L’INSPQ a voulu mesurer la durée de séjour des hospitalisations associées au variant Omicron, pour la comparer à celle des hospitalisations associées au variant Delta, afin d’anticiper l’impact de ce nouveau variant sur le système de santé. Le variant Omicron du virus SRAS-CoV-2 est arrivé au Québec en décembre 2021. Ce variant cause une maladie possiblement moins grave que les variants précédents, mais il est beaucoup plus contagieux que le variant Delta.
Méthodologie
Entre le 21 décembre 2021 et le 10 janvier 2022, le Laboratoire de santé publique du Québec a reçu des prélèvements de patients hospitalisés positifs au SRAS-CoV-2. Ces prélèvements ont été criblés pour identifier le variant présomptif (Delta ou Omicron). Après jumelage avec les données d’hospitalisation et le retrait des cas de COVID-19 détectés plus de 7 jours après l’admission à l’hôpital (cas possiblement nosocomiaux), 627 hospitalisations de patients atteints de la COVID-19 ont été retenues pour les analyses. De ce nombre, 306 patients avaient été admis à cause de la COVID-19, soit 71 cas associés au Delta et 235 à l’Omicron.
Les durées de séjour médianes ont été calculées pour chaque variant présomptif, dans un but descriptif. L’évolution de la probabilité d’être toujours hospitalisé chaque jour supplémentaire depuis l’admission a été analysée à l’aide de courbes de Kaplan-Meier comparant les deux variants (bandes de confiance de Hall-Wellner). Plus une courbe de survie est élevée, plus la probabilité de demeurer à l’hôpital est élevée, ce qui prolonge la durée de séjour. Cette analyse permet de prendre en compte l’ensemble de la distribution des durées de séjour et de produire une mesure de la précision des estimés. Le suivi des patients cessait 28 jours après l’admission. L’analyse principale a porté sur les 306 patients admis à cause de la COVID-19, dont 6 % étaient toujours hospitalisés après 28 jours. Des analyses de sensibilité ont également été menées par groupe d’âge, en n’incluant que les patients vivants à la fin du séjour et, enfin, en analysant l’ensemble des hospitalisations de patients positifs à la COVID-19, peu importe la raison de leur admission.
Résultats
Durées médianes de séjour
Chez les patients admis à cause de la COVID-19, la durée médiane de séjour était de 6 jours avec Omicron, comparée à 8 jours avec Delta. Le résultat est similaire après exclusion des patients décédés en cours d’hospitalisation et l’écart se rétrécit lorsque tous les patients positifs à la COVID-19 sont inclus, peu importe la raison de l’admission. Chez les patients admis à cause de la COVID-19, en analysant les groupes d’âge séparément, on observe un écart plus grand entre les durées médianes de séjour des deux variants chez les 0 à 45 ans. Les barres représentant les 25e et 75e percentiles des durées de séjour montrent toutefois une assez grande variabilité dans ces durées, pour les deux variants, et il est difficile de conclure avec certitude à une différence entre les variants.
Figure 1 - Durées médianes de séjour observées pour chaque variant présomptif, pour chacune des analyses
Les barres d’erreur représentent les 25e et 75e percentiles et les nombres, le nombre d’observations incluses dans les calculs. Les 25e et 75e percentiles de la durée de séjour pour les patients admis à cause de la COVID-19 sont donc de 3 et 13 jours pour Omicron (médiane de 6 jours) et de 4 et 14 jours pour Delta (médiane de 8 jours).
Évolution de la probabilité de demeurer hospitalisé
Bien que les patients admis à cause de l’Omicron semblent quitter l’hôpital plus rapidement que ceux admis à cause du Delta, les courbes se superposent entre 10 et 15 jours de suivi et les bandes de confiance illustrent la grande variabilité des mesures.
Figure 2 - Évolution de la probabilité d’être toujours hospitalisé, selon le variant présomptif, par jour depuis l’admission.
Les lignes en pointillé représentent les bandes de confiance à 95 % de Hall-Wellner pour chaque variant présomptif.
Les graphiques présentés dans la figure 3 montrent que les durées de séjour sont très similaires chez les 66 ans et plus, quel que soit le variant présomptif. Les courbes suggèrent une durée de séjour plus courte chez les 65 ans ou moins lorsque l’admission était causée par l’Omicron, mais il n’est pas possible de conclure avec certitude à une différence réelle entre les deux variants étant donné la largeur des bandes de confiance.
Figure 3 - Évolution de la probabilité d’être toujours hospitalisé selon le variant présomptif, par jour depuis l’admission, pour quatre groupes d’âge.
Les lignes en pointillé représentent les bandes de confiance à 95 % de Hall-Wellner pour chaque variant présomptif.
Conclusion
Globalement, les analyses menées avec les données disponibles jusqu’à présent ne montrent pas une diminution claire de la durée du séjour hospitalier chez les patients infectés par le variant Omicron, par rapport au Delta. La durée est possiblement plus courte dans les groupes d’âge plus jeunes, mais ces personnes représentent une minorité des hospitalisations liées à la COVID-19 au Québec.
Ce résultat pourrait s’expliquer par le fait que l’admission à l’hôpital est conditionnelle à une certaine gravité de la maladie. Si le variant Omicron cause une maladie moins grave que le variant Delta, cela pourrait se refléter davantage dans le risque d’hospitalisation, de séjour aux soins intensifs ou de décès que dans la durée des séjours hospitaliers.
D’autres facteurs, comme la vaccination et les comorbidités, pourraient contribuer à expliquer les résultats observés. Enfin, la variabilité statistique nous empêche de tirer des conclusions plus définitives. De nouvelles analyses devraient confirmer ou infirmer ces résultats.
Auteurs
Élise Fortin
Marc Brisson
Hugues Charest
Ernest Lo
Rodica Gilca
Zhou Zhou
Pierre-Luc Trépanier
Rachid Amini
Collaborateurs
Judith Fafard
Florence Lacasse
Éric Pelletier
Éric Litvak
Jocelyne Sauvé
Martine Isabelle
Christine Lacroix
Coordination
Marie-Claude Gariépy
Valorisation scientifique
Delphine Descamps
Karl Forest-Bérard
Nous remercions les laboratoires du réseau qui ont participé à l’envoi des spécimens et à l’équipe du Laboratoire de santé publique du Québec qui a réalisé l’analyse des spécimens.