Prévenir la violence sexuelle : stratégies visant l’environnement politique

Les stratégies visant l’environnement politique consistent en la mise en œuvre et l’application de lois et de politiques dans plusieurs milieux de vie. Ces lois et politiques peuvent cibler plus spécifiquement la prévention de la violence sexuelle. D’autres peuvent agir sur des facteurs associés à cette violence, en réduisant les facteurs associés à un risque accru de violence sexuelle et en renforçant ceux qui protègent contre cette violence1

Environnement politique : facteurs et stratégies préventives

Exemples de facteurs liés à l’environnement politique

Facteurs qui favorisent la violence

  • Lacunes dans l’application des lois
  • Accessibilité à l’alcool, favorisant notamment la consommation excessive

Facteurs qui contribuent à réduire la violence

  • Relations égalitaires et respectueuses
  • Climat sain et sécuritaire dans les milieux de travail ou d’enseignement

Lois sur la criminalité

De manière générale, les lois relatives à la criminalité permettent d’établir des normes sur les comportements acceptables et inacceptables dans une société donnée. Elles peuvent cependant présenter certaines limites, notamment être insuffisantes dans certains pays ou régions ou ne pas toujours être adéquatement appliquées, en raison par exemple d’un manque de ressources ou d’imputabilité pour les personnes auteures. Cela peut donc permettre aux auteurs de violence d’agir sans craindre des sanctions2,3.

Au Canada et au Québec, plusieurs lois relatives au droit criminel et au droit civil peuvent s’appliquer en matière de violence sexuelle. Par exemple, le Code criminel définit et sanctionne les infractions d’agression sexuelle et les autres infractions d’ordre sexuel. Certaines lois contribuent aussi à protéger les enfants et les jeunes qui sont victimes de violence, dont la violence sexuelle, comme la Loi sur la protection de la jeunesse au Québec. D’autres lois visent plus largement à assurer un soutien et une sécurité à toutes les personnes victimes. Des procédures judiciaires sont aussi prévues pour les personnes ayant commis de la violence sexuelle, ce qui peut contribuer à prévenir une éventuelle récidive et à dissuader des auteurs potentiels.

Politiques publiques et lois sur l’alcool

Les politiques publiques et les lois qui visent à réduire la consommation excessive d’alcool sont un autre exemple de stratégie pour prévenir la violence sexuelle soutenue par plusieurs études et organisations internationales. La consommation d’alcool, comprenant celle qui est excessive, est un facteur associé au risque de commettre cette violence dans certains contextes et pour certaines personnes, mais aussi de la subir4–12. Il s’agit d’ailleurs de la substance psychoactive la plus souvent présente dans les cas de violence sexuelle. Bien qu’elle n’en soit pas la cause, elle peut exacerber d’autres facteurs qui augmentent les risques de violence sexuelle, comme l’hostilité envers les femmes et les croyances sexistes13,14.

Les lois qui visent à augmenter le prix et les taxes sur l’alcool ou à réduire les heures de vente ou la densité des points de vente d’alcool diminueraient d’ailleurs les risques de crimes violents dans la communauté dans laquelle elles sont appliquées. Ces crimes incluent la violence envers les enfants, la violence entre partenaires et les agressions sexuelles15–17.

Politiques et lois applicables aux établissements d’enseignement et au milieu de travail

Des politiques peuvent aussi être mises en œuvre dans les institutions d’enseignement pour prévenir la violence sexuelle et assurer un milieu de vie sain, sécuritaire et respectueux18,19. On peut penser par exemple aux règles pour encadrer les activités sociales ou les activités d’accueil, considérant qu’il s’agit de contextes plus à risque de violence sexuelle20. Ces règles doivent d’ailleurs être inscrites dans la politique pour prévenir et combattre les violences à caractère sexuel adoptée par les établissements d’enseignement supérieur au Québec, en vertu de la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur. Il est aussi obligatoire pour ces établissements d’offrir des activités de prévention, de sensibilisation et de formation pour la communauté étudiante, de rendre les établissements plus sécuritaires et d’offrir des services de soutien en matière de violence sexuelle21.

La prévention de la violence sexuelle peut aussi se faire dans les milieux de travail, par des politiques ou des lois sur la santé et la sécurité au travail ou par des formations destinées au personnel employé ou de gestion. Ces stratégies favorisent les relations et les climats de travail sains, égalitaires et sécuritaires. Elles peuvent également agir sur les facteurs associés à un risque accru de violence sexuelle, comme les inégalités de genre, les stéréotypes sexuels, sexistes et racistes, les autres discriminations et les normes et attitudes soutenant la violence sexuelle18,22.

Au Québec, les milieux de travail ont l’obligation de protéger la santé, d’assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychique des travailleuses et travailleurs. Des mesures sont prévues par plusieurs lois relatives aux normes du travail, de la santé et de la sécurité. Elles portent par exemple sur la prévention et la prise en charge du harcèlement psychologique et de la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Elles facilitent également l’accès et l’utilisation des recours disponibles pour les personnes victimes de violence sexuelle23.

Références

  1. DeGue, S., M. K. Holt, G. M. Massetti, J. L. Matjasko, A. T. Tharp et L. A. Valle (2012). « Looking ahead toward community-level strategies to prevent sexual violence », Journal of Women’s Health (2002), vol. 21, n° 1, p. 1‑3.
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Rédaction : Maude Lachapelle, conseillère scientifique, INSPQ
Collaboration : Anne-Sophie Ponsot, conseillère scientifique, INSPQ
Révision externe : Larissa Ouedraogo, M.Sc., agente de planification, de programmation et de recherche, direction régionale de santé publique, CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal
Geneviève Paquette, Ph. D., professeure titulaire, département de psychoéducation, Université de Sherbrooke
Jacinthe Dion, Ph. D., professeure, département de psychologie, Université du Québec à Trois-Rivières

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