L’appréciation des risques climatiques représente la pierre angulaire de l’adaptation aux changements climatiques. Elle permet de quantifier et de qualifier les risques projetés associés aux menaces (ou aléas) climatiques notamment sur la population et les infrastructures. L’appréciation dresse un portrait des éléments les plus à risque et les moins à risque sur un territoire. Dans un contexte de ressources limitées, elle aide les acteurs concernés à prioriser les mesures à mettre en place pour faire face aux risques prioritaires.
L’appréciation des risques s’insère dans le cycle de l’adaptation et le processus de gestion des risques. Il s’agit d’une étape préliminaire à la réalisation d’un plan d’adaptation et à l’implantation de mesures pour réduire les conséquences des changements climatiques. Celle-ci peut s’effectuer à plusieurs échelles géographiques (p. ex. régions sociosanitaires, MRC, municipalités, projets locaux) et temporelles par une diversité d’acteurs (p. ex. municipalités, autorités de santé publique, promoteurs), selon les besoins et le contexte.
Parlons terminologie
L’appréciation des risques peut aussi se nommer évaluation des risques ou de la vulnérabilité selon certains domaines. Dans certains cas, l’évaluation de la vulnérabilité peut se distinguer de l’appréciation des risques en n’évaluant seulement les caractéristiques qui fragilisent une population sans caractériser l’aléa (ou la menace) ou l’exposition. L’appréciation des risques se rapproche également de l’évaluation d’impacts sur la santé, mais elle se distingue sur les points suivants :
- Elle se concentre sur les conséquences négatives et omet généralement les opportunités;
- Elle se concentre sur des enjeux ou des menaces et non sur un projet ou une politique et ses effets;
- Elle ne recommande pas d’emblée des pistes d’actions, bien que le processus de gestion des risques dans lequel elle s’insère le prévoie;
- Elle ne traite pas systématiquement des effets sur la santé et de leurs déterminants.
Pourquoi la santé publique doit-elle participer à cette démarche?
Dans l’appréciation des risques climatiques, le rôle de la santé publique est de souligner les effets sur la santé ou le bien-être de la population ainsi que les inégalités en la matière. Les autres acteurs n’ont pas toujours l’expertise ou le réflexe d’en tenir compte. Les autorités de santé publique peuvent aussi compléter les résultats d’appréciation concernant les infrastructures ou les activités économiques, par exemple. Elles peuvent ainsi orienter les décideurs vers des mesures plus efficaces et équitables, c’est-à-dire qui profitent réellement aux personnes les plus à risque face aux menaces climatiques. C’est ce qu’elles font au sein du VRAC-PARC.
À quoi ça sert?
L’appréciation des risques climatiques amène une meilleure compréhension des effets potentiels des menaces climatiques selon le niveau de risque. Elle facilite ainsi le ciblage et la priorisation des actions pour réduire au maximum les conséquences des changements climatiques sur les éléments d’intérêt. L’appréciation peut aussi améliorer la transparence et la crédibilité des décisions de lutte contre les changements climatiques. Sans appréciation, les décideurs sont sujets à la maladaptation ou au gaspillage de ressources. Cette situation peut démobiliser la population et exacerber la méfiance envers les parties prenantes. Elle peut alors réduire l’acceptabilité sociale des actions climatiques et compliquer leur mise en œuvre. Il convient donc de réaliser l’appréciation selon les meilleures pratiques établies pour réduire ces risques (voir la sous-section sur les bonnes pratiques).
Étapes de réalisation
Une appréciation des risques climatiques comprend une série d’étapes généralement basée sur des normes ou des guides établis (p. ex. norme ISO 14091). Quoique les étapes de réalisation se ressemblent (voir tableau 1), elles peuvent varier selon la norme ou le guide choisi. La majorité requiert qu’une appréciation des risques soit réalisée préalablement au plan d’adaptation et à la mise en œuvre de mesures d’adaptation.
Des balises à suivre
Le ministère de l’Environnement de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) publie des lignes directrices pour les ministères et les organismes gouvernementaux avec des balises à suivre pour toute démarche d’appréciation ou de gestion des risques.
