Conséquences chez les enfants victimes d’agression sexuelle

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  • Il ne semble pas exister un patron précis de conséquences de l’agression sexuelle vécue dans l’enfance. L’agression sexuelle semble plutôt entraîner chez les enfants des séquelles variées qui ne seraient pas homogènes d’un enfant à l’autre1,2
  • Les enfants victimes d’agression sexuelle peuvent faire face à des conséquences psychologiques immédiates, mais aussi à des conséquences chroniques qui peuvent interférer avec leur adaptation tout au cours de leur développement3,4,5.

Exemples de conséquences psychologiques immédiates chez les enfants agressés sexuellement

  • État de choc
  • Peur
  • Anxiété, nervosité
  • Sentiment de culpabilité
  • Symptômes de stress post-traumatique
  • Déni
  • Confusion
  • Retrait, isolement
  • Deuil

Survenant à une période où l’enfant est en développement, l’agression sexuelle d’un enfant peut avoir des impacts négatifs sur certains processus développementaux (ex.: régulation des émotions, style cognitif, stratégies d’adaptation, etc.), favorisant ainsi le maintien à long terme des conséquences6.

  • Il est reconnu que l’agression sexuelle vécue dans l’enfance est un facteur de risque important dans l’apparition de problèmes d’adaptation psychologique et sociale qui peuvent perdurer à long terme jusqu’à l’âge adulte et évoluer de manière à affecter la vie conjugale et parentale1,6.
  • Les symptômes de stress post-traumatique, la détresse psychologique et les comportements sexuels problématiques sont les conséquences de l’agression sexuelle qui sont le plus observées chez les enfants1,6.
  • Environ le tiers des enfants agressés sexuellement ne présenteraient pas de symptômes à un niveau jugé problématique (seuil clinique)1,3.Ce résultat peut s’expliquer par différentes situations, notamment1,2 :
    • Ces enfants auraient vécu une agression sexuelle moins sévère;
    • Ces enfants présenteraient des facteurs de protection les aidant à mieux composer avec le traumatisme subi;
    • L’absence de symptômes lors de l’évaluation pourrait cacher des séquelles en latence qui pourraient resurgir plus tard.
  • Les enfants victimes d’agression sexuelle sont aussi plus à risque de présenter les conséquences suivantes selon leur âge :
    • Conséquences de l’agression sexuelle manifestées dans l’enfance1,2,6
      • Manifestations neurobiologiques
      • Retards développementaux
      • Colère, agressivité
      • Comportements sexuels problématiques
      • Symptômes de stress post-traumatique
      • Problèmes de comportement
      • Faible estime de soi
      • Symptômes dépressifs
      • Anxiété, peur, méfiance
      • Problèmes d’adaptation en milieu scolaire
      • Comportements d’isolement social
      • Problèmes somatiques (ex.: énurésie)
      • Symptômes de dissociation
    • Conséquences de l’agression sexuelle manifestées à l’adolescence1,3,7
      • Manifestations neurobiologiques
      • Symptômes dépressifs
      • Anxiété, peur, méfiance
      • Symptômes de stress post-traumatique
      • Comportements autodestructeurs et automutilation
      • Faible estime de soi et mauvaise perception de l’image corporelle
      • Idéations suicidaires et tentatives de suicide
      • Troubles alimentaires (anorexie, boulimie)
      • Comportements d’isolement social
      • Problèmes relationnels avec la famille
      • Problèmes de comportement

Le stress post-traumatique

L’État de stress post-traumatique (ÉSPT) est un trouble réactionnel qui peut apparaître à la suite d’une situation traumatique et dont le diagnostic peut être posé par un médecin. L’événement traumatique réfère à une situation durant laquelle l’intégrité physique et/ou psychologique d’une personne a été menacée et/ou atteinte. La réaction immédiate à l'événement doit s'être traduite par une peur intense, par un sentiment d‘impuissance ou par un sentiment d'horreur.

Les symptômes incluent trois grandes catégories :

  1. Symptômes de reviviscence : la personne revit continuellement l’événement traumatique en pensées (flashbacks) ou en cauchemars.
  2. Évitement : En pensée ou de par ses comportements, la personne cherche à éviter, volontairement ou non, tout ce qui pourrait lui rappeler le trauma. Cela peut inclure la dissociation, l’amnésie ou l’engourdissement émotionnel.
  3. Hyperactivité neurovégétative : la personne est fréquemment aux aguets et en état d’hypervigilance, même en l’absence de danger. Ces symptômes peuvent inclure l’insomnie.

