Métaux lourds

Les troubles neurodéveloppementaux et comportementaux chez les enfants et l’exposition à l’arsenic, au cadmium et au manganèse : revue de littérature et méta-analyse

Les effets neurologiques aigus et chroniques associés à l’exposition professionnelle aux éléments traces métalliques ont été abondamment étudiés par le passé. Toutefois, l’exposition de la population à ces contaminants à plus faibles doses, dans un contexte d’exposition domestique à proximité de zones industrielles polluées, est une préoccupation de santé publique grandissante en raison des effets neurotoxiques potentiels, surtout lorsqu’il est question des femmes enceintes et des enfants.

L’équipe espagnole de Rodriguez-Barranco et ses collègues a voulu analyser les preuves scientifiques publiées jusqu’à maintenant concernant les effets potentiels sur le développement et le comportement des enfants exposés à l’arsenic, au cadmium et au manganèse durant la grossesse et l’enfance, ainsi que quantifier l’amplitude des effets neurodéveloppementaux.

Plombémie chez les enfants et proximité des aéroports

Alors que le plomb a été retiré de l’essence au Canada et aux États-Unis depuis plusieurs années, le carburant destiné aux petits avions à pistons, le AVGAZ, fait l’objet d’une exception, et peut contenir jusqu’à 0,56 gramme par litre de plomb. En raison de la toxicité connue du plomb, cette situation soulève des préoccupations de santé publique pour les populations avoisinant les aéroports qui accueillent ce type d’appareils. C’est sur cette question que s’est penchée une équipe de chercheurs de l’Université Duke, en Caroline du Nord (Miranda et al. 2011).

Plus spécifiquement, ces chercheurs ont cherché à savoir si le fait de vivre à proximité de petits aéroports pouvait entraîner une augmentation de la plombémie chez les jeunes enfants. L’existence dans cet État d’un programme systématique de surveillance de la plombémie des jeunes enfants représentait un avantage appréciable, en raison de la très grande puissance statistique en découlant, pour réaliser une telle étude.

La présence de plomb dans l'environnement résidentiel et son impact sur la plombémie de jeunes enfants à Montréal

La toxicité du plomb est reconnue, même à de très faibles niveaux d’exposition. Les enfants sont particulièrement vulnérables au plomb, notamment quant à ses effets délétères sur le développement du système nerveux central3. Les jeunes enfants s’exposent habituellement de façon plus importante que les adultes au plomb. En effet, le fait de porter leurs mains ou différents objets à leur bouche ainsi que leur proximité aux sources de poussières (par leur petite taille et les déplacements au sol) peuvent favoriser leur exposition par l’ingestion ou l’inhalation de plomb456. De plus, la consommation d’eau par les jeunes enfants (en ml/kg) est importante comparée à celle des adultes7.

Avant 1950, le plomb était couramment utilisé dans la fabrication de différents produits, exposant ainsi la population à diverses sources de plomb. À partir des années 1970, une règlementation plus sévère a contribué à la diminution de la teneur en plomb dans les peintures, les éléments de plomberie et différents produits domestiques. L’interdiction d’ajout de plomb dans l’essence en 1990 a également contribué à la diminution des risques d’exposition à ce métal. Néanmoins, il est encore possible de trouver des sources d’exposition au plomb dans la peinture et les poussières d‘anciennes résidences, surtout celles construites avant 1970. L’eau du robinet peut aussi être contaminée lors de la présence de composantes en plomb de la tuyauterie  (entrées de service ou soudures). Enfin, certains produits traditionnels importés par différentes communautés culturelles peuvent ne pas respecter la règlementation canadienne quant à leur teneur en plomb (encens, chandelles, cosmétiques et remèdes traditionnels, verreries, conserves et aliments)8910.

Afin de mieux documenter l’importance des sources résidentielles de plomb, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), en collaboration avec Santé Canada et l’École Polytechnique de Montréal, a réalisé une étude visant à évaluer l’importance de la contamination par le plomb de l’eau, des poussières et de la peinture domestiques et leur impact sur la plombémie des jeunes enfants.

L'Enquête canadienne sur les mesures de la santé : résultats de la biosurveillance pour le plomb, le bisphénol A et le mercure total

L’enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS), menée par Statistique Canada en partenariat avec Santé Canada et l’Agence de la santé publique du Canada, est l’enquête la plus exhaustive réalisée au Canada pour obtenir des mesures directes sur la santé. Cette enquête a été conçue de manière à être représentative de la population canadienne; elle consiste à recueillir des renseignements sur l’état de santé en général et sur les modes de vie des Canadiens au moyen d’entrevues et de mesures physiques directes (par exemple, le poids et la taille des sujets). Les résultats de cette enquête permettront de fournir de l’information sur des maladies chroniques et infectieuses, la condition physique, la nutrition et d’autres facteurs qui influencent la santé.

