La prévention de l'intimidation

Faits saillants

  • Deux approches préventives complémentaires peuvent être déployées pour prévenir l’intimidation, soit des stratégies habituelles reconnues dans le domaine de la prévention de la violence et des programmes de prévention visant plus spécifiquement l’intimidation.
  • Différentes stratégies appropriées pour prévenir la violence peuvent contribuer à prévenir l’intimidation avant qu’elle ne se manifeste. Le changement des normes sociales qui favorisaient jusqu’alors la violence, le développement des compétences personnelles et sociales des jeunes, et le développement et le maintien de relations sûres, stables et épanouissantes entre les enfants et leurs parents en sont trois exemples.
  • Plusieurs dimensions peuvent contribuer à la réussite d’un programme de prévention de l’intimidation ou de la cyberintimidation chez les jeunes. La formation du personnel scolaire, le monitorage du programme de prévention une fois celui-ci mis en œuvre, l’implication des parents et l’adoption d’une approche de prévention universelle en sont des exemples.
  • Puisque le fait d’être une personne auteure ou victime d’intimidation est un facteur associé à la cyberintimidation, les programmes visant la prévention de l’intimidation pourraient contribuer à prévenir la cyberintimidation.

Cette section dresse un portrait général de la prévention de l’intimidation. Elle présente des stratégies visant à prévenir la violence, y compris l’intimidation, avant qu’elle ne se manifeste. Elle met également de l’avant de bonnes pratiques, davantage documentées, en matière de prévention de l’intimidation chez les jeunes. Il est possible de consulter les autres pages de cette trousse média sur l’intimidation pour des informations complémentaires concernant la prévention de l’intimidation pour différents groupes de populations. Pour des informations à propos des interventions pouvant être mises en place dans les situations d’intimidation, consultez le site du gouvernement du Québec.

Comment prévenir l'intimidation?

Afin de prévenir l’intimidation, deux approches préventives complémentaires peuvent être déployées, soit des stratégies habituelles reconnues dans le domaine de la prévention de la violence et des programmes de prévention visant plus spécifiquement l’intimidation. Les stratégies et programmes de prévention peuvent notamment cibler certains facteurs pouvant être associés au risque d’intimidation ou viser à renforcer certains éléments ayant un effet protecteur.

Différents facteurs peuvent être à la source de la violence et aucun facteur ne permet à lui seul d’expliquer pourquoi certains gestes de violence sont posés ou subis. Il importe donc d’intervenir sur ces différents facteurs, qui interagissent les uns avec les autres et peuvent influencer le risque qu’une personne pose ou subisse des gestes de violence, y compris d’intimidation. Pour y parvenir, des actions complémentaires doivent être mises en œuvre, dans tous les milieux (p. ex. milieu scolaire, milieu sportif, voisinage, milieu de travail), afin de cibler une multiplicité de facteurs associés à la violence.

Stratégies de prévention de la violence

Les normes sociales renvoient aux règles de conduite et aux comportements attendus au sein d’un groupe social donné. Elles ont une influence sur le comportement individuel, notamment sur le recours à la violence. Elles peuvent protéger contre la violence, mais peuvent aussi la favoriser ou l’encourager2. À titre d’exemple, en contexte sportif, la sensibilisation des entraîneurs, des entraîneuses et des parents sur les normes masculines traditionnelles et leur influence potentielle sur les comportements des athlètes ainsi que l’exposition des jeunes sportifs et sportives à des modèles d’expression de soi non agressive3-5 peuvent contribuer à une prise de conscience et favoriser un changement des normes du milieu.

Certaines normes sociales peuvent renforcer des stéréotypes et des préjugés pouvant être à la base de situations d’intimidation6. À titre d’exemple, selon les données disponibles, les personnes de la diversité sexuelle ou de genre et les personnes autochtones risquent davantage d’être victimes d’intimidation en raison de stéréotypes et de préjugés fortement ancrés dans les normes sociales (ex. : hétéronormativité, racisme).

Le changement des normes sociales qui renforcent des stéréotypes et des préjugés est l’une des stratégies pouvant contribuer à prévenir l’intimidation. Ces normes sociales peuvent être modifiées de différentes manières, notamment par la mise en place de politiques visant à contrer l’intimidation s’appliquant à l’ensemble d’un milieu scolaire et de politiques interdisant explicitement l’intimidation basée sur certains stigmas tels que l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

Le développement de compétences personnelles et sociales vise le « développement de la capacité des individus à mobiliser, dans des situations de la vie, leurs ressources personnelles (savoirs, savoir-être, savoir-faire) et les ressources matérielles et sociales disponibles dans leurs milieux de vie (ex. : équipement de protection [pour la pratique d’activités sportives ou de loisirs], matériel éducatif, personnes-ressources, services, lieux calmes ou sécuritaires) »7. Parmi ces compétences se retrouvent la gestion des émotions et du stress, la demande d’aide pour soi et pour les autres, l’adoption de comportements prosociaux et la gestion des influences sociales.

