Cartographie du jeu au Québec

La cartographie du jeu au Québec est le fruit d’une recherche financée par les Instituts de recherche en santé du Canada. Basé sur deux indices, cet outil cartographique permet de quantifier et de visualiser l’exposition et la vulnérabilité aux risques des jeux de hasard et d’argent sur l’ensemble du territoire québécois et les zones d’intervention prioritaires.

Il est destiné aux gestionnaires municipaux, régionaux et gouvernementaux, aux personnes qui collaborent à l’aménagement du territoire dans les milieux municipaux ou communautaires et aux professionnels ou professionnelles de la santé publique en promotion/prévention et en surveillance ainsi qu’aux intervenants ou intervenantes en dépendance.

À quoi sert la cartographie du jeu au Québec?

La cartographie permet de soutenir la prise de décision sur le déploiement des jeux de hasard et d’argent sur le territoire, la réduction des inégalités sociales de santé et la création d’environnements plus favorables à la santé. En matière de prévention, les résultats permettront d’identifier des zones géographiques sensibles au Québec et d’y développer des initiatives préventives mieux adaptées. L’examen des déterminants et déclencheurs environnementaux du jeu est également susceptible d’orienter les interventions dans les services de traitement du jeu problématique.

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En somme, l’outil cartographique permet d’appuyer sur des données probantes, les décisions qui touchent la population en matière de santé et d’équité, d’aménagement du territoire et de commercialisation des jeux. Par exemple, il peut éclairer les processus décisionnels liés à :

  • un projet d’aménagement urbain;
  • un changement de zonage;
  • l’ajout ou le retrait d’appareils de loterie vidéo ou de salon de jeu dans un secteur;
  • l’approbation d’une demande de licence d’appareils de loteries vidéo;
  • la localisation d’un établissement de jeu;
  • le déploiement d’initiatives de prévention, de traitement ou communautaires

Pour mieux comprendre les possibilités de ce nouvel outil, visionnez la capsule «  Cartographie du jeu au Québec  » d’une durée de 6 minutes.

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Plusieurs travaux(1,2,3,4,5) ont démontré que certains jeux de hasard et d’argent sont plus présents dans des quartiers défavorisés. Pour raffiner ces connaissances, un portrait à jour de l’exposition et de la vulnérabilité au jeu au Québec est apparu nécessaire. Un outil cartographique d’analyse et d’aide à la prise de décision a été élaboré.

Démarche de recherche

La cartographie du jeu au Québec est le résultat d’une recherche financée par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Les IRSC ne sont pas impliqués dans aucun aspect de la méthode et des résultats de la recherche.

Comprendre la vulnérabilité et l’exposition au jeu
Les mécanismes menant au jeu préjudiciable relèvent de l’interaction complexe entre plusieurs facteurs(6):

  • les caractéristiques individuelles de la personne qui joue  ;
  • la structure des types de jeu  ;
  • et l’environnement.

Cette dernière dimension — l’influence des milieux de vie et des environnements sur l’état de santé — est l’un des fondements du cadre conceptuel de la santé publique(7).

Des recherches québécoises ont démontré qu’à Montréal, Laval, Québec, en Outaouais et dans la région des Laurentides, les jeux sont répartis de façon inégalitaire. Les populations défavorisées ou plus vulnérables y ont un accès plus élevé(8,9,10,11) La localisation des jeux est du ressort de la société d’État Loto-Québec. Depuis 2011, à la demande du gouvernement québécois, Loto-Québec a mis en place des critères guidant la répartition des appareils de loterie vidéo sur le territoire québécois (révisés en 2019)(12). Toutefois, les dimensions de défavorisation sociale et de vulnérabilité au jeu dans les milieux où sont déployés les jeux ne sont pas incluses dans ces critères.

Deux nouveaux indices

Dans le but d’améliorer la caractérisation des environnements de jeu au Québec, deux nouveaux indices ont été créés. Ils intègrent à la fois les aspects d’exposition et de vulnérabilité au jeu. Lorsque ces deux indices sont rapportés sur une carte interactive et convergent de façon significative, ils permettent de confirmer l’existence d’inégalités sociales en matière d’exposition au jeu.

