17 juin 2005

Évaluation des interventions de communication du risque associé à la présence de contaminants chimiques dans l’eau potable

Article
Auteur(s)
Danny Belzile
Direction de santé publique de Chaudière-Appalaches
Andrée Fafard
Direction de santé publique de Chaudière-Appalaches

Des interventions de santé publique en lien avec des cas de contamination chimique de l’eau potable sont effectuées régulièrement par l’équipe de santé environnementale de la Direction de santé publique de Chaudière-Appalaches (DSP). Ces interventions ne sont généralement pas évaluées, que ce soit en fonction de leur déroulement ou de leurs effets sur la population. Ainsi, l’objectif de l’étude était de mieux connaître les facteurs et les retombées associées aux activités de communication du risque auprès de la population afin de les améliorer. Elle visait plus spécifiquement à :

  • vérifier si les informations fournies par les autorités ont rejoint la population visée;
  • connaître les résultats sur les connaissances acquises et sur les habitudes de consommation d’eau des populations visées;
  • connaître l’opinion des populations visées :
    • par rapport au processus de gestion et de communication du risque;
    • concernant les moyens de communication retenus et le message transmis.

Avec pour base théorique un cadre conceptuel développé à partir de modèles issus des domaines de la communication, des comportements associés à la santé, de la perception et de la gestion du risque, l’étude a considéré différents contextes de communication associés à la présence d’arsenic ou de trihalométhanes (THM) dans l’eau potable. La mesure a pris la forme d’un sondage téléphonique réalisé en janvier 2005 auprès de 957 citoyens de quatre municipalités de la région de la Chaudière-Appalaches aux prises avec une contamination chimique de l’eau.

Résultats

Exposition, compréhension et rétention du message

  • 62 % des répondants affirment avoir reçu le dépliant d’information concernant la qualité de l’eau potable de leur municipalité et, dans les deux municipalités concernées, entre 11 % et 22 % affirment avoir assisté à la rencontre d’information offerte sur ce même sujet.
  • La compréhension et la rétention des contenus véhiculés sont généralement faibles pour l’ensemble des municipalités. Le nom des contaminants impliqués, les conséquences possibles sur la santé et les mesures de correction envisagées sont dans l’ensemble peu connus ou retenus.
  • La valeur ajoutée de la tenue d’une rencontre d’information ne paraît pas saillante pour la rétention et la compréhension des informations sur le risque.
  • Les citoyens concernés par l’arsenic retiennent mieux le nom du contaminant qui les concerne, ainsi que les conséquences possibles sur leur santé.

Certains moyens préventifs possibles sont connus mais réfèrent aux comportements typiques (ex. boire de l’eau embouteillée). Les moyens plus spécifiques présentés dans le dépliant (ex. aérer l’eau) semblent inconnus de la plupart des répondants et ce, même chez ceux plus à risque (ex. femmes enceintes).

Perception du risque

  • 42 % disent qu’ils n’ont pas du tout été inquiétés, 44 % qu’ils ont été plutôt inquiétés à la suite de la communication.
  • 10 % considèrent qu’il n’y a pas de risque à consommer l’eau du robinet; 55 % considèrent que ce risque est minime; 34 % qu’il est grand.
  • Les répondants informés sont moins nombreux à croire que le risque est absent, et plus nombreux à penser que le risque est grand comparativement aux répondants non informés.
  • Ceux qui perçoivent que le risque est grand sont plus nombreux à retenir davantage l’information, à avoir complété une formation universitaire et à être âgés entre 25 et 54 ans.
  • Les citoyens concernés par l’arsenic affirment plus souvent que le risque est grand comparativement à ceux touchés par les THM.

Changement dans les habitudes de consommation d’eau

  • 50 % des répondants boivent principalement l’eau du robinet.
  • 90 % cuisinent principalement avec l’eau du robinet.
  • 45 % boivent principalement de l’eau embouteillée.

On observe que 30 % des répondants informés disent avoir changé leurs habitudes après la diffusion du message. Ils ont pour la plupart opté pour de l’eau embouteillée. Par contre, pour la majorité, ce sont les propriétés organoleptiques de l’eau (goût, odeur), et non le message de la DSP, qui a été l’incitatif pour changer leurs habitudes.

Opinions sur la communication du risque

  • Les contenus diffusés ont semblé clairs et les répondants considèrent majoritairement que le message était exhaustif.
  • 74 % considèrent que leur municipalité est l’autorité principalement responsable de la communication.
  • 41 % font d’abord confiance à leur municipalité concernant l’information sur la qualité de l’eau potable.
  • 75 % ont l’impression d’avoir eu l’heure juste de la part des responsables de la communication.
  • 94 % endossent l’importance de les avoir informé.
  • 80 % sont satisfaits de la communication.
  • 84 % s’attendent à être informés périodiquement de la qualité de l’eau (à toutes les saisons ou lors de changements).
  • 76 % contacteront leur municipalité pour de l’information additionnelle.
  • Les citoyens insatisfaits de la communication (25 %) s’attendent notamment à plus de détails sur les causes et conséquences directes sur la santé et à un suivi plus régulier de l’évolution de la situation.

Conclusion

Au terme de cette évaluation, les objectifs de la communication semblent partiellement atteints dans les interventions liées à la présence d’arsenic et de THM dans l’eau potable. La distribution de dépliants par courrier permet de rejoindre les citoyens sans toutefois garantir une rétention significative des contenus transmis. Le dépliant d’information semble être un moyen insuffisant pour informer et interagir avec les citoyens et doit donc être renforcé en utilisant davantage les médias locaux.

Les interventions futures gagneraient à être évaluées afin de s’assurer que l’efficacité de la communication ne se soustrait pas, dans le feu roulant des interventions, à la seule obligation légale d’informer les individus exposés à un risque. Les objectifs de la communication sur les risques endossent clairement la pertinence d’outiller concrètement les citoyens dans leurs choix. Ainsi, l’atteinte de ces objectifs est en partie liée à la qualité de l’information et de l’interaction avec les citoyens.

La présente étude confirme l’existence d’un lien plus direct entre la municipalité et les citoyens. À ce compte, il pourrait être dans certains cas stratégique pour la santé publique de mettre davantage à profit ses partenaires, en particulier le milieu municipal qui représente un lien naturel vers les citoyens.

En somme, une réflexion quant aux limites de la responsabilité du secteur public s’impose pour un diagnostic juste des effets de la communication sur les risques. Par exemple, si la responsabilité des autorités est d’attirer et de maintenir l’attention des citoyens, de les informer avec exhaustivité et transparence sur les risques auxquels ils sont confrontés, et d’assurer un suivi évolutif avec régularité et diligence, où commence celle des citoyens ?

Pour consulter ou commander ce document, veuillez communiquer avec le centre de documentation de l’Agence de développement de réseaux locaux de services de santé et de services sociaux de Chaudière-Appalaches, au (418) 386-3558 ou visiter notre site web : www.rrsss12.gouv.qc.ca.

Référence

  1. BELZILE, Danny et Andrée FAFARD (2005). Évaluation des interventions de communication du risque associées à la présence de contaminants chimiques dans l’eau potable. Sainte-Marie, DSP (SRE), ADRLSSSS de Chaudière-Appalaches, 121 p.