Coup d’œil sur les JHA

Les jeux de hasard et d’argent (JHA) peuvent causer des préjudices dans la vie d’une personne de ses proches ou de sa communauté.

Les jeux de hasard et d’argent sont des « jeux où de l’argent, et tout autre objet ou action de valeur, sont misés sur le résultat et où, selon le point de vue d’au moins un des participants, ce résultat est basé en totalité ou en partie sur le hasard »(1).

Qu’est-ce que le jeu préjudiciable?

« Les pratiques de jeux de hasard et d’argent sont considérées comme préjudiciables lorsqu’elles entraînent des conséquences négatives dans la vie de l’individu, de ses proches ou de sa communauté. Ces conséquences négatives sont le résultat direct ou indirect des pertes en ressources essentielles au bien-être, à la qualité de vie, à la santé et au fonctionnement social des individus. Elles peuvent par exemple se traduire par de la négligence familiale, professionnelle ou scolaire, de la détresse psychologique, des conflits, des difficultés financières et, plus largement, en appauvrissement et en problèmes sociaux pour les communautés »(2).

Participation au jeu et prévalence des problèmes associés

  • Les données les plus récentes montrent que 69 % de la population québécoise mentionnait avoir joué à un JHA au moins une fois dans la dernière année(3).
  • La prévalence de personnes qui s’adonnent au jeu de façon problématique(4) dans la population québécoise était estimée à environ 2 %(5), ce qui se situe dans la moyenne mondiale(6).
  • La proportion de personnes qui s’adonnent au jeu de façon problématique était particulièrement plus élevée chez les adeptes d’appareils de loterie vidéo, dont un peu plus de 16 % présentent un profil de risque modéré ou de jeu pathologique probable(7).
  • Les formes de JHA les plus populaires en 2012 étaient la loterie (environ 61 %), les machines à sous (10 %), le poker (5 %), le bingo (4 %) et les appareils de loterie vidéo (4 %)(7)
  • Dans une enquête similaire en 2018, les données de participation globales et par type de jeu sont similaires, sauf en ce qui concerne la pratique du jeu en ligne : elle est évaluée à 1,5 % en 2012(7) et à 5 % en 2018(8). En 2022, cette proportion a encore augmenté pour s’élever à 20 %(9). L’effet de l’adoption du jeu en ligne sur les habitudes de jeu « terrestres » n’est pas encore connu.

On retrouve proportionnellement plus de personnes sans emploi, avec un faible niveau de scolarité ou issues d’un ménage à faible revenu parmi les joueurs et joueuses ayant rapporté un problème(7). Une personne au jeu problématique typique causerait des préjudices à au moins six autres personnes de son entourage(10).

Au Québec, cela représente environ 840 000 personnes. Il est aussi reconnu que la plus grande partie du fardeau socio sanitaire lié au jeu dans la communauté peut provenir, non pas des personnes déclarées « dépendantes au jeu », mais plutôt du groupe beaucoup plus large qui vit des préjudices liés aux habitudes de jeu de cette personne(11).

Comment le jeu peut-il devenir préjudiciable?

Les caractéristiques individuelles de la personne qui s’adonne au jeu, le type et le nombre de jeux pratiqués ainsi que l’environnement sont autant d’éléments qui peuvent contribuer au jeu préjudiciable(12). Les préjudices sont plus fortement associés aux appareils électroniques de jeu ou au jeu sur Internet(13), des formats de jeu continu qui favorisent la dépense et l’immersion.

Le fait d’accorder trop de temps, trop d’argent ou trop d’attention aux jeux de hasard et d’argent peut alors se faire au détriment du bien-être et de la santé(14). Ce déséquilibre compromettra de façon significative la qualité de vie des personnes et de leur entourage. Il peut en résulter pour les individus, par exemple, des difficultés financières, de la négligence familiale, professionnelle ou scolaire, de la détresse psychologique, des conflits et, plus largement, un appauvrissement et des problèmes sociaux pour les communautés. Ces impacts peuvent être transitoires ou de longue durée, ou encore se répercuter de façon intergénérationnelle(15).

La pratique des jeux de hasard et d’argent ne relève pas que de la responsabilité individuelle. Les environnements peuvent également avoir un effet sur les habitudes de jeu, la santé et les inégalités sociales de santé.

La présence d’établissements de jeu dans l’environnement peut influencer les habitudes de jeu

Des recherches récentes démontrent notamment que la nature de l’environnement bâti et la configuration des quartiers peuvent être propices ou nuisibles à la santé, au développement de la communauté et à l’épanouissement des individus(16) . Dans les environnements, certains éléments influenceront positivement la santé de la population comme les parcs, les magasins d’aliments santé, les écoles de qualité ou les organisations de quartier actives(17,18). D’autres auront une valeur négative comme la pollution, la présence de commerces d’alcool, la violence ou une moindre application des lois. La présence des établissements de jeu dans les quartiers, renforcée par leur promotion, fait partie de ces éléments qui influencent les habitudes de vie et la santé. Par exemple, le nombre de sites de jeu, leur proximité et la nature plus ou moins risquée des jeux offerts contribuent à une exposition au jeu potentiellement préjudiciable.

