16 décembre 2013

Bilan des éclosions de maladies d’origine hydrique au Québec en 2012

Résumé scientifique
Le texte qui suit est le résumé d’une publication scientifique (ou d’une étude) n’ayant pas été réalisée par l’Institut national de santé publique du Québec. Cette analyse critique ne peut donc pas être considérée comme la position de l’Institut. Son objectif est de porter à l’attention des lecteurs des éléments récents de la littérature scientifique, et ce, sous un éclairage critique découlant de l’expertise des auteurs du résumé.
Auteur(s)
Marjolaine Dubé
B. Sc., conseillère scientifique, Direction de la santé environnementale et de la toxicologie
Germain Lebel
M. A., M. Sc., conseiller scientifique, Direction de la santé environnementale et de la toxicologie

Introduction

La surveillance des éclosions d’origine hydrique permet de dresser un bilan annuel du nombre et des caractéristiques des éclosions survenues du 1er janvier au 31 décembre 2012. Les données proviennent du jumelage de trois sources indépendantes : les signalements rapportés par les directions de santé publique (DSP), le registre « ÉCLOSIONS » provenant du fichier des maladies à déclaration obligatoire (MADO), ainsi que le registre des toxi-infections alimentaires du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). La méthodologie est présentée dans le rapport qui couvre la période 2005 à 2007 (Canuel et Lebel, 2009) et n’a pas été modifiée par la suite. Seul le questionnaire d’enquête a subi de légères modifications.

Une maladie d’origine hydrique est définie comme toute maladie de nature infectieuse ou d'origine physico-chimique causée, ou présumément causée par l’ingestion d’eau, un contact avec l'eau ou l’inhalation de vapeurs ou de gouttelettes d’eau.

Une éclosion est définie comme étant un incident où deux personnes ou plus présentent des symptômes et signes similaires, ou présentent une infection à un même micro-organisme ou une intoxication à un même produit chimique. Les personnes malades doivent être reliées par des caractéristiques communes de temps, de lieu ou de personnes.

Résultats

Au Québec, en 2012, on a dénombré 12 éclosions d’origine hydrique survenues dans 8 régions sociosanitaires (Tableau 1). Ce nombre d’éclosion est comparable à ce qui a été observé durant les années précédentes (Figure 1). La Capitale-Nationale est la région qui a reçue le plus de signalements, soit trois (3) (Tableau 1).

La plupart des éclosions signalées en 2012 sont de nature infectieuse, soit 10 (83,3 %) (Tableau 1). L’eau de consommation est le plus souvent mise en cause, en effet, ce fut le cas pour 7 éclosions (58 %).L’ingestion d’eau est le type d’exposition le plus fréquemment observé, soit pour 7 éclosions (58 %) (Tableau 2). Pour les éclosions de nature infectieuse, l’agent soupçonné est inconnu 7 fois sur 10 (70 %) (Tableau 2).

L’analyse des données révèle qu’au moins 277 personnes ont été impliquées dans une éclosion d’origine hydrique, soit en moyenne 23,1 personnes par éclosion. Il est à noter qu’une éclosion dans la région de la Capitale-Nationale reliée à la bactérie légionnelle (Legionella pneumophila) provenant de tours aérorefroidissantes a impliqué 181 personnes (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2012). En excluant cette éclosion, le nombre moyen de personnes impliquées par éclosion passe à 8,7, ce qui est plus près de la moyenne obtenue entre 2005 et 2011, soit 7,7 (Canuel et Lebel, 2010; Canuel et Lebel, 2013). Lors de cette éclosion de légionellose, 133 personnes ont été hospitalisées et 13 sont décédées (Tableau 2). Une deuxième éclosion dans la Capitale-Nationale a nécessité une hospitalisation, soit une éclosion consécutive à un incicent survenu dans la piscine d’un centre pour personnes âgées dont l’agent était le chlore. Par ailleurs, en Estrie, une éclosion liée à un agent infectieux inconnu (dont l’origine soupçonnée est un élevage à proximité ou l’épandage d’engrais) se démarque par le nombre de personnes impliquées, soit 43.

Tableau 1  Nombre d’éclosions de maladies d’origine hydrique signalées par région sociosanitaire, Québec, 2012

 

Nature de l’éclosion

Total

Région sociosanitaire

Infectieuse

Chimique

01 Bas-Saint-Laurent

0

0

0

02 Saguenay Lac-Saint-Jean

0

0

0

03 Capitale-Nationale

2

1

3

04 Mauricie et Centre-du-Québec

1

0

1

05 Estrie

2

0

2

06 Montréal

0

0

0

07 Outaouais

0

0

0

08 Abitibi-Témiscamingue

0

0

0

09 Côte-Nord

0

0

0

10 Nord-du-Québec

0

0

0

11 Gaspésie – Îles-de-la-Madeleine

1

0

1

12 Chaudière-Appalaches

1

1

2

13 Laval

0

0

0

14 Lanaudière

1

0

1

15 Laurentides

1

0

1

16 Montérégie

1

0

1

17 Nunavik

0

0

0

18 Terres-Cries-de-la-Baie-James

0

0

0

Province

10

2

12

Figure 1  Nombre d’éclosions de maladies d’origine hydrique et nombre moyen de personnes impliquées par éclosion selon l’année, Québec, 2005 à 2012