Chez les enfants, les symptômes peuvent se manifester de plusieurs façons :

  • Détresse face à des stimuli rappelant l’épisode d’agression
  • Reconstitution de l’événement dans des jeux
  • Impression que l’événement se produit de nouveau
  • Souvenirs répétitifs de l’événement
  • Cauchemars
  • Peurs spécifiques
  • Événement traumatique raconté de manière répétitive
  • Perte d’intérêt dans des activités
  • Évitement de stimuli qui rappellent l’événement
  • Difficultés de concentration

Pour plus d’informations sur l’état de stress post-traumatique, consultez le site Info-trauma

Berthiaume, C., Bériault, M. et Turgeon, L. (2006). L’état de stress post-traumatique chez les enfants : manifestations et traitement. Dans S. Guay et A. Marchand (Dir). Les troubles liés aux événements traumatiques : Dépistage, évaluation et traitements (pp. 139-150), Montréal: Presses de l’Université de Montréal.

Facteurs influençant le développement des conséquences chez les enfants

Plusieurs experts sont d’avis que le soutien positif offert par les parents à l’enfant victime d’agression sexuelle constituerait la condition la plus importante pour favoriser l’adaptation de l’enfant et réduire les risques de développer des symptômes, et ce, indépendamment des caractéristiques de l’agression vécue. Le soutien inclut notamment le fait de croire l’enfant et la réaction suite au dévoilement2.

Plusieurs facteurs ont été identifiés comme influençant le développement des conséquences des enfants victimes d’agression sexuelle et permettent de mieux comprendre la diversité des difficultés présentées par ces enfants. Ces facteurs peuvent être regroupés en quatre catégories1,2 :

  1. Caractéristiques de l’agression sexuelle : nature des gestes, fréquence, durée, âge au moment des agressions, lien avec l’agresseur.
  2. Caractéristiques individuelles des victimes : sexe de la victime, personnalité, compétences personnelles, stratégies pour composer avec le traumatisme.
  3. Caractéristiques de la famille : autres événements stressants vécus au sein de la famille, qualité de la relation parent-enfant, fonctionnement familial.
  4. Sources de soutien : soutien maternel et familial, réactions de l’entourage suite au dévoilement, ressources de soutien (pairs, adultes significatifs).

Conséquences à l’âge adulte de l’agression sexuelle vécue dans l’enfance

  • Certaines victimes d’agression sexuelle dans l’enfance présentent, une fois devenues adultes, peu de séquelles. Toutefois, un nombre important d’études a montré la grande diversité des conséquences que peuvent toujours présenter à l’âge adulte les personnes ayant été victimes d’agression sexuelle dans l’enfance, et ce, dans plusieurs sphères de fonctionnement8,9.
  • Les conséquences de l’agression sexuelle pendant l’enfance peuvent perdurer, mais aussi évoluer vers d’autres formes à l’âge adulte, pouvant aussi affecter les sphères conjugale et parentale.
Conséquences possibles à l’âge adulte de l’agression sexuelle vécue dans l’enfance4,9-15
Santé sexuelle et physique
  • Problèmes somatiques
  • Habitudes de vie à risque (ex. : tabagisme, usage d’alcool et de drogue)
  • Moins bonne santé physique
  • Moins bonne perception de la santé physique
  • Consultations médicales plus fréquentes
  • Invalidité professionnelle
  • Maladies chroniques
  • Douleurs chroniques
  • Comportements sexuels à risque (rapports sexuels non-protégés, partenaires sexuels multiples, etc.)
  • Complications gynécologiques et périnatales
  • Problèmes sexuels (ex.: dyspareunie, vaginisme chez la femme)
  • Plus grand risque de VIH et ITSS
Psychologique
  • Problèmes de santé mentale (dépression, troubles de personnalité, troubles psychotiques, trouble panique, etc.)
  • Détresse psychologique
  • Dissociation
  • Symptômes de stress post-traumatique
  • Anxiété
  • Automutilation
  • Idéations suicidaires, tentatives de suicide et suicide complété
  • Abus de drogue et d’alcool
Relationnel et conjugal
  • Moins de confiance envers les autres
  • Difficultés d’attachement
  • Plus de conflits familiaux et personnels
  • Isolement
  • Craintes de l’intimité
  • Insatisfaction conjugale
  • Stabilité plus faible auprès des partenaires
  • Conflits conjugaux
  • Violence conjugale
Parental*
  • Style parental permissif
  • Stress parental
  • Parentification de l’enfant
  • Difficultés relationnelles avec l’enfant
Période périnatale
  • Maternité précoce
  • Réactivation des symptômes de stress post-traumatique (grossesse, accouchement, allaitement)
  • Gestation plus courte
  • Dépression post-partum

*Les études ont surtout porté sur les mères victimes d’agression sexuelle dans l’enfance.

