Évaluation et traitement de l'exposition aux liquides biologiques

Il faut procéder le plus tôt possible à l’évaluation du risque et de la possibilité de prendre la prophylaxie antirétrovirale.

On évaluera également la nécessité d’administrer un vaccin et des immunoglobulines hyperimmunes contre l’hépatite B, ainsi qu’une antibiothérapie prophylactique et le vaccin antitétanique dans le cas de morsures.

Après 72 heures, il n’y a plus de bénéfice à administrer une thérapie antirétrovirale, mais on peut donner le vaccin de l’hépatite B jusqu’à 7 jours après une exposition percutanée et 14 jours après une exposition sexuelle.

Évaluation du risque

Le médecin fera une évaluation du statut infectieux de la personne exposée et si possible de la source si elle est disponible. Lorsque la source est disponible, on peut évaluer ses risques avec un questionnaire ainsi que la présence de symptômes récents de la primo-infection au VIH (syndrome mononucléosique) ou d’hépatite aigue. Dans la mesure du possible, on devrait procéder à un prélèvement pour déterminer le statut sérologique de la source pour le VIH, le VHB et le VHC. Dans le cas d’une source connue porteuse du VIH, on tentera également d’obtenir ses résultats de génotypage pour déterminer les résistances du virus aux antirétroviraux, ainsi que son histoire médicamenteuse.

Si, après consultation médicale, on  juge qu’un risque significatif existe, les antirétroviraux seront poursuivis pendant 28 jours. La décision de poursuivre ou non la prophylaxie dépendra du type d’accident et des risques que présente la personne-source.

Dans le cas où la source s’avère séronégative, certains comportements récents à risque d’acquisition du VIH peuvent justifier la poursuite de la prophylaxie (à cause de la période fenêtre pendant laquelle la personne infectée peut être encore séronégative et de la qualité des tests utilisés). Afin de ne pas interrompre le traitement, il faut envisager un rapatriement sanitaire ou, si la logistique le permet, s’assurer d’un suivi médical adéquat ainsi que d’un approvisionnement suffisant pour compléter le traitement prophylactique sur place.

Traitement

Antirétroviraux utilisés en prophylaxie post-exposition

Les recommandations du présent guide sont basées sur le guide pour la prophylaxie et le suivi après une exposition au VIH, au VHB et au VHC du MSSS publié en 20172  Il est à noter que la prescription d’une bithérapie, décrite dans les documents antérieurs, n’est plus recommandée.

Posologie

Lorsque le niveau de risque associé à l’exposition est jugé significatif, une triple thérapie est suggérée. Cette thérapie doit être prise le plus rapidement possible, idéalement moins de deux heures après le contact infectieux. Passé un délai de 72 heures, la médication n’est généralement plus recommandée.

Le traitement suggéré consiste en une combinaison de tenofovir/emtricitabine (Truvada) à raison de 1 comprimé die avec raltegravir (Isentress) 400 mg po BID.

Alternative :

Si le raltegravir n’est pas disponible sur place, on pourrait le remplacer par le lopinavir-ritonavir 400/100 mg bid (Kaletra) en combinaison avec l’emtricitabine et ténofovir (Truvada). Le lopinavir-ritonavir peut être plus facilement disponible sur place que le raltégravir.

Durée du traitement

La durée de la prophylaxie post-exposition est de 28 jours. La prophylaxie peut être cessée si les résultats sérologiques de la personne source peuvent être obtenus et s’avèrent négatifs, en absence de risque d’une infection récente (période fenêtre – voir plus haut).  On recommande d’apporter une provision de 7 jours, considérant le délai nécessaire pour obtenir les résultats des tests effectués chez la personne source et pour obtenir une prescription d’antirétroviraux sur place. S’il est impossible d’obtenir les antirétroviraux sur place, on peut prévoir une prescription de 28 jours ou au besoin faire les arrangements nécessaires en vue d’un rapatriement sanitaire. À cet égard, il est important de contracter une assurance adéquate avant le départ. À titre indicatif, le coût d’une semaine de prophylaxie dépasse les 300 $.

Effets secondaires

Les effets secondaires potentiels sont nombreux. Le lecteur peut consulter le site de AIDSinfo du National Institutes of Health (en anglais)3  ou les feuillets pour patients du guide thérapeutique VIH/VHC (en français)4  pour plus de détails.

Des effets digestifs sont fréquents et peuvent habituellement être contrôlés avec une médication appropriée (antiémétique). Il faut éviter l’utilisation d’antiacide contenant du magnésium ou de l’aluminium qui réduiront l’absorption du raltegravir. Le tenofovir peut entraîner une néphropathie. Ceci est toutefois rare lorsque pris pour une courte période. Si les médicaments sont difficiles à tolérer et que la prophylaxie continue d’être indiquée, il est suggéré de consulter un médecin qui a une expertise dans le suivi et le traitement du VIH pour trouver une alternative appropriée.

Précautions

On recommande une FSC de base ainsi qu’un bilan rénal et hépatique, qui sera répété à 2 semaines, si la prophylaxie est continuée. Plusieurs feuillets explicatifs à l’intention des patients4, sont disponibles en ligne.

Interactions avec d’autres médicaments

Tous ces médicaments ont le potentiel de provoquer des interactions médicamenteuses parfois graves. Il est donc important de vérifier la liste des médicaments que prend la personne avant de lui remettre une prescription d’antirétroviraux.

Consultez en ligne les possibles interactions lorsqu’une médication antirétrovirale est utilisée5.

Vaccin et immunoglobulines contre l’hépatite B

Les immunoglobulines hyper-immunes contre l’hépatite B sont recommandées pour les personnes non immunes ou non-répondeurs au vaccin ayant eu une exposition percutanée ou aux muqueuses avec des liquides biologiques ou du sang, une relation sexuelle avec un personne atteinte d’hépatite B aiguë ou après une agression sexuelle. Elles peuvent être envisagées pour les personnes non immunes ayant eu une relation sexuelle avec un nouveau partenaire atteint d’hépatite B chronique dans les 14 derniers jours.

Les personnes non vaccinées ou partiellement vaccinées contre l’hépatite B peuvent bénéficier d’un vaccin contre l’hépatite B après une exposition à risque. Si une sérologie post-vaccinale n’a jamais été faite, on devrait vérifier à l’aide d’une prise de sang si les titres d’anticorps sont adéquats (> 10UI/L). Se référer au document du PIQ sur la vaccination post exposition pour plus d’information sur la prise en charge1

Hépatite C

Il n’existe pas de prophylaxie post-exposition contre l’hépatite C. On fera le suivi sérologique de la personne potentiellement exposée tel que décrit plus bas. Dans le cas d’une séroconversion, on doit adresser la personne exposée à un spécialiste en maladies infectieuses ou hépatologie.

Suivi sérologique

La personne exposée devrait avoir un suivi sérologique pour le VIH et l’hépatite C, 4 semaines et 12 semaines après la possible exposition. Les personnes non immunes pour l’hépatite B devraient aussi avoir un dosage de l’antigène de l’hépatite B (HBs Ag) ainsi que des anticorps pour l’hépatite B (anti-Hbs) un mois après la vaccination. Pour connaître le suivi sérologique à faire, il est suggéré de consulter le guide du MSSS sur la prophylaxie post-exposition aux liquides biologiques4.