Les inégalités sociales de santé sont influencées par les environnements

Qu’est-ce que les inégalités sociales de santé (ISS) ? « Les ISS se définissent comme des écarts entre les hommes et les femmes, des groupes socioéconomiques ou des territoires, en regard de nombreux aspects de la santé des populations. Elles sont pour la plupart évitables et injustes. Elles concernent entre autres les conditions de vie des personnes, leur revenu, leur travail, leur scolarité, leur alimentation ou leur logement(19)».

Les inégalités sociales en matière de santé sont largement déterminées par les ressources auxquelles les individus ont accès. Par exemple, il a été démontré qu’en milieu urbain, l’accessibilité géographique aux dépanneurs — qui offrent au Québec tabac, alcool, loteries et malbouffe — et aux restaurants-minute suit un gradient socio-économique(20). Cette accessibilité est plus faible dans les secteurs plus favorisés et augmente graduellement selon la défavorisation. C’est pourquoi les orientations gouvernementales en santé publique préconisent des actions visant la création d’environnements favorables à la santé, en portant une attention particulière aux groupes plus vulnérables afin de réduire les inégalités sociales de santé.

L’examen des données rendues disponibles dans la cartographie du jeu indique que la répartition des jeux est inégalitaire ; c’est-à-dire qu’une grande partie des personnes vulnérables aux problèmes de jeu habitent dans des environnements défavorables.

Quels jeux trouve-t-on au Québec?

Ce tableau présente différents types de jeux de hasard et d’argent (hyperlien) que l’on retrouve au Québec, leur nombre de sites ainsi que leur nombre de places quand les données sont disponibles. Le jeu en ligne n’est pas répertorié, ni les tournois de poker privés dans les bars ou le jeu dans les communautés autochtones.

Les jeux de hasard et d’argent au Québec en 2018

Les différents types de jeux Où les trouve-t-on? Nombre de sites Nombre de places de jeu

Loterie

Casinos, salons de jeu, salles de bingo, dépanneurs, kiosques, etc.

8 575

n. d.

Keno

Casinos

3

n. d.

Bingo

Salles de bingo

43

16 845

Kinzo

Salles de Kinzo

17

1 118

Jeux de table

Casinos

4

1 088

Poker (casino)

Casinos

4

627

Roulette et Blackjack électroniques

Casinos, salons de jeu

6

201

Machines à sous

Casinos, salons de jeu

6

6 206

Bornes interactives

Casinos

4

217

Paris sur courses de chevaux

Salons de pari, pistes de course

10

n. d.

Appareils de loterie vidéo (ALV)

Salons de jeu, Bingos, Kinzos, bars, brasseries, tavernes et restaurants etc.

1 641

10 534

Total (mars 2018)

 

10 292

 

n. d. : non disponible.
Source : Papineau, E., Robitaille, É., Samba, C. P., Lemétayer, F., Kestens, Y., & Raynault, M. F. (2020). Spatial distribution of gambling exposure and vulnerability: An ecological tool to support health inequality reduction. Public Health, 184, 46-55

Mode de gestion

Société d’État créée en 1969, Loto-Québec administre et exploite plusieurs types de jeux de hasard et d’argent dans la province. Par contre, les établissements qui les hébergent sont variés. Diverses modalités de gouvernance coexistent :

  • la gestion complète des jeux par la société d’État, comme dans le cas des casinos;
  • la distribution de licences d’exploitation de loteries et d’appareils de loterie vidéo;
  • l’octroi de franchises, comme dans le cas des salles de Kinzo.

Certains lieux ont pour vocation première la commercialisation des jeux (ex. casinos, salons de jeux, salles de bingo et de Kinzo), tandis que d’autres ont pour vocation première la restauration ou le débit de boissons, comme les bars et restaurants qui hébergent les appareils de loterie vidéo.

Le jeu en ligne légal est géré par Loto-Québec sur le site Espace Jeux, alors que certaines communautés autochtones exploitent des établissements et des sites de jeu en ligne de façon indépendante.