Agression sexuelle et santé mentale

Le fait d’avoir été victime d’agression sexuelle dans l’enfance a souvent été mis en lien avec un plus grand risque de développer des problèmes de santé mentale à l’âge adulte. Une étude ayant porté sur une cohorte de victimes d’agression sexuelle dans l’enfance et suivies sur une période de plus de 40 ans a montré que les femmes victimes d’agression sexuelle dans l’enfance avaient plus de sept fois plus de risque d’avoir eu un diagnostic d’état de stress post-traumatique, près de neuf fois plus de risque d’avoir eu un trouble d’abus de substances (alcool et drogues) et près de 8,5 fois plus de risque d’avoir reçu un diagnostic de trouble de personnalité limite que les femmes n’en ayant pas été victimes16.

Références

  1. Baril, K. et Tourigny, M. (2009). La violence sexuelle envers les enfants. Dans M.E. Clément et S. Dufour (dir.), La violence à l’égard des enfants en milieu familial (pp.145-160). Anjou: Éditions CEC.
  2. Hébert, M. (2011). Les profils et l’évaluation des enfants victimes d’agression sexuelle. Dans M. Hébert, M. Cyr, et M. Tourigny (dir.), L’agression sexuelle envers les enfants Tome 1 (pp.149-204). Québec: Presses de l’Université du Québec.
  3. Tiré de la section « Sexual violence : consequences » du site du Centers for Diseases Controls and Prevention – CDC : www.cdc.gov/ViolencePrevention/sexualviolence/.
  4. Polucci, E.O, Genuis, M.L. et Violato, C. (2001). A meta-analysis of the published research on the effects of child sexual abuse. Journal of Psychology, 135(1), 17-36.
  5. Putnam, F.W. (2003). Ten-year research update review : Child sexual abuse. Journal of the American Academy of Child Adolescent Psychiatry, 42(3), 269-278.
  6. Wolfe, V. V. (2007). Child sexual abuse.Dans E. J. Mash et R. A. Barkley (Dir.), Assessment of childhood disorders (4e éd.) (pp. 685-748), New York : Guilford Press.
  7. World Health Organization (WHO), London School of Hygiene and Tropical Medicine. (2010). Preventing intimate partner and sexual violence against women. Taking action and generating evidence. Genève: World Health Organization.
  8. Cyr, M. et Payer, M. (2011). Les interventions curatives auprès des adultes ayant été victimes d’agression sexuelle pendant leur enfance. Dans M. Hébert, M. Cyr, et M. Tourigny (dir.), L’agression sexuelle envers les enfants Tome 1 (pp. 303-332). Québec: Presses de l’Université du Québec.
  9. Thibodeau, C. et Lavoie, F. (2012). Influence d’une agression sexuelle vécue pendant l’enfance sur la santé physique à l’âge adulte. Dans M. Hébert, M. Cyr, et M. Tourigny (dir.), L’agression sexuelle envers les enfants Tome 2 (pp. 225-258). Québec: Presses de l’Université du Québec
  10. DiLillo, D. et Damashek, A. (2003). Parenting characteristics of women reporting a history of childhood sexual abuse, Child Maltreatment, 8(4), 319-333.
  11. Dube, S.R., Anda, R.F., Whitfield, C.L., Brown, D.W., Felitti, V.J., Dong, M. et Giles, W.H. (2005). Long-Term consequences of childhood sexual abuse by gender of victim. American Journal of Preventive Medicine, 28(5), 430-438.
  12. Fergusson, D.M, Boden, J.M. et Horwood, L.J. (2008). Exposure to childhood sexual and physical abuse and adjustment in early adulthood. Child Abuse & Neglect, 32, 607-619.
  13. Neumann, D., Houskamp, B., Pollock, V., Briere, J. (1996). The long-term sequelae of childhood sexual abuse in women: a meta-analytic review. Child Maltreatment, 1, 6–16.
  14. Jewkes, R., Sen, P. et Garcia-Moreno, C (2002). La violence sexuelle. Dans E.G. Krug, L.L. Dahlberg, J.A. Mercy, A. Zwi et R. Lozano-Ascencio (Dir.), Rapport mondial sur la violence et la santé (pp.163-201). Genève: Organisation mondiale de la Santé.
  15. Liang, B., Williams, L.M. et Siegel, J.A. (2006). Relational outcomes of childhood sexual trauma in female survivors : A longitudinal study, Journal of Interpersonal Violence, 21(1), 21-47.
  16. Cutajar, M.C., Mullen, P.E., Ogloff, J.P., Thomas, S., Wells, D., Spataro, J. (2010). Psychopathology in a large cohort of sexually abused children followed up to 43-years. Child Abuse & Neglect, 34(11), 813-822.