Terrains contaminés, déversements illégaux impunis et plan d’action
Les déversements illégaux de sols contaminés font couler de l’encre. En juin 2018, Le Devoir (1) faisait écho au rapport de la Vérificatrice générale du Québec qui rapportait que plus de 1 900 terrains contaminés sont sous la responsabilité de l’État. Selon ce même rapport, ces terrains peuvent représenter un risque pour la santé de la population et l’environnement. La vérificatrice mentionne notamment que les actions gouvernementales sont insuffisantes et que le portrait d’ensemble ne comprend pas les renseignements nécessaires pour déterminer les enjeux et les priorités d’intervention. En outre, il n’y a aucune assurance que les efforts de réhabilitation et les sommes investies sont destinés en priorité aux terrains qui présentent les plus grands risques pour la santé humaine et l’environnement. La facture de la réhabilitation pourrait s’élever à 3 milliards de dollars et les travaux s’échelonner sur plus de 50 ans (2).
Le 15 août 2018, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) annonçait la mise en place d’un plan d’action visant à prévenir et à sanctionner les infractions environnementales liées aux terrains contaminés (3). Le plan d’action prévoit notamment l’augmentation du nombre d’inspections dans le cadre du contrôle des sols contaminés, un partenariat avec les enquêteurs de la Sûreté du Québec (SQ), et le recours à la traçabilité pour toute demande faite dans le Programme ClimatSol-Plus. Ce programme s’adresse aux municipalités et aux propriétaires privés qui ne sont pas responsables de la contamination. ClimatSol-Plus assure un soutien financier pour la réhabilitation des terrains contaminés. Ce programme est financé par le Fonds vert (30 millions sur 3 ans pour le volet 1) et par le MELCC (25 millions sur 5 ans pour le volet 2).
À l’instar de la couronne de Montréal, la région des Laurentides est particulièrement touchée par les déversements de terres contaminées. Un cas spécifique a attiré l’attention des médias récemment. Ainsi, la SQ et le MELCC enquêtent depuis des années sur plusieurs entrepreneurs qui auraient pris en charge des sols contaminés sur des chantiers de la région de Montréal et qui les auraient déversés illégalement en milieu rural. En juin, La Presse révélait aussi que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) avait renoncé à porter des accusations criminelles, s’estimant incapable de faire condamner les accusés dans un procès criminel où le fardeau de la preuve est très élevé (4). Ce constat quant à l’absence de preuve suffisante pour intenter des poursuites criminelles ne restreint toutefois pas la possibilité pour le MELCC d’imposer des amendes en vertu des règlements de la Loi sur la qualité de l’environnement. Un constat d’infraction remis le 3 mars 2017 prévoyait une amende minimale de 30 000 $ pour deux entreprises accusées d’avoir déversé trois chargements de terres contaminées sur un terrain agricole dans les Laurentides en mai 2016. Un procès à ce sujet s’est amorcé en août 2018 à Saint-Jérôme. Le mercredi 21 novembre 2018, le juge Claude Lachapelle a ordonné l’arrêt du processus judiciaire en vertu de l’arrêt Jordan, qui fixe un plafond de 18 mois entre le dépôt d’une accusation et la tenue d’un procès en Cour du Québec (4).
Sources :
- Le Devoir (13 juin 2018). Terrains contaminés: facture de trois milliards pour les contribuables, mais aucun plan d’action du gouvernement
- Vérificateur général du Québec (juin 2018). Audit de performance – Terrains contaminés sous la responsabilité de l'État
- CNW Telbec (15 août 2018). Sols contaminés : un plan d'action pour mieux prévenir et sanctionner les infractions environnementales
- La Presse (23 novembre 2018). Laurentides: des déversements illégaux resteront impunis
Sources complémentaires :
- La Presse (2 mai 2018). Sols contaminés rejetés dans la nature: «C'est une bombe à retardement!»
- La Presse (9 août 2018). Sainte-Sophie: la faune menacée par une «soupe de contaminants»