Fièvre Oropouche
Le virus Oropouche (Orthobunyavirus oropoucheense, VORO) est un arbovirus de la famille des Peribunyaviridae, genre orthobunyavirus. La zone endémique classique du VORO se trouve en Amérique du Sud dans le bassin amazonien, particulièrement au Brésil, en Colombie et au Pérou. Les réservoirs naturels du VORO sont des animaux sylvestres, comme les paresseux, les singes, les rongeurs et les oiseaux.
Transmission
Transmission zoonotique : La fièvre Oropouche est une maladie transmise par les piqûres d’arthropodes, principalement certaines espèces de moucherons (Culicoides paraensis) et de moustiques (Culex quinquefasciatus, Coquillettidia venezuelensis, Mansonia venezuelensis, et Aedes serratus). Ces espèces vectrices ne sont pas présentes pour l’instant au Québec.
Transmission interhumaine : Des cas de transmission verticale (de la mère au fœtus) ont été déclarés pour la première fois en 2024 au Brésil. Une étude1 rapporte aussi la présence d’ARN du VORO dans les liquides biologiques d’un patient infecté (sang, urine, sperme). Le virus retrouvé dans le sperme au 16e jour post-infection a été isolé en culture, ce qui dénote la présence du virus capable de réplication. Ceci soulève la possibilité que le virus puisse se transmettre par voie sexuelle, bien que cela n’ait pas encore été rapporté.
En raison de la possibilité de transmission verticale et des incertitudes quant à la transmission sexuelle, les CDC des États-Unis ont émis la recommandation que les femmes enceintes évitent les voyages non essentiels dans certaines zones ciblées. Ils recommandent également l’abstinence ou le port du condom lors d’un voyage dans tous les pays touchés ainsi que pour les 6 semaines suivant le retour de ces pays.
Tableau clinique
La fièvre Oropouche est symptomatique chez 60 % des personnes infectées. Lorsque présents, les symptômes durent habituellement de 3 à 6 jours. Les premiers symptômes apparaissent après une incubation de 3 à 10 jours, et s’apparentent à ceux de la dengue, du chikungunya ou du Zika : fièvre, céphalées, myalgies et arthralgies. D’autres symptômes sont possibles : douleurs rétro-orbitaires, douleurs abdominales, nausées et vomissements, photophobie et à l’occasion, éruption maculopapuleuse. Des symptômes peuvent réapparaître quelques jours à quelques semaines après l’infection initiale, chez 60 à 70 % des personnes dont les symptômes s’étaient résorbés.
Les complications graves (encéphalite, méningite, syndrome de Guillain-Barré ou hémorragies) sont rares. Les facteurs de risque qui mènent à des complications de la maladie ne sont pas encore bien connus. En date d’août 2024, deux jeunes femmes vraisemblablement en santé sont décédées de la maladie au Brésil2.
Des complications fœtales graves ont été rapportées parmi des femmes enceintes ayant contracté l’infection : malformation congénitale (microcéphalie), avortement spontané et mortinaissance. En date du 30 octobre 2024, le lien de causalité entre l’infection et ces complications a été suggéré par des chercheurs lors d’une étude de cas au Brésil. Un cas de microcéphalie rapporté à Cuba est en cours d’investigation.
Le traitement de la maladie vise à soulager les symptômes. Il n'existe à ce jour aucun vaccin contre ce virus.
Épidémiologie et risques en voyage
Le VORO est endémique principalement dans le bassin amazonien. Depuis 2024, une transmission locale est toutefois observée en dehors de la zone endémique traditionnelle, avec une recrudescence des cas de fièvre Oropouche dans certains pays d’Amérique du Sud (Brésil, Bolivie, Colombie, Équateur, Guyana, Pérou et Panama) et des Caraïbes (Cuba et République dominicaine).
Plusieurs voyageurs internationaux ont développé la maladie au retour d’un séjour à Cuba. Ce pays connaît une première éclosion qui touche la plupart des provinces, alors que le pays était auparavant exempt de cas de fièvre Oropouche.
Le risque d’infection au VORO est considéré faible chez les voyageurs, mais ce risque augmente chez les personnes qui font beaucoup d’activités extérieures, autant durant la journée que durant la nuit.
Prévention
Les personnes qui planifient séjourner dans une zone où des cas de transmission locale de fièvre Oropouche ont récemment été déclarés devraient être informées des mesures préventives suivantes :
- Appliquer les mesures de protection personnelle contre les piqûres de moustiques (pouvant aussi s’appliquer plus largement aux arthropodes) :
- Se protéger à toute heure du jour et de la nuit;
- Les informations concernant les insectifuges et les modes d’application sont détaillées à la page web mentionnée ci-haut;
- Privilégier les filets moustiquaires avec des mailles plus petites et si possible imprégnées d’insecticides.
- Consulter un professionnel de la santé en cas de symptômes compatibles avec la fièvre Oropouche, durant le voyage et dans les deux semaines suivant le retour;
- Privilégier l’acétaminophène pour le contrôle de la fièvre et des autres symptômes en zone tropicale. Éviter d’utiliser des médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (aspirine, ibuprofène, ou autre). La prise de ce type de médicament peut augmenter le risque d’hémorragie en cas d’infection.
Tenant compte des risques de transmission verticale, et en attendant les conclusions des investigations en cours, les personnes enceintes devraient être informées de ces risques potentiels et porter une attention particulière aux mesures préventives contre les piqûres d’arthropodes.
Références
- Castilletti C, Huits R, Passarelli Mantovani R, Accordini S, Alladio F, et al. (2024). Replication-competent Oropouche virus in semen of a traveler returning to Italy from Cuba. Emerging Infectious Diseases, 30(12), 2684-2686.
- Filho GC, Lima Neto AS, Maia AMPC, da Silva LOR, Cavalcante RDC, Monteiro HDS, et al. (2024). A Case of Vertical Transmission of Oropouche Virus in Brazil. The New England Journal of Medicine.
Auteurs
Comité consultatif québécois sur la santé des voyageurs
Collaborateurs
Bouchra Bakhiyi, Direction des risques biologiques
Judith Fafard, Laboratoire national de santé publique du Québec
Karl Forest-Bérard, Direction de valorisation scientifique et qualité
Christian Therrien, Laboratoire national de santé publique du Québec