Aïssatou Fall
Lise Goulet, École de santé publique Université de Montréal, Institut national de santé publique du Québec.
Michel Vézina, Département de médecine sociale et préventive Université de Laval, Institut national de santé publique du Québec
Contexte :
Notre étude a pour objectif de dresser un portrait des situations de tension ou de stress au travail et des conditions de travail des femmes enceintes de la région de Montréal, au Québec.
Méthode :
3765 travailleuses non autonomes ayant exercé un emploi rémunéré, au moins 15 heures/semaine et au moins quatre semaines consécutives depuis le début de leur grossesse, ont été interviewées à 24-26 semaines de grossesse. L'échelle abrégée de Karasek a été utilisée pour mesurer les situations de tension au travail. La Classification Nationale des Professions (2001) a permis de regrouper les femmes enceintes au travail par genre et niveau de compétence. Des analyses univariées et bivariées ont été effectuées pour les caractériser et rechercher les variables associées à la tension au travail.
Résultats :
24.4% des travailleuses enceintes étaient exposées à des situations de tension au travail, soit une combinaison de demande psychologique élevée et de faible latitude décisionnelle (Job Strain). La prévalence de ces situations était très élevée dans les secteurs de la santé (36.7%); des transformations, de la fabrication et des services d'utilité publique (34.3%); de la vente et des services (28.0%); des affaires, des finances et de l'administration (27.7%) et pour les niveaux de compétence intermédiaire (31.6%) et élémentaire (27.7%). 69.1% des travailleuses exposées à des situations de tension au travail étaient également exposées à un faible soutien social au travail (Iso Strain). Un soutien social au travail élevé était un facteur protecteur contre ces situations de tension au travail (OR=0.40 ; IC95% [0.34-0.47]). Les facteurs de risque associés à des situations de tension au travail étaient : le fait de travailler plus de 40 heures par semaine, les horaires irréguliers, la posture de travail, le port de charge lourde, le jeune âge des mères, un bas niveau d'éducation, la monoparentalité, un revenu <15 000$. Les femmes enceintes exposées à de la tension au travail avaient différents profils selon le genre et le niveau de compétences. Même si les facteurs de risque de tension au travail étaient plus fréquents chez les travailleuses ayant un bas niveau socio-économique et une faible qualification, 18.6% des professionnels étaient exposés à ces situations de tension au travail.
Conclusion :
La tension au travail représente un important facteur de risque organisationnel pour les femmes enceintes au travail du fait de leur vulnérabilité face aux contraintes ergonomiques et psychologiques liées au travail.