  1. L’indice d’exposition au jeu
    Il quantifie le niveau d’exposition au jeu à l’échelle des aires de diffusion(13) pour toute la province du Québec. Il combine trois dimensions : l’accessibilité spatiale aux sites de jeu, la densité des lieux de jeu et le risque relatif associé à chaque type de jeu. Ces derniers sont les appareils de loterie vidéo, les jeux de casinos, le bingo, le Kinzo, les loteries, les paris hippiques et le poker.
  2. L’indice de vulnérabilité au jeu
    Il mesure le niveau de risque de la population face au développement de problèmes de jeu sur l’ensemble du territoire québécois. Il est construit à l’échelle des aires de diffusion sur la base de 6 variables socio-économiques largement documentées dans la littérature comme étant associées aux problèmes de jeu :
    • Concentration d’hommes  ;
    • Concentration de personnes âgées de 20 à 44 ans  ;
    • Concentration de personnes vivant seules  ;
    • Concentration de personnes sans emploi  ;
    • Concentration de personnes avec un diplôme d’études secondaire ou moins  ;
    • Concentration des ménages avec un revenu de moins de 60  000 $ par année.

 

Repérage des zones prioritaires et exemples d’interventions sur les inégalités face au jeu

Des analyses statistiques spatiales et descriptives ont été menées pour quantifier la relation entre l’exposition et la vulnérabilité au jeu afin d’identifier les zones très vulnérables et fortement exposées au jeu(14). Les aires de diffusion où la convergence entre l’exposition au jeu et la vulnérabilité sont les plus accentuées sont désignées «  zones prioritaires  » d’intervention. Ce sont des zones où des inégalités plus grandes face au jeu sont constatées.


Pour les zones prioritaires, la recherche a permis d’identifier différents types d’interventions auxquelles la cartographie peut contribuer

Exemples d’interventions sur les inégalités face au jeu

Réseau de la santé et des services sociaux, MSSS (services en dépendances) et organismes communautaires

  • Localisation stratégique des ressources/services et leur promotion
  • Amélioration des connaissances pour l’optimisation de la prévention et de la prise en charge communautaire

MSSS – Surveillance de l’état de santé

  • Surveillance de l’offre de jeu et de la vulnérabilité

Directions régionales de santé publique des CISSS et CIUSSS

  • Émission d’avis de santé publique adaptés aux contextes régionaux
  • Identification de zones prioritaires près des établissements scolaires pour le déploiement d’actions de promotion et prévention auprès des jeunes
  • Planification d’interventions ciblées auprès des populations vulnérables plus exposées en vue de développer une compréhension du cumul des vulnérabilités et une approche globale de santé
  • Sensibilisation des milieux municipaux à un aménagement du territoire qui minimise les risques pour la santé; proposition d'outil pour la prise de décision en matière de changements de zonage d’implantation des établissements de jeux

Milieu municipal : membres d’un conseil municipal, urbanistes, aménagistes

  • Planification et décision au sujet du zonage, de l’aménagement du territoire et de l’implantation des établissements de jeu

Loto-Québec

  • Redéfinition des critères d’attribution des licences d’ALV
  • Intégration de la notion de vulnérabilité sociale dans la répartition géographique des jeux
  • Suivi de l’évolution de progrès vers des objectifs donnés

Régie d’alcool, des courses et des jeux (RACJ)

  • Décision d’octroi ou non de licence d’ALV dans un quartier prioritaire

Tout citoyen, société ou association

  • Positionnement sur la délivrance d’une licence d’ALV par la RACJ considérée contraire à l’intérêt, la sécurité ou la tranquillité publiques (Affichage média local obligatoire par la RACJ)

L’INSPQ a répertorié au Québec 2  600 secteurs sur 13  420 qui affichent des valeurs élevées de vulnérabilité et d’exposition au jeu. Selon les données du recensement canadien de 2016, 1  394  042 personnes habitent ces secteurs, ce qui représente 17 % de la population québécoise.

Selon les données de 2018, la Mauricie–Centre-du-Québec, l’Abitibi-Témiscamingue, l’Outaouais, la Côte-Nord et Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine se distinguent par leur plus grand nombre d’aires de diffusion où la vulnérabilité et l’exposition au jeu sont élevées par plus de 5 points de pourcentage par rapport à la moyenne du Québec.

Consulter aussi l’affiche scientifique présentée aux Journées annuelles de santé publique 2021 (le lien est externe) et la capsule vidéo

Accès au Géoportail

Pour accéder au Géoportail de santé publique : https://www.inspq.qc.ca/geomatique/geoportail ou faire une recherche dans votre navigateur

Comment accéder aux indices de la cartographie  ?

