidation chez les adultes

Les statistiques concernant la prévalence de la cyberintimidation chez les adultes seront mises à jour suite à la publication des résultats d’une enquête de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) en cours de réalisation. Cette étude permettra de décrire l’ampleur de l’intimidation et de la cyberintimidation au Québec.

Peu de données permettent de dresser le portrait de la cyberintimidation chez les adultes. Chez les jeunes adultes, une enquête sur la cyberintimidation menée dans quatre universités canadiennes (2012-2014) indique qu’environ 24 % d’entre eux ont été victimes de cyberintimidation au cours des 12 mois précédant l’enquête2. Les gestes d’intimidation ont été posés à l’aide de différents moyens, tels que les réseaux sociaux (55 %), les courriels (47 %), les textos (43 %) et les blogues, forums ou salles de discussion (25 %). Les femmes étaient beaucoup plus susceptibles de déclarer avoir vécu de la cyberintimidation sur les réseaux sociaux et par l’entremise de courriels tandis que les hommes étaient plus susceptibles de signaler de la cyberintimidation sur des blogues et des forums de discussion2. Parmi les étudiants interrogés, 4,5 % des femmes et 6,6 % des hommes ont admis avoir posé des gestes de cyberintimidation2.

Selon les données de l’Enquête sociale générale de 2014, parmi les internautes québécois de 15 ans et plus, environ un sur 20 (5 %) a été victime de cyberintimidation entre 2009 et 20143. Les adultes de moins de 35 ans sont davantage victimes de cyberintimidation. Environ 9 % des personnes de 15 à 34 ans ont vécu au moins une forme de cyberintimidation, comparativement à 3 ou 4 % des internautes de 35 ans et plus3. Cette différence peut être attribuable à l’utilisation plus fréquente d’Internet par les moins de 35 ans, ce qui les expose de manière plus importante à la cyberintimidation4.

Motifs pour lesquels les gestes de cyberintimidation sont commis

Selon l’enquête sur la cyberintimidation dans les universités canadiennes, les étudiantes et étudiants ont mentionné avoir été victimes de cyberintimidation en raison de leurs problèmes interpersonnels, leur apparence physique, leurs opinions et leurs croyances. Les femmes ont également indiqué avoir subi des gestes de cyberintimidation en raison de leur genre, et les hommes en raison de leur appartenance ethnique. Des étudiantes et étudiants ont également mentionné que la cyberintimidation faisait partie d’un jeu en ligne ou d’une simple blague. Le fait qu’une personne les exaspérait ou le fait qu’elle les avait déjà intimidées sont des raisons qui ont souvent été évoquées par les personnes auteures de cyberintimidation pour expliquer leurs gestes. La personne victime et celle ayant posé des gestes de cyberintimidation sont généralement de même sexe, et les femmes ont mentionné que ces gestes étaient commis par une personne qu’elles pensaient être une amie2.

Conséquences potentielles

Les études ne permettent pas d’établir un lien de causalité ni de temporalité entre la cyberintimidation et les conséquences vécues. De plus, certaines de ces conséquences pourraient être modulées par des facteurs génétiques ou environnementaux et la cooccurrence d’intimidation5.

Les conséquences qui peuvent découler de la cyberintimidation sur les personnes qui en sont victimes sont multiples.

Problèmes internalisés§

  • Anxiété5-7 ou stress7
  • Dépression5-7
  • Automutilation*5,6
  • Troubles alimentaires5
  • Sentiment d’embarras, de tristesse, de colère, de peur ou de honte6
  • Isolement6
  • Faible estime de soi6
  • Crises de panique6
  • Trouble de stress post-traumatique6

Problèmes externalisés§

  • Inattention, hyperactivité ou impulsivité5
  • Problèmes de comportements5
  • Comportements antisociaux5
  • Consommation d’alcool ou de cannabis5
  • Perte de confiance envers la technologie et changement dans sa fréquence d’utilisation (diminution ou un arrêt)6
  • Parcours scolaire affecté (lorsque la cyberintimidation se déroule en contexte d’études collégiales et universitaires)6

Santé physique§

  • Maux de ventre6
  • Palpitations cardiaques5

Expériences de type psychotique§

  • Hallucinations5
  • Paranoïa5,6

§Les conséquences ne sont pas présentées par ordre d’importance.
* Cette conséquence a également été documentée chez les jeunes adultes qui posent des gestes de cyberintimidation8

En outre, les conséquences de la cyberintimidation peuvent être comparables aux conséquences de l’intimidation6.