Dans leur quotidien, les Canadiens sont exposés à diverses substances chimiques présentes dans l’environnement. Plusieurs de ces substances peuvent se retrouver dans le corps humain, posant ainsi un risque potentiel pour la santé. Elles peuvent s’introduire dans l’organisme par ingestion, inhalation et contact cutané. L’exposition humaine aux substances chimiques peut être estimée indirectement en mesurant ces substances dans l’environnement, les aliments ou les produits ou directement par la biosurveillance.

Alimentation locale et exposition au mercure en Amazonie brésilienne

L’exposition humaine au mercure (Hg) d’origine environnementale constitue un enjeu de santé publique depuis maintenant deux décennies en Amazonie. Les premières études menées à partir de la fin des années 1980 dans les bassins des rivières Madeira et Tapajós au Brésil suggéraient que l’utilisation de Hg dans les mines artisanales d’exploitation aurifère constituait la seule source de contamination environnementale au Hg. Toutefois, des études géochimiques subséquentes ont montré qu’en plus de l’orpaillage, le retrait de la couverture forestière occasionné par l’agriculture sur brûlis (technique traditionnelle pour cultiver la terre) rendait les sols plus vulnérables à l’érosion lors des pluies torrentielles qui s’abattent sur la région pendant plusieurs mois de l’année. Enfin, à ces sources de contamination au Hg, on reconnaît également aujourd’hui l’apport de la mise en eau de grandes surfaces de terres pour la construction de réservoirs d’eau à des fins hydroélectriques.

Une fois rendu dans le milieu aquatique, le Hg subit des transformations chimiques qui le convertissent en méthylmercure (voir encadré 1). Les racines des plantes aquatiques, qui sont très abondantes dans les lacs et les rivières de la région, constituent un lieu propice pour cette transformation. Le méthylmercure ainsi formé entre dans la chaîne trophique pour ensuite être assimilé par les poissons herbivores, puis par les espèces piscivores.

Exposition aux métaux d’origine environnementale au Nunavik

Les Inuits du Nunavik sont exposés aux métaux et aux polluants organiques persistants (POPs) transportés du sud au nord par les courants marins et atmosphériques, et bioamplifiés dans les chaînes alimentaires de l’Arctique. Comme leur régime alimentaire traditionnel comporte d’importantes quantités de mammifères marins, de poissons et de gibier, les Inuits sont davantage exposés à ces contaminants que les populations vivant dans les régions du sud du Québec.

Le mercure et le plomb affectent surtout le système nerveux et peuvent causer des déficiences intellectuelles, comportementales et motrices chez les enfants et les adultes1-9. Le principal risque pour la santé associé au cadmium est la toxicité rénale, tandis que l’exposition chronique peut aussi causer l’anémie, la perte osseuse et des maladies cardiovasculaires10. La présente étude a été menée dans le cadre de l’Enquête de santé auprès des Inuits du Nunavik en 2004 qui avait pour objectifs d’examiner les changements relativement à l’exposition des Inuits aux contaminants environnementaux en mettant à jour l’évaluation du degré d’exposition et de commencer à mesurer les contaminants environnementaux émergents.

Le khôl, un cosmétique responsable d’intoxications au plomb

Au cours des dernières années, plusieurs cas d’intoxication au plomb chez de jeunes enfants ont été déclarés à la Direction de santé publique (DSP) de Montréal, dans le cadre du système québécois des maladies à déclaration obligatoire (MADO) par agents chimiques. Dans cet article, nous résumerons trois épisodes d’intoxications, le premier survenu en 2002 et les deux autres, en 2005, puis nous présenterons le produit en cause, ses effets sur la santé ainsi que quelques exemples d’interventions réalisées à travers le monde.

En 2002, un médecin rapporte trois cas d’intoxication au plomb chez des enfants âgés de 7 mois, 11 mois et 2 ans et demi, dont deux provenant de la même famille. Les valeurs de plombémie sont respectivement de 1,18 µmol/L, de 1,17 µmol/L et de 0,54 µmol/L. Après investigation, la principale source d’exposition suspectée pour ces cas s’avère être l’application d’un cosmétique pour les yeux, un produit appelé khôl. Une analyse du contenu de ce produit utilisé sur les enfants est alors demandée. Le khôl en question provient de l’extérieur du Canada. Les deux échantillons analysés révèlent une composition en plomb de 78 % et de 92 %. Du counselling est alors offert à la famille. L’événement est considéré, à ce moment, comme isolé. À la suite du retrait de l’exposition au produit contaminé, le suivi des enfants démontre une diminution de la plombémie à 0,81 µmol/L après six mois pour l’enfant de 7 mois et à 0,62 µmol/L après un mois pour l’enfant de 11 mois. Aucun autre résultat ne fait l'objet d'une déclaration par la suite.