Tableau 2  Nombre d’éclosions de maladies d’origine hydrique et nombre de personnes impliquées, hospitalisées et décédées selon l’agent soupçonné, Québec, 2012

 

Nombre d’éclosions

Nombre de personnes :

Nombre moyen de personnes
impliquées par éclosion

Nombre maximum de personnes
impliquées dans une éclosion

Impliquées

Hospitalisées*

Décédées*

Nature de l’éclosion

 

 

 

 

 

 

Chimique

2

15

1

0

7,5

13

Infectieuse

10

262

133

13

26,2

181

Usage de l’eau

 

 

 

 

 

 

Eau de consommation

7

64

0

0

9,1

43

Usage récréatif

3

21

1

0

7,0

13

Autre

1

181

133

13

181,0

181

Inconnu

1

11

ND

0

11,0

11

Type d’exposition

 

 

 

 

 

 

Contact avec l’eau

3

21

1

0

7,0

13

Ingestion d’eau

7

73

0

0

10,4

43

Inhalation

1

181

133

13

181,0

181

Inconnu

1

2

ND

ND

2,0

2

Agent infectieux soupçonné

 

 

 

 

 

 

Cercaires ou schistosomes

1

2

ND

ND

2,0

2

Giardia sp. et blastocystis hominis

1

3

0

0

3,0

3

Legionella pneumophila

1

181

133

13

181,0

181

Agent infectieux indéterminé

7

76

0

0

10,9

43

Agent chimique soupçonné

 

 

 

 

 

 

Chlore

1

13

1

0

13,0

13

Venlafaxine

1

2

ND

ND

2,0

2

Total

12

277

134

13

23,1

181

*°: Cette information n’est pas disponible pour les éclosions signalées au MAPAQ (n=2) et peut être manquante pour les signalements aux DSP ou du registre ÉCLOSION. Par conséquent, il est possible que le nombre de personnes impliquées, hospitalisées ou décédées soit sous-estimé.
ND : L’information est non disponible.

Seuls pour les signalements aux DSP (n=9) nous disposons des résultats des analyses de l’eau et des échantillons biologiques qui sont effectuées pour confirmer l’agent responsable. Globalement, pour 67 % des éclosions signalées aux DSP (6/9), il y a eu au moins un prélèvement d’eau ou de tissus biologique. L’agent responsable a été confirmé dans 33 % des éclosions signalées aux DSP (3/9) (Tableau 3).

Tableau 3  Nombre d’éclosions signalées aux DSP selon l’agent chimique ou infectieux soupçonné, Québec, 2012

Agent soupçonné

Nombre total d'éclosions

Nombre d’éclosions pour lesquelles

au moins une analysea a été effectuée

un agent a été confirmé

Agent infectieux

 

 

 

Cercaires ou schistosomes

1

0

0

Giardia sp. et Blastocystis hominis

1

1

1b

Legionella pneumophila

1

1

1

Agent infectieux indéterminé

5

3

0c

Agent chimique

 

 

 

Chlore

1

1

1

Total

9

6

3

a   De l’eau ou d’un échantillon biologique
b   Les deux agents soupçonnés ont été confirmé.
c  Pour deux éclosions, l’analyse de l’eau a démontré la présence d’indicateurs de contamination fécale. Puisque l’agent pathogène n’a pu être confirmé on doit considérer celui-ci comme non confirmé.

En conclusion, bien que le nombre d’éclosions soit demeuré faible en 2012, le nombre de personnes impliquées, hospitalisées ou décédées est élevé comparativement aux dernières années (figure 1). Cette situation est principalement attribuable à l’éclosion de légionnelle dans la région de la Capitale-Nationale. La surveillance des éclosions d’origine hydrique demeure une activité importante pour la protection de la santé de la population. Les statistiques plus détaillées sont disponibles pour les intervenants de santé publique dans le portail de l’Infocentre de santé publique (Onglet : Plan national de surveillance [PNS PCS-PMSM]) : (www.infocentre.inspq.rtss.qc.ca/portail/sante/public/infocentre/accueil/?lang=fr).

Bibliographie

  1. Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale (2012) Éclosion de légionellose dans la ville de Québec, Québec, Canada, été 2012, Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, Québec,  -145.
  2. Canuel, M., Lebel, G. (2009) Surveillance des éclosions des maladies d'origine hydrique au Québec. Bilan du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 Québec.
  3. Canuel, M., Lebel, G. (2010) Bilan des éclosions des maladies d'origine hydrique, Québec, 2008-2009, Bulletin d'information en santé environnementale.
  4. Canuel, M., Lebel, G. (2013) Bilan des éclosions de maladies d'origine hydrique au Québec de 2010 à 2011, Bulletin d'information en santé environnementale.