Les programmes de développement social et d’enrichissement préscolaire destinés aux très jeunes enfants contribuent à prévenir l’agressivité et améliorer les aptitudes sociales, les résultats scolaires et les perspectives d’emploi1. Le développement de compétences personnelles et sociales des enfants, des adolescents et des adolescentes peut contribuer à prévenir l’intimidation. Les problèmes comportementaux (ex. : comportements agressifs ou impulsifs, comportements antisociaux) sont des facteurs associés au risque d’être une personne victime ou auteure d’intimidation chez les jeunes. En ce qui concerne la prévention de la cyberintimidation, des interventions visant le développement de la capacité d’adaptation des jeunes et de leurs compétences sociales sont considérées comme étant prometteuses, tout comme une bonne connaissance de l’utilisation adéquate des médias électroniques8.

Des interventions qui encouragent des relations sûres, stables et épanouissantes peuvent contribuer à prévenir les mauvais traitements envers les enfants et les comportements agressifs pendant l’enfance, un facteur de risque associé à la violence chez les jeunes1.

Puisque la maltraitance envers les enfants9-11 et les problèmes comportementaux (ex. : comportements agressifs ou impulsifs, comportements antisociaux)12-16 sont des facteurs associés au risque d’être une personne auteure ou victime d’intimidation chez les jeunes, les interventions visant à favoriser des relations sûres, stables et épanouissantes entre les enfants et leurs parents et dispensateurs de soins sont une avenue à privilégier pour prévenir l’intimidation en amont.

À titre d’exemple, des programmes de visites à domicile visant à soutenir les familles vivant en contexte de vulnérabilité peuvent contribuer à réduire les mauvais traitements envers les enfants, à faciliter leur développement et leur réussite scolaire et à diminuer les comportements violents et délinquants1,17-24.

Bonnes pratiques en matière de programmes de prévention de l’intimidation chez les jeunes en milieu scolaire

L’efficacité des programmes de prévention de l’intimidation chez les jeunes

Il est difficile de statuer sur l’efficacité globale des programmes de prévention de l’intimidation chez les jeunes, l’efficacité variant d’un programme à l’autre25–29. Les programmes peuvent varier en termes d’interventions mises en place, d’objectifs (p. ex. développer l’empathie des jeunes qui posent des gestes d’intimidation envers les personnes victimes, améliorer les connaissances du personnel enseignant sur l’intimidation, développer un climat scolaire positif) et de publics ciblés (p. ex. les élèves qui posent ou subissent des gestes d’intimidation, l’ensemble des élèves d’une école).

Plusieurs programmes peuvent contribuer, à long terme, à diminuer les situations d’intimidation dans un milieu scolaire. Il peut s’agir par exemple d’augmenter le signalement des situations d’intimidation, d’améliorer les attitudes des élèves face à l’intimidation (p. ex. considérer qu’il est mal d’intimider une autre personne, avoir de l’empathie à l’égard des personnes victimes), ou d’augmenter chez les élèves la perception que leurs pairs et le personnel enseignant interviennent lors d’une situation d’intimidation25.

Certaines bonnes pratiques peuvent être utiles pour orienter ou faciliter le choix d’un programme de prévention ou pour en favoriser la réussite. Bien que l’efficacité des programmes puisse être difficile à mesurer, des évaluations ont permis de faire ressortir différentes dimensions pouvant contribuer à la réussite d’une initiative de prévention ainsi que certains éléments pouvant en limiter l’efficacité.

