Surveillance de deuxième génération du VIH auprès de populations ethnoculturelles

Nous avons rencontré Dr Alix Adrien, médecin-conseil à la Direction de santé publique - Centre universitaire intégré de santé et des services sociaux du Centre-Sud de l’Île-de-Montréal (CIUSSS), qui nous a parlé de l’enquête comportementale et biologique réalisée en collaboration avec l’Agence de santé publique du Canada auprès de deux communautés culturelles montréalaises.

Cette enquête de surveillance de 2 e génération du VIH auprès des communautés montréalaises originaires d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes anglophones (SSG-AFCAR) a été conduite entre le mois de juin 2013 et le mois de février 2014. Cette étude visait à décrire : les caractéristiques sociodémographiques de la population, la prévalence du VIH et d’autres ITSS, les comportements sexuels à risque liés au VIH, le recours aux services de santé, au dépistage, aux soins et traitements du VIH et les connaissances de base quant aux modes de transmission du VIH et d’autres ITSS.

La connaissance du statut sérologique

Au moins 80 % des participants originaires de l’Afrique subsaharienne et 60 % des participants originaires des Caraïbes anglophones au moment de cette étude avaient déjà passé un test de dépistage pour le VIH.  22 personnes ont eu un résultat positif au test de VIH de l’étude, 18 personnes originaires de l’Afrique subsaharienne et quatre personnes originaires des Caraïbes anglophones, principalement dans le groupe des 30-49 ans. Parmi ces personnes vivant avec le VIH, seulement sept personnes connaissaient déjà leur diagnostic.

Les données de cette étude montrent une prévalence du VIH plus élevée dans ces communautés que dans la population canadienne en général. Dans cette étude, la prévalence du VIH chez les montréalais d’origine d’Afrique subsaharienne est de 1,7 %, et  plus particulièrement de 2,4 % chez les femmes,  alors qu’elle est estimée à 0,21 % dans la population canadienne. La taille de l’échantillon de montréalais originaires des Caraïbes anglophones dans l’enquête n’a pas permis d’estimer la prévalence du VIH pour ce groupe.

Les comportements sexuels à risque

Au sein de ces deux communautés, l’étude rapporte une fréquence élevée des activités sexuelles à haut risque. Les participants rapportent fréquemment avoir plus d’un partenaire sexuel dans l’année et avoir des relations sexuelles sans condom. On rapporte également une fréquence plus élevée de femmes n’ayant pas utilisé de condom lors du dernier rapport sexuel avec un partenaire occasionnel.

Connaissance des modes de transmission du VIH

Parmi les énoncés mentionnés par les participants, on note qu’avoir l’air en santé indique qu’on ne peut pas être infecté par le VIH ou qu’une piqûre de moustique peut transmettre le VIH. Toutefois l’étude rapporte des différences entre les deux communautés ethnoculturelles et souligne que les participants originaires d’Afrique subsaharienne connaissaient mieux les modes de transmission du VIH que les participants originaires des Caraïbes anglophones. Au moins le tiers des montréalais originaires des Caraïbes anglophones croyaient que le virus peut se transmettre au cours d’un repas avec une personne infectée.

Accès aux soins de santé

Un élément important dans l’intervention de prévention est l’accès aux professionnels de la santé. Cette enquête rapporte qu’au moins 60 % des participants n’avaient pas de médecin de famille. Ce qui est bien supérieur au 35 % de la population générale montréalaise qui n’en avait pas.

Nous avons abordé avec Dr Alix Adrien les conclusions de cette enquête et l’importance d’obtenir des données de surveillance de 2e génération sur le VIH.

En quoi les études de surveillance de deuxième génération sur le VIH sont-elles importante ?

« Les systèmes de surveillance de deuxième génération ont pour but de suivre les tendances des comportements ainsi que de l’infection à VIH. Les enquêtes de surveillance de deuxième génération  visent à concentrer les ressources humaines et financières là où elles donneront les informations les plus utiles pour réduire la propagation du VIH et procurer des soins aux personnes touchées. C’est pour cela qu’elles portent essentiellement sur les populations risquant le plus d’être nouvellement infectées par le VIH. Elles permettent  d’analyser les tendances et améliorer les cibles des stratégies visant à renforcer le niveau de connaissance sur le VIH/sida, diminuer les comportements à risque et améliorer l’accès au dépistage. »

Quels sont les principales conclusions de cette étude sur les montréalais originaires de l’Afrique subsaharienne et des Caraïbes anglophones ?

« Les résultats de l’enquête SSG-AFCAR ont confirmé que la séroprévalence de l’infection par le VIH demeure élevée chez les personnes résidentes sur l’ile de Montréal originaires de pays où le VIH est endémique. Des pratiques sexuelles à haut risque ont été mises en évidence et le risque de transmission de l’infection par le VIH et d’autres ITSS persiste dans les sous-groupes les plus vulnérables, notamment les femmes. »

Quelles sont les prochaines étapes souhaitées concernant la surveillance de deuxième génération du VIH chez les populations ethnoculturelles ?

« Ces résultats devront très rapidement être pris en compte pour développer et améliorer les politiques, les programmes, les interventions et les services offerts au niveau communautaire, local, provincial et national en direction des populations africaines subsahariennes et caribéennes anglophones ou francophones vivant au Québec ou ailleurs au Canada. Il faudra répéter cette collecte de données à intervalle pour mesurer l’évolution des facteurs de risque et évaluer les programmes d’intervention offerts. »

Pour davantage d’information concernant cette enquête de deuxième génération sur le VIH, consulter le rapport de l’enquête.

Rédigé par
Geneviève Boily - Espace ITSS
Date de publication
27 novembre 2015