Foire aux questions sur les projections - Épidémiologie et modélisation de l’évolution de la COVID-19 au Québec
Modélisation
Comment des projections mathématiques peuvent-elles nous aider à prévenir et à contrôler la propagation de maladies infectieuses comme la COVID-19?
Les modèles mathématiques permettent de simuler les contacts entre les gens, la transmission des maladies infectieuses et l’impact de différentes interventions de santé publique. À l’heure de la COVID-19, ces projections offrent aux décideurs la possibilité de mieux planifier et suivre le déconfinement dans la grande région de Montréal et les régions du Québec, et de mieux évaluer l’efficacité des mesures de santé publique.
Comment sont effectuées vos projections? Quelles données entrent en ligne de compte?
Nos travaux se basent sur la science des contacts sociaux pour produire des scénarios de propagation de la COVID-19. Nous avons développé un modèle dynamique qui reproduit l’histoire naturelle de la propagation de la maladie dans la population. On peut y observer l’état des personnes non-infectées à infectées, jusqu’à leur décès ou rétablissement (immunité).
Par exemple, nous reproduisons la transmission du virus par l’entremise des contacts physiques et sociaux. Nous tenons aussi compte des changements dans les contacts sociaux au sein des différents lieux (tels que l’école, le travail, la maison, les transports ou les loisirs) à la suite des mesures de distanciation sociale (étude CONNECT2 voir plus loin).
Finalement, notre modèle est calibré à partir des données les plus récentes du Québec concernant les hospitalisations et les décès, et ce, à travers le temps. La calibration permet donc de s’assurer que le modèle reproduit bien les données disponibles d’hospitalisations et de décès au Québec.
Quels sont les changements apportés depuis les projections du 8 mai dernier?
D’abord, nous avons intégré les plus récentes données épidémiologiques en tenant compte des changements dans la définition des hospitalisations. Nous avons aussi ajusté le calendrier de déconfinement pour le Grand Montréal (ouverture des commerces de détail le 25 mai dans le Grand Montréal, report de l’ouverture des écoles dans le Grand Montréal).
De nouvelles données pour les paramètres de la modélisation ont aussi été intégrées. Par exemple, nous avons intégré les délais entre l’apparition des symptômes et les hospitalisations et les durées d’hospitalisation au Québec, de même que les données préliminaires de l’étude CONNECT2 pour estimer les changements de contacts sociaux occasionnés par le confinement.
Finalement, nous avons examiné deux scénarios d’adhésion de la population aux mesures de distanciation durant le déconfinement pour notre modélisation de l'évolution des hospitalisations et des décès dans le Grand Montréal et ailleurs en régions : une forte adhésion et une faible adhésion.
La science des contacts sociaux
Qu’est-ce que la science des contacts sociaux?
La transmission des maladies infectieuses (ex. la grippe, la varicelle, la rougeole, le VIH/Sida) dans une population est déterminée par :
- La façon dont les gens entrent en contact les uns avec les autres (ex. discuter, se serrer la main, s’embrasser);
- Les caractéristiques des virus ou bactéries (ex. durée de la période infectieuse, voie de transmission).
Ainsi, il est crucial de comprendre comment les individus interagissent les uns avec les autres si l’on veut briser les chaînes de transmission des maladies et prévenir les épidémies.
Comment est-ce possible d’estimer le niveau des contacts sociaux dans une population?
Depuis 2018, des chercheurs de l’Université Laval avec leurs collaborateurs de plusieurs Universités canadiennes et d’autres Universités à travers le monde (Imperial College, University of Antwerp, Université de Lille) ont créé la première base de données de contacts canadienne, à partir d’un échantillon aléatoire de 5000 participants de tous les âges à travers le Canada. Cette étude appelée CONNECT1, financée par le Canadian Immunization Research Network (CIRN), constitue une première initiative pour décrire comment les Canadiens interagissent et entrent en contact les uns avec les autres. Pour ce faire, les participants ont dû remplir un journal de contacts sociaux pendant 2 jours.
Le nombre moyen de contacts par personne a été estimé à 12.2 par jour, que ce soit au travail, à la maison, à l’école, etc.
Par exemple, au travail, le nombre moyen de contacts est de 10 pour les personnes en emploi. Toutefois puisque 46 % de la population travaille, et ne travaille pas tous les jours, ce chiffre correspond plutôt à 4,6 contacts par jour lorsque l’on considère l’ensemble de la population.
Comment est défini un contact social?
Dans le cadre de l’étude CONNECT, un contact peut être une conversation à moins de deux mètres ou un contact physique comme se toucher la peau, se serrer la main ou s'embrasser. En bref, il s’agit du nombre de personnes différentes avec qui on a un/des contact(s) de proximité physique dans 1 journée.
Comment est-ce possible de prédire l’impact des mesures de distanciation sociale en termes de contacts sociaux pendant la pandémie de COVID-19?
Les chercheurs ont modélisé la réduction des contacts dans la population et ainsi la réduction de la transmission de la maladie. L’Étude CONNECT2, dont la collecte de donnée s’est terminée le 25 mai (donc en cours d’analyse) donnera une meilleure estimation du pourcentage de la diminution des contacts selon les différents lieux (école, travail, transport, etc.) et selon les différents groupes d’âge de la population.
Par exemple, en contexte de confinement, le nombre moyen de contacts est passé à 4.5 par jour, nous apprend les données préliminaires de l’étude CONNECT2. Cela représente une réduction de 63 % du nombre de contacts sociaux. (4.5 contacts confinement / 12.2 contacts pré- confinement)
Le nombre moyen de contacts au travail est 2,1 (incluant le télétravail et les arrêts temporaires du travail).
Qu’est-ce qu’un contact protégé?
Un contact protégé respecte les mesures mises en place pour réduire la transmission du virus, que ce soit par la distanciation à 2 mètres, le port du couvre-visage ou encore l’installation de Plexiglas dans les commerces.
Comment sont définis les scénarios de forte et de faible adhésion?
La forte adhésion simule que de 60 à 80 % des contacts sociaux sont protégés et que de 75 à 90 % des cas symptomatiques sont isolés.
La faible adhésion simule que de 0 à 40 % des contacts sociaux sont protégés et que de 60 à 75 % des cas symptomatiques sont isolés.