Parmi ces dimensions se retrouve l’engagement des parties prenantes (p. ex. le personnel scolaire, les étudiantes et étudiants, leurs parents). Une étude a identifié plusieurs éléments qui peuvent faciliter leur engagement :

  • Le fait que la promotion de la santé et des compétences sociales soit perçue comme une activité prioritaire du milieu scolaire et que des lignes directrices et politiques nationales favorables soient en place.
  • Une bonne communication au sein du milieu scolaire.
  • Des objectifs de programme clairement communiqués aux parties prenantes afin que leurs attentes soient réalistes.
  • L’accompagnement des parties prenantes dans la mise en œuvre du programme et le partage d’instructions claires en lien avec celle-ci.
  • Un climat positif chez les membres du personnel scolaire.
  • Le fait que les parties prenantes aient connaissance de la prévalence de l’intimidation dans leur milieu scolaire, qui démontre les besoins en matière de prévention.
  • La communication aux parties prenantes des changements mesurés à la suite de la mise en œuvre des programmes. Des données recueillies localement, par exemple dans le cadre d’une évaluation en continu du programme de prévention mis en œuvre, peuvent être utilisées pour y parvenir.
  • Lorsque pertinent, du soutien externe à la mise en œuvre du programme.
  • Le fait que les parties prenantes perçoivent le besoin et les bienfaits du programme de prévention et sentent que leur vision personnelle quant au rôle de l’école est en cohérence avec les exigences du programme30.

Pour qu’un programme soit efficace et que ses effets perdurent, il est important qu’il soit intégré aux autres initiatives et activités mises en place au sein du milieu scolaire et qu’il vise à agir sur la culture du milieu. Les programmes considérés comme des initiatives autonomes risquent de diminuer l’engagement des parties prenantes et leurs effets peuvent être éphémères30,31. En ce qui concerne la prévention de la cyberintimidation, les personnes-ressources et les regroupements qui entretiennent des liens avec l’école et les familles d’élèves devraient être impliqués dans la mise en œuvre des programmes afin de s’assurer d’une continuité dans les messages de prévention31,32. Ces derniers pourraient par exemple contribuer à étendre les programmes de prévention à des endroits visités par les jeunes comme les bibliothèques et les maisons de jeunes32.

Il faut également garder à l’esprit que, dans les cas où il est possible d’implanter un programme évalué et reconnu efficace, il est important de rester le plus fidèle possible aux composantes du programme original pour tendre vers une efficacité similaire. Le fait d’avoir des manuels de formation normalisés31 peut être utile en ce sens.

Le fait de pouvoir compter sur un comité qui coordonnera l’ensemble des activités32 ainsi que sur une personne en charge du programme31 peut contribuer à faciliter l’implantation et à favoriser la pérennité d’un programme de prévention de la cyberintimidation. Ces éléments pourraient également être prometteurs pour les programmes de prévention de l’intimidation.

Quel que soit le type d’interventions mis de l’avant, il faut garder en mémoire qu’aucune initiative unique, de courte durée, sans évaluation et de faible intensité ne peut à elle seule parvenir à réduire l’intimidation. Il est donc important de combiner différentes interventions et de prendre certaines dimensions en considération. De plus, malgré le fait que la plupart des programmes évalués et reconnus efficaces aient été mis en place en contexte scolaire, différentes dimensions peuvent être applicables à d’autres milieux ou contextes.

Dimensions pouvant contribuer à la réussite d’un programme de prévention

Certaines dimensions ciblant le milieu scolaire, le personnel enseignant, les intervenants et intervenantes, les parents et les jeunes peuvent contribuer à la réussite d’un programme de prévention. Il existerait d’ailleurs une relation entre le nombre de dimensions prises en compte dans un milieu scolaire et l’efficacité du programme pour lutter contre l’intimidation27 . Les programmes prenant en compte onze dimensions ou plus ont démontré une meilleure efficacité34 . En voici une liste non exhaustive :

  • Adopter une politique contre l’intimidation qui s’applique à l’ensemble de l’établissement scolaire27,33,34.
  • Cibler l’ensemble de la classe et s’accompagner d’interventions individuelles ou impliquant les familles35.
  • Comporter des règles visant à lutter contre l’intimidation que les élèves doivent suivre et qui sont mises en application. Elles peuvent être transcrites sur une note affichée et bien en vue dans chacune des classes27,34.
  • Favoriser la concertation entre le personnel enseignant et professionnel des services complémentaires (ex. : psychologues) pour intervenir auprès des personnes victimes et des personnes auteures27,34.
  • Offrir une formation au personnel enseignant27,30,33,34.
  • Offrir des techniques de gestion de classe pour détecter les comportements d’intimidation et pouvoir y réagir27,34.
  • Inclure des rencontres d’information avec les parents visant à les sensibiliser au problème de l’intimidation26,27,34,35. Cela est particulièrement recommandé pour les parents des plus jeunes enfants du primaire9.
  • Prévoir des conférences ou des séances d’information offertes aux élèves portant sur le phénomène de l’intimidation34.
  • Intégrer des méthodes disciplinaires visant les personnes auteures d’intimidation (ex. : avoir une conversation sérieuse avec celles-ci, les diriger vers la direction, les obliger à demeurer près du personnel qui supervise pendant les pauses, leur retirer certains privilèges)26,27,34.
  • Prévoir la supervision des aires de jeux en fonction des lieux et des moments les plus à risque27,34.
  • Prévoir des ateliers visant la gestion des émotions28.
  • Prévoir l’utilisation de matériel éducatif technologique (ex. : vidéos, jeux virtuels)27.
  • De plus, le fait de comporter un volet mentorat et le fait de prévoir la présence significative d’une travailleuse sociale ou d’un travailleur social dans le milieu sont deux éléments prometteurs28.