Étapes générales | Sous-étapes et Exemples de tâches |
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Cadrer la démarche | Planifier le projet d’appréciation
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Caractériser l’appréciation
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Identifier les risques | Collecter les données et les informations pertinentes
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Analyser les risques | Déterminer les probabilités d’occurrence et d’exposition
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Déterminer les conséquences potentielles
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Évaluer le risque | Compiler les résultats
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Examiner les résultats
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Diffuser et mettre à jour |
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Même si elles sont présentées en séquence, les étapes du tableau 1 peuvent se chevaucher, s’effectuer en parallèle et exiger plusieurs itérations. Certaines actions, comme la concertation avec les acteurs pertinents et la gestion des biais ou de l’incertitude, devraient s’intégrer dans tout le processus. Une méthode mixte (c.-à-d. données quantitatives et qualitatives), participative et interdisciplinaire mène généralement à de meilleurs résultats, en plus d’en faciliter l’acceptabilité.
Des mises à jour récurrentes sont également à planifier afin que les résultats de l’appréciation restent pertinents. Le plan d’adaptation et la mise en œuvre pourront nourrir ces mises à jour et inversement.
À la recherche d’inspirations
Pour des exemples d’appréciation des risques climatiques, consultez :
- Les présentations et les ateliers de la journée « En route vers l’adaptation : l’appréciation de la vulnérabilité au climat en santé publique » des Journées annuelles de santé publique de 2022.
- Les appréciations régionales réalisées dans le cadre du VRAC-PARC.
Bonnes pratiques
Le tableau 2 présente les qualités d’une appréciation des risques optimale. Néanmoins, cette dernière n’a pas à cultiver toutes ces qualités pour générer des résultats utiles. Certaines qualités pourraient se montrer défavorables dans certains cas ou entrer en compétition avec d’autres. Conséquemment, cette liste peut être adaptée selon les situations.
Qualité | Description |
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Adaptée | Elle comporte des objectifs, un processus, un contenu et une forme adaptés aux contextes politique, organisationnel et géographique, aux publics cibles ainsi qu’aux informations et aux ressources disponibles. |
Complémentaire | Elle ajoute de l’information à celle existante ou en développement et ne dédouble pas le travail déjà effectué ou à venir. |
Équilibrée et réaliste | Elle trouve le bon compromis entre les ressources disponibles, l’échéancier, la complexité du problème, la représentativité des résultats et l’adéquation au contexte. |
Itérative | Elle intègre des boucles de rétroaction entre les étapes et une mise à jour périodique de ses composantes en fonction des leçons apprises, dans une logique d’amélioration continue. |
Multipartite et interdisciplinaire | Elle intègre des acteurs pertinents de diverses organisations avec différents intérêts, capacités et expertises. Elle réunit également les savoirs local, autochtone et scientifique |
Multidimensionnelle | Multidimensionnelle Elle inclut une diversité de composantes (p. ex. aléas, populations, mesures d’adaptation), en tâchant de faire les liens entre elles. |
Pertinente et opportune | Elle comporte des objectifs répondant aux besoins et prévoit les moyens pour les satisfaire à un moment ou d’une façon où les résultats serviront au maximum. |
Prospective | Elle inclut des projections du climat et de la vulnérabilité et comporte plusieurs scénarios pour montrer l’étendue des possibilités. |
Rigoureuse et transparente | Elle emploie des informations et des méthodes de qualité minimisant les biais et explique sa méthodologie, ses sources de données et ses limites tout en exposant fidèlement les résultats et leurs nuances. |
Pour en savoir plus
En français
- ADEME – Diagnostiquer l'impact du changement climatique sur un territoire (2018)
- Institut national de santé publique du Québec – La gestion des risques en santé publique au Québec (2016)
- Ministère de la Santé de l’Ontario – Trousse de l’Ontario sur le changement climatique et la santé (2016)
- Ministère de la Sécurité publique – Outils pour aider les organismes municipaux à réaliser une démarche de gestion des risques en sécurité civile
- Organisation mondiale de la Santé – Cadre opérationnel pour renforcer la résilience des systèmes de santé face au changement climatique (2015)
- Santé Canada – Appréciation de la vulnérabilité en matière de santé et de l’adaptation aux changements climatiques : guide de ressources pour passer du savoir à l’action (2021) et Guide de travail pour le secteur canadien de la santé (2021)
En anglais
- Centers for Disease Control and Prevention – Assessing Health Vulnerability to Climate Change – A Guide for Health Department (2014)
- Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit – The Vulnerability Sourcebook – Concept and guidelines for standardised (2014)
- United Nations Office for Disaster Risk Reduction – Technical Guidance on Comprehensive Assessment and Planning in the Context of Climate Change (2022)