Avis sur la pertinence des services d'injection supervisée : analyse critique de la littérature

Lina Noël, François Gagnon, Amélie Bédard, Ève Dubé

Thème

Le service d’injection supervisée (SIS) est une mesure de santé publique visant à réduire les méfaits reliés à l’usage inapproprié de drogues par injection. Dans les pays où ils ont été implantés, ces services font partie d’une stratégie globale pour assurer la prise en charge des personnes aux prises avec un problème de dépendance ayant des répercussions sur l’individu et sur la collectivité.

Au Québec, depuis 2008, le service d’injection supervisée est une activité inscrite au Programme national de santé publique afin de lutter contre les épidémies de VIH et de VHC chez les personnes utilisatrices de drogues par injection (UDI).

Cet avis, réalisé par l’Institut national de santé publique du Québec et un groupe d’experts, porte sur les principaux aspects entourant la mise en œuvre des services d’injection supervisée à partir des expériences menées ailleurs dans le monde et sur les données issues de la littérature scientifique sur les effets de ces services.

L’avis devrait permettre de mieux comprendre la portée et les implications des SIS, une mesure de santé publique qui repose sur des valeurs éthiques de protection de la population et des individus contre les méfaits causés par l’usage inapproprié de drogues.

Public cible

Ce document a pour but de soutenir la prise de décision sur l’implantation de services d’injection supervisée. Son contenu s’adresse aux professionnels et aux intervenants concernés par cette question ainsi qu’à la population en général, incluant les personnes faisant usage de drogues par injection.

Faits saillants

Acceptabilité sociale et légale des SIS

Du point de vue de l’acceptabilité sociale des SIS, les expériences internationales montrent que les craintes face à ces services s’atténuent dans les mois qui suivent leur implantation.

Au Québec, des groupes de professionnels, dont des médecins, des infirmières, des intervenants en toxicomanie et en prévention du VIH et des hépatites ainsi que des corps policiers voient les SIS de moins en moins comme contradictoires à leurs mandats.

Sur le plan des enjeux légaux, les conventions internationales sur les drogues n’interdisent pas la mise en œuvre de SIS. Au Canada, certaines lois peuvent être invoquées pour limiter l’ouverture de tels services. Par contre, ces lois se heurtent à la Charte canadienne des droits et libertés puisqu’elles portent atteinte aux droits à la vie, à la sécurité et à la liberté de la personne, tous des droits protégés par la Charte.

Effets démontrés des SIS

Les évaluations sur les effets de ces services ont montré que les SIS permettent de :

  • rejoindre des populations à haut risque de morbidité et de mortalité;
  • de réduire la mortalité par surdoses ainsi que les risques de santé liés à l’utilisation de drogues par injection et les nuisances dans les lieux publics;
  • de stabiliser l’état de santé des personnes par une prise en charge des nombreux problèmes de santé.

Les observations tirées de la littérature montrent également que les SIS présentent plusieurs bénéfices pour la santé des personnes UDI. Ils constituent des réponses pragmatiques, humanistes et innovatrices face à certains problèmes auxquels les approches traditionnelles n’ont pas fourni de solutions. Aucun effet négatif sur la santé n’a été documenté dans les recherches scientifiques menées à ce jour.

Pour le Québec, les gains financiers associés à l’implantation de SIS se calculent notamment :

  • en réduction des consultations à l’urgence;
  • en diminution des coûts de traitement pour le VIH;
  • en baisse des interventions policières pour nuisance dans les lieux publics.
Date de publication
4 décembre 2009