En plus de tenir compte de ces différentes dimensions, les programmes qui sont mis en place sur une longue durée et avec une certaine intensité27, qui impliquent l’ensemble du milieu scolaire27,28,33,36,37, qui font l’objet d’un monitorage ou d’une surveillance en continu28 et qui sont appuyés sur des fondements théoriques ou conceptuels33 sont plus susceptibles d’être efficaces. Assurer un équilibre entre la charge de travail du personnel enseignant consacrée à la réalisation du cursus scolaire et ses tâches liées à la mise en œuvre du programme peut également en favoriser la réussite30.

Le soutien par les pairs

Certains programmes de prévention de l’intimidation comportent un volet « soutien par les pairs » qui prévoit l’engagement formel des pairs dans la lutte contre l’intimidation. Le soutien par les pairs peut impliquer le déploiement de plusieurs stratégies, telles que :

  1. le soutien aux personnes victimes,
  2. la médiation par les pairs pour favoriser la gestion positive des conflits et éviter que les conflits non réglés dégénèrent et deviennent de l’intimidation, et
  3. le mentorat par les pairs généralement offert par des élèves plus âgés ou âgées.

Certains programmes peuvent également mettre l’accent sur l’engagement de personnes témoins dans des situations d’intimidation de telle sorte que la désapprobation du comportement d’intimidation soit exprimée adéquatement et qu’un soutien soit offert aux personnes victimes27.

Cependant, la médiation par les pairs, mal utilisée, sans formation préalable des élèves médiateurs ou médiatrices et sans supervision d’adultes, pourrait ne pas être indiquée pour résoudre une situation grave d’intimidation38.

Ce volet doit donc être implanté avec rigueur et demeurer sous la supervision d’adultes avisés ou avisées, à l’image de ce qui est prévu dans le programme KiVa34,39. Démontré efficace, ce programme comprend des mesures qui encouragent les élèves témoins à soutenir les personnes victimes lorsqu’une situation d’intimidation survient. Pour en savoir davantage sur ce programme, vous pouvez consulter le site web du programme (disponible en français sur le portail de la Belgique).

Dimensions pouvant limiter l’efficacité d’un programme en milieu scolaire

Une étude s’étant intéressée à la vision des éducatrices et des éducateurs quant aux raisons pouvant expliquer les limites de l’efficacité des programmes de prévention en contexte canadien a fait ressortir plusieurs dimensions pouvant freiner la réussite de ces programmes. Ces dimensions peuvent être, entre autres, de l’ordre du contenu du programme, de son implantation et de sa durée. En voici quelques exemples :

  • Un manque d’adaptation des programmes aux niveaux développementaux des jeunes, ce qui peut limiter leur application à travers la trajectoire scolaire.
  • Une application insuffisante des mesures disciplinaires et un manque de monitorage des événements d’intimidation.
  • Un manque de soutien de la part des collègues et de la direction lorsqu’un cas est détecté, et un manque de collaboration de la part des parents.
  • Une approche top-down qui impose au milieu scolaire un programme particulier.
  • Le manque d’information sur les évidences scientifiques quant à l’efficacité du programme à implanter.
  • Une formation insuffisante du personnel scolaire.
  • Le manque de temps pour réaliser les activités prévues au programme, ce qui implique qu’elles puissent être réduites ou modifiées.
  • La mise en œuvre des programmes sur une trop courte période40.