Sur la page d’accueil, on doit accéder à la thématique Environnements - produits à risque. Pour cela, cliquer sur le menu en haut à gauche de l’écran du Géoportail, puis sur l’étoile pour accéder aux thématiques et, enfin, choisir Environnements — produits à risque

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On peut alors visualiser le territoire selon les trois indices suivants :

  1. Zones d’intervention sur les inégalités face au jeu  ;
  2. Indice d’exposition aux jeux de hasard et d’argent  ;
  3. Indice de vulnérabilité aux jeux de hasard et d’argent.

Lorsque l’on clique sur l’icône de l’œil barré, la carte et la légende apparaissent. Il est possible de zoomer sur un secteur ou d’utiliser la fonction «  recherche  » par nom de ville/région/code postal

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Dans l’onglet des zones d’intervention sur les inégalités face au jeu :

  • Les zones jaunes correspondent aux secteurs où l’exposition au jeu est élevée.
  • Les zones orange correspondent aux secteurs où la vulnérabilité au jeu est élevée.
  • Les zones rouges de la carte sont les secteurs caractérisés à la fois par une forte exposition et par une forte vulnérabilité au jeu.
  • Les zones blanches sont caractérisées à la fois par une faible exposition et une faible vulnérabilité au jeu.

Peut-on considérer d’autres indicateurs  ?

Les données liées aux points de vente de Loto-Québec ayant été agrégées, la cartographie ne permet pas de localiser individuellement les points de vente et les établissements de jeu.

Toutefois, il est possible d’ajouter d’autres indicateurs comme les Centres de réadaptation en dépendances, les écoles, les limites des régions sociosanitaires ou des municipalités, etc. Le procédurier vous explique la façon de procéder.

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  1. Biron, J.-F., Bazargani, M., et Robitaille, É. (2016). La distribution spatiale du risque associé aux jeux de hasard et d’argent à Montréal. Centre intégré de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.
  2. Biron, J.-F., Bazargani, M., et Robitaille, É. (2017). La distribution spatiale du risque et de l’accessibilité aux appareils de loterie vidéo à Montréal. Centre intégré de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal — Direction de santé publique.
  3. Robitaille, É., et Herjean, P. (2008). An analysis of the accessibility of video lottery terminals : The case of Montréal. International Journal of Health Geographics, 7, 1‑15.
  4. Gilliland, J. A., et Ross, N. A. (2005). Opportunities for video lottery terminal gambling in Montréal : An environmental analysis. Canadian Journal of Public Health/Revue Canadienne de Santé Publique, 55‑59.
  5. Wilson, D. H., Derevensky, J., Gilliland, J., Gupta, R., et Ross, N. A. (2006). Video Lottery Terminal Access and Gambling Among High School Students in Montréal. Canadian Journal of Public Health, 97(3), 202‑206. p4h.
  6. Korn DA, Shaffer HJ. Gambling and the Health of Public: Adopting a Public Health Perspective. J Gambl Stud. 1999  ; 15 (4) : 289–365.
  7. Émond A. Cadre conceptuel de la santé et de ses déterminants : résultat d’une réflexion commune. [Québec] : ministère de la Santé et des Services sociaux, Direction des communications  ; 2010.
  8. Biron J-F, Bazargani M, Robitaille É. (2017). La distribution spatiale du risque et de l’accessibilité aux appareils de loterie vidéo à Montréal. Centre intégré de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal — Direction de santé publique. https://santemontreal.qc.ca/population/actualites/nouvelle/la-distribut…
  9. Houle, V., (2014). Revoir l’offre de loterie vidéo pour prévenir les impacts dans les milieux défavorisés — Rapport du directeur régional de santé publique de la Capitale-Nationale et recommandations, Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, Direction régionale de santé publique, 44 p. http://www.santecom.qc.ca/bibliothequevirtuelle/Quebec/9782896162192.pdf
  10. Paradis, I., (2006) Recherche sur l’emplacement des appareils de loterie vidéo dans certains secteurs de la ville de Gatineau/rédaction et coordination de la recherche […], Gatineau, Agence de la santé et des services sociaux de l’Outaouais, Direction de santé publique. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2099722
  11. Thériault, A., Nadon, S., et Fafard, A.-C. (2015). Portrait de l’offre d’appareils de loterie vidéo dans la région des Laurentides. Québec : DSP-Laurentides https://collectif-jeu.ca/sites/default/files/media/351/Portrait%20ALV%2…
  12. En 2019, ces critères établissent un nombre maximum de 2 établissements munis d’ALV par 5000 habitants et de 2 ALV par 1000 habitants. Le dernier critère stipule que «  l’indice de défavorisation matérielle de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) du secteur doit être égal ou inférieur à celui de la moyenne régionale du secteur.  » Décret 14-2019, 16 janvier 2019 Source : http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.ph…
  13. Statistique Canada, 2022 https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/92-195-x/2021001/geo/da-ad/da-ad-fr…
  14. Pour des informations plus détaillées sur les aspects méthodologiques de la recherche, voir Luo W., Whippo. T. (2012). Variable catchment sizes for the two-step floating catchment area (2SFCA) method. Health & Place, 18, 789–795; Papineau, E., Robitaille, É., Samba, C. P., Lemétayer, F., Kestens, Y., et Raynault, M. F. (2020). Spatial distribution of gambling exposure and vulnerability: An ecological tool to support health inequality reduction. Public Health, 184, 46-55