 

Casino

Bingo

Kinzo

Détaillants de loterie

Kiosques de loteries

Appareils de loterie vidéo

Mode de gestion :

Gestion Loto-Québec

Licence octroyée par la RACJ

Franchise d’établissement octroyée par LQ

Numéro de détaillant octroyé par LQ

Numéro de détaillant octroyé par LQ

Licence octroyée par RACJ

ALV octroyé par LQ (approbation et nombre)

Détenteurs :

NA

OBNL

OBNL et entreprises privées

Commerces

OBNL

Détenteurs de permis de vente d’alcool

RACJ : Régie des alcools des courses et des jeux
LQ : Loto-Québec
OBNL : Organismes à but non lucratif

  1. Chevalier, S., Allard, D. (2001). Pour une perspective de santé publique des jeux de hasard et d’argent, Montréal : Institut national de santé publique du Québec, http://www.santecom.qc.ca/Bibliothequevirtuelle/INSPQ/2550382854.pdf.
  2. Collectif sur le jeu et ses impacts, Charte du Collectif sur le jeu et ses impacts, (INSPQ_Document interne, novembre 2013).
  3. Rotermann, M., Gilmour, H. (2022). Qui joue à des jeux de hasard et qui éprouve des problèmes de jeu au Canada ?, Statistique Canada, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/75-006-x/2022001/article/00006-fra….
  4. Joueurs et joueuses présentant un risque modéré et joueurs et joueuses pathologiques probables
  5. Rotermann, M., Gilmour, H. (2022). « Qui joue à des jeux de hasard et qui éprouve des problèmes de jeu au Canada », Statistique Canada, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/75-006-x/2022001/article/00006-fra….
  6. Calado, F., Griffiths, M. D., (2016). Problem gambling worldwide: An update and systematic review of empirical research (2000–2015), Journal of behavioral addictions 5, no 4..
  7. Kairouz, S., Nadeau, L., et C. Robillard, (2014). « Enquête ENHJEU Québec : portrait du jeu au Québec : prévalence, incidence et trajectoires sur quatre ans » (Soumis au Fonds de recherche du Québec : Société et culture. Université Concordia, http://www.concordia.ca/fr/recherche/chairejeu/recherche/projets/enhjeu….
  8. Biron, J. — F., et coll. (2018). Les jeux de hasard et d’argent au Québec et en régions - Statistiques de participation en 2018, CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3551525?docpos=8.
  9. Institut national de santé publique (2022). COVID-19 — Sondages sur les attitudes et comportements des adultes québécois — Les jeux de hasard et d’argent en ligne, consulté à https://www.inspq.qc.ca/covid-19/sondages-attitudes-comportements-quebe….
  10. Goodwin, B. C., Browne, M., Rockloff, M., et Rose, J. (2017). A typical problem gambler affects six others. International Gambling Studies, 17(2), 276-289
  11. Browne, M., Goodwin, B. C., et Rockloff, M. J. (2018). Validation of the Short Gambling Harm Screen (SGHS): A tool for assessment of harms from gambling. Journal of Gambling Studies, 34(2), 499-512.
  12. Korn D. A., Shaffer H. J. (1999). Gambling and the Health of Public: Adopting a Public Health Perspective. Journal of Gambling Studies ;15(4):289–365.
  13. Allami, Y., Hodgins, D. C., Young, M., Brunelle, N., Currie, S., Dufour, M.,… et Nadeau, L. (2021). A meta‐analysis of problem gambling risk factors in the general adult population. Addiction, 116 (11), 2968-2977.
  14. Collectif sur le jeu et ses impacts, Charte du Collectif sur le jeu et ses impacts, (INSPQ-Document interne, novembre 2013)
  15. Langham, E., Thorne, H., Browne, M., Donaldson, P., Rose, J., et Rockloff, M. (2016). Understanding gambling related harm médecine: A proposed definition, conceptual framework, and taxonomy of harms. BMC public health, 16(1), 1.
  16. Centre de référence sur l’environnement bâti, « Centre de référence sur l’environnement bâti et la santé (CREBS) », INSPQ, 2019, https://www.inspq.qc.ca/crebs.
  17. Bernard, P., Charafeddine, R., Frohlich, K. L., Daniel, M., Kestens, Y., et Potvin, L. (2007). Health inequalities and place: a theoretical conception of neighbourhood. Social science & medicine, 65 (9), 1839-1852.
  18. Robitaille, E., Bergeron, P., et Philibert, M. (2014) Accessibilité géographique aux commerces alimentaires au Québec : analyse de situation et perspectives d’interventions, 2014, http://site.ebrary.com/lib/abhealth/Doc?id=10813118
  19. Pampalon, R., Hamel, D., Alix, C., Landry, M. (2013), Une stratégie et des indicateurs pour la surveillance des inégalités sociales de santé au Québec, https://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/1698_StratIndicSurvISSQc.pdf
  20. Robitaille, E., Bergeron, P., et Lasnier, B. (2009). Analyse géographique de l’accessibilité des restaurants-minute et des dépanneurs autour des écoles publiques québécoises, Institut national de santé publique du Québec, https://www.inspq.qc.ca/en/node/3018.
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