Le lien entre la cyberintimidation et le suicide chez les adultes

Les études qui ont examiné le lien entre la cyberintimidation et le suicide chez les adultes et les jeunes adultes indiquent que les personnes qui sont victimes de cyberintimidation seraient plus à risque d’avoir des idéations suicidaires5-9, des comportements suicidaires8 ou de commettre une tentative de suicide6,8,9, comparativement à celles qui ne sont pas victimes.

Dans une moindre mesure, les jeunes adultes qui posent des gestes de cyberintimidation seraient plus à risque d’avoir des idéations ou des comportements suicidaires que ceux qui n’en posent pas8.

Les études ne permettent cependant pas d’établir un lien de causalité entre la cyberintimidation et les idéations et comportements suicidaires. L’impact de la cyberintimidation sur les idéations suicidaires pourrait être modulé par certains facteurs comme une détresse psychologique9.


La prévention de l’intimidation à l’âge adulte

Puisque certaines manifestations d’intimidation peuvent faire partie de phénomènes plus larges et passibles de sanctions, la prévention de ces gestes doit s’inscrire dans différentes stratégies ou mesures de prévention visant les types de violence dans lesquels les gestes sont posés.

Certaines stratégies reconnues efficaces en prévention de la violence, comme le changement des normes sociales qui favorisaient jusqu’alors la violence, peuvent également contribuer à la prévention de l’intimidation à l’âge adulte à travers la création et le maintien de milieux de vie bienveillants et respectueux, de rapports égalitaires et de comportements empreints de civisme.

Références

  1. MINISTÈRE DE LA FAMILLE (2021). Plan d’action concerté pour prévenir et contrer l’intimidation et la cyberintimidation 2020-2025, Montréal (Québec), Ministère de la famille.
  2. FAUCHER, C., M. JACKSON et W. CASSIDY (2014). « Cyberbullying among university students: gendered experiences, impacts, and perspectives », Education Research International, vol. 2014, p. e698545.
  3. GRAVEL, M.-A. (2017). La cyberintimidation et les expériences de victimisation, Québec, Institut de la statistique du Québec, « Données sociodémographiques en bref ».
  4. GRAVEL, M.-A. (2015). La victimisation de la population québécoise : victimisation criminelle et cybervictimisation, Québec, Institut de la statistique du Québec.
  5. BALDWIN, J. R., Z. AYORECH, F. V. RIJSDIJK, T. SCHOELER et J. B. PINGAULT (2021). « Cyber-victimisation and mental health in young people: A co-twin control study », Psychological Medicine, vol. 51, n° 15, p. 2620‑2630.
  6. STEVENS, F., J. R. C. NURSE et B. ARIEF (2021). « Cyber stalking, cyber harassment, and adult mental health: A systematic review », Cyberpsychology, Behavior and Social Networking, vol. 24, n° 6, p. 367‑376.
  7. MARTINEZ-MONTEAGUDO, M. C., B. DELGADO, A. DIAZ-HERRERO et J. M. GARCIA-FERNANDEZ (2020). « Relationship between suicidal thinking, anxiety, depression and stress in university students who are victims of cyberbullying », Psychiatry Research, vol. 286, p. 112856.
  8. JOHN, A., A. C. GLENDENNING, A. MARCHANT, P. MONTGOMERY, A. STEWART, S. WOOD, K. LLOYD et K. HAWTON (2018). « Self-harm, suicidal behaviours, and cyberbullying in children and young people: Systematic review », Journal of Medical Internet Research, vol. 20, n° 4, p. e129.
  9. CENAT, J. M., K. SMITH, M. HEBERT et D. DERIVOIS (2019). « Cybervictimization and suicidality among French undergraduate students: A mediation model », Journal of Affective Disorders, vol. 249, p. 90‑95.
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