Les auteures et auteurs ont également interrogé des élèves sur la même question. Ces derniers ont suggéré différents éléments pouvant freiner les initiatives de prévention de l’intimidation ou les rendre inefficaces. En voici quelques-uns :

  • Des présentations ennuyeuses et répétitives à de grands groupes.
  • Un message perçu comme étant négatif et autoritaire (ne pas intimider!)
  • Un message provenant d’une personne qui manque de crédibilité à leurs yeux.
  • Un délai de réponse trop long entre la dénonciation d’un événement d’intimidation en classe et la réponse du personnel scolaire peut décourager la déclaration par les jeunes.
  • L’impression que certains membres du personnel scolaire ont tendance à minimiser la gravité des actes d’intimidation.
  • Le recours à des punitions de type suspension ou retenue des personnes auteures de gestes d’intimidation est souvent perçu par les élèves comme ayant des effets limités ou inefficaces41.

Considérations particulières sur les programmes de prévention de la cyberintimidation

Dimensions pouvant contribuer à la réussite d’un programme de prévention de la cyberintimidation

Certaines dimensions pouvant contribuer à la réussite d’un programme de prévention de l’intimidation peuvent également contribuer à la réussite d’un programme visant la prévention de la cyberintimidation. C’est le cas notamment de la formation du personnel scolaire31 et du monitorage du programme une fois celui-ci mis en œuvre31.

Être une personne auteure ou victime d’intimidation est un facteur associé à la cyberintimidation. Les programmes visant la prévention de l’intimidation peuvent donc éventuellement contribuer à prévenir la cyberintimidation.

L’implication des parents peut également contribuer à la réussite d’un programme de prévention de la cyberintimidation. Les parents peuvent jouer un rôle auprès de leurs enfants dans la familiarisation avec le cyberespace, par exemple en expliquant qu’une personne rencontrée en ligne n’est pas toujours qui elle prétend être32. Fournir aux parents de l’information sur la cyberintimidation et sur les techniques favorisant une meilleure communication avec leurs jeunes peut amener une ou un jeune à s’adresser davantage à ses parents si elle ou il en est victime8.

En plus d’implanter un programme de prévention de la cyberintimidation dans l’ensemble du milieu scolaire28,31, le fait d’adopter une approche de prévention universelle dans la lutte à la cyberintimidation peut également permettre de consolider les bases d’un climat scolaire positif. Ce type d’approche vise à sensibiliser les élèves et à les aider à développer les compétences sociales et émotionnelles nécessaires pour entretenir des interactions positives. Elle peut les aider à prendre conscience des conséquences légales de certaines conduites en ligne et à réagir adéquatement lorsqu’ils ou elles sont victimes ou témoins de cyberintimidation32. Cette approche peut être appuyée par la mise en place d’une politique d’utilisation acceptable du matériel de communication électronique à l’école32.

Considérations méthodologiques et pratiques concernant les programmes de prévention de la cyberintimidation

Des revues systématiques portant sur l’efficacité des programmes de prévention de la cyberintimidation ont fait ressortir que les données sont encore insuffisantes pour en arriver à une conclusion31,42-44. Cela peut s’expliquer entre autres par certaines lacunes en matière de recherche et de pratique :

  • Peu de programmes ont fait l’objet d’une évaluation rigoureuse31,42-44 et plusieurs ne sont pas nécessairement appuyés sur des fondements théoriques31,43.
  • Les outils (ex. : questionnaires) utilisés pour mesurer la cyberintimidation dans le cadre des évaluations de programmes de prévention varient grandement d’une étude à l’autre. Il est difficile de comparer les résultats des évaluations et de les généraliser, puisque la cyberintimidation n’est pas conceptualisée et mesurée de la même manière selon les études43.
  • Peu de programmes sont adaptés aux divers stades de développement des jeunes (ex. : petite enfance, enfance, adolescence) et aux transitions scolaires31.
  • Peu de programmes vont au-delà des relations avec les pairs et le personnel enseignant en incluant par exemple les parents ou d’autres adultes significatifs31.
  • Peu de programmes tiennent compte du contexte dépassant le cadre de l’école (ex. : communauté)31.
  • Peu de recherches ont été réalisées afin de déterminer ce qui fonctionne en matière de prévention de la cyberintimidation et pour quel groupe d’âge31,42. Les programmes évalués étant principalement destinés aux jeunes de 11 à 16 ans31,42-44, il existe peu d’information quant à l’efficacité des programmes de prévention de la cyberintimidation destinés aux plus jeunes ou aux plus vieux.

Davantage d’études sont nécessaires pour mieux comprendre la mise en œuvre d’un programme de prévention de la cyberintimidation et les mécanismes qui expliquent les changements apportés par ces programmes afin de les améliorer et obtenir de meilleurs résultats31.

 

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