Chercheure principale

Élisabeth Papineau, Ph. D.
Conseillère scientifique spécialisée, Institut national de santé publique du Québec  ; Professeure associée, Département de médecine sociale et préventive, École de Santé publique de l’Université de Montréal

Co-chercheurs

Éric Robitaille, Ph. D.
Conseiller scientifique spécialisé et chercheur d’établissement, Institut national de santé publique du Québec  ; Chargé d’enseignement pratique, Département de médecine sociale et préventive, École de Santé publique de l’Université de Montréal

Yan Kestens, Ph. D.
Titulaire, Chaire Interventions Urbaines et Santé des Populations  ; Professeur sous octroi agrégé, Département de médecine sociale et préventive, École de Santé publique de l’Université de Montréal

Marie-France Raynault, M.D., M. Sc.
Professeure émérite, Département de médecine sociale et préventive, École de Santé publique de l’Université de Montréal  ; Directrice générale, Centre de recherche Léa-Roback sur les inégalités sociales de santé de Montréal

Coordonnatrices du projet

Fanny Lemétayer, M.Sc.
Conseillères scientifiques, Institut national de santé publique du Québec, Unité Santé et bien-être des populations, Direction du développement des individus et des communautés

Isabelle Paradis, M.Sc.
Conseillères scientifiques, Institut national de santé publique du Québec, Unité Produits et substances psychoactives, Direction du développement des individus et des communautés

Géomaticien

Charles Prisca Samba, Ph. D.
Conseiller scientifique spécialisé et analyste en géomatique, Institut national de santé publique du Québec, Unité Analyse de la santé des populations et de ses inégalités sociales et territoriales, BIESP

Collaborateurs

Valérie Houle et Marie-Ève Girard 
Direction régionale de santé publique CIUSSS-Québec

Benoît Lasnier (INSPQ)  
Denis Hamel (INSPQ)
Caroline Tessier (INSPQ)
Pascale Bergeron (INSPQ)
Nathalie Labonté (INSPQ)
Maryse Beaudry (INSPQ)

Comité consultatif

Natalia Romero et Daniela Furrer
Conseillères en Surveillance — Service de surveillance de l’état de santé, Direction générale adjointe de la santé publique

Hélène Hamel et Nancy Rocha
Coordonnatrices, Jeu : aide et référence

Anne-Élizabeth Lapointe
Directrice générale, Maison Jean-Lapointe

Sylvie Nadon
Agente de planification, de programmation et de recherche, Équipe de surveillance, recherche, évaluation, DSP Laurentides

Alain Poirier
Directeur de santé publique, DSP Estrie

Denis Lapointe
Maire sortant de Salaberry-de-Valleyfield, Président du Réseau québécois villes et villages en santé

Cette recherche a reçu en 2016 l’appui écrit des directeurs régionaux de santé publique, les Drs Jean-Pierre Courteau (Outaouais), Richard Massé (Montréal), Isabelle Sormany-Goupil (Mauricie–Centre-du-Québec), François Desbiens (Capitale-Nationale), ainsi que de Denis Lapointe, maire sortant de Salaberry-de-Valleyfield et président du Réseau québécois villes et villages en santé.

Le protocole de recherche a été approuvé par le Comité d’éthique de la recherche — Dépendances, inégalités sociales et santé publique du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux — Centre-Sud de l’île de Montréal (CIUSSS-CSMTL), Certificat DIS-1617-21.

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