Veille scientifique : Amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments transformés, mars 2025, vol. 6, n° 1

Cette veille est destinée aux acteurs de santé publique, de la filière bioalimentaire, d’organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, ainsi qu’à toute personne interpellée par la qualité nutritionnelle des aliments transformés. Les publications recensées dans cette veille ont été choisies pour leur pertinence en regard de l’amélioration de la qualité nutritionnelle globale des aliments transformés et de leur similitude au contexte québécois. Plus spécifiquement, elles abordent les thématiques de reformulation, de politiques alimentaires et de programmes de subvention.

Mise en contexte et méthodologie

L’industrialisation des systèmes alimentaires dans les pays développés a engendré une modification importante des habitudes alimentaires et de la culture culinaire au cours des dernières décennies (Monteiro et al., 2013). L’accentuation de la présence des aliments transformés et ultra-transformés (ci-après nommés aliments transformés) dans notre alimentation s’est faite au détriment des plats cuisinés à base d’aliments frais et peu transformés (Moubarac, 2017; Moubarac et al., 2014). Or, les aliments transformés sont souvent riches en gras saturés, en sucre et en sodium; des nutriments qui, lorsque consommés en excès, sont défavorables à la santé. Pour contrer cette problématique, différentes mesures visant l’amélioration spécifique de la qualité nutritionnelle des aliments transformés peuvent être mises en place.

Le gouvernement du Québec s’est engagé, par le biais de la Politique gouvernementale de prévention en santé, à travailler à l’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments transformés (MSSS, 2016). S’inscrivant dans ces travaux, cette veille périodique vise à documenter les thématiques suivantes : reformulation volontaire ou réglementaire des aliments transformés, politiques alimentaires visant l’amélioration des produits vendus au grand public et programmes de subvention visant l’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments transformés.

Pour ce numéro de veille, un processus de vigie prospective non exhaustive de la littérature scientifique et de la littérature grise a été mené du 1er juin au 1er novembre 2024. Plus précisément, les flux RSS des organismes d’expertise reconnus en santé publique ont été scrutés à l’aide de mots-clés dans le logiciel Inoreader; les infolettres d’organismes de santé publique reconnus ont aussi été consultées.

Des stratégies de recherche ont été développées pour le catalogue de Santécom et les bases de données Embase, Global Health, AgeLine, CINAHL, Environment Complete, ERIC, Health Policy Reference Center, MEDLINE Complete, Political Science Complete, Psychology and Behavioral Sciences Collection, PsycINFO, Public Affairs Index et SocINDEX with full text, dans les plateformes EBSCO Host et Ovid.

La sélection manuelle des publications, dans le but d’évaluer leur pertinence, a initialement été effectuée sur la base du titre et, par la suite, du corps de texte.

Pour les résumés présentés dans le volet analytique de ce bulletin de veille, une priorité a été accordée aux publications provenant du Québec, du Canada, ou d’un pays ou d’une juridiction avec un contexte similaire. Une priorité a également été donnée aux revues de littérature et aux publications gouvernementales portant sur l’évaluation de mesures visant l’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments transformés. L’équipe de rédaction a convenu de résumer de cinq à huit publications par bulletin. Il est à noter que la qualité scientifique des publications n’a pas été pas évaluée.

Cliquez sur l’hyperlien de la référence pour obtenir plus de détails ou pour accéder au texte intégral. Pour obtenir le texte intégral lorsque celui-ci n’est pas disponible gratuitement, adressez-vous à la bibliothèque ou au centre de documentation de votre institution.

Publications répertoriées

Cette section présente les 30 publications répertoriées qui traitent de l’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments transformés. Les références ont été classées selon les types de mesures qu’elles abordent : la réduction des teneurs en sodium, en sucre (incluant la taxation des boissons sucrées) ou en plusieurs nutriments, ou l’étiquetage nutritionnel. Les références qui abordent plusieurs mesures sont classées dans une catégorie distincte.

Réduction des teneurs en sodium

Réduction des teneurs en sucre

Réduction des teneurs en plusieurs nutriments

Étiquetage nutritionnel

Plusieurs types de mesures

Résumés des publications clés

La section qui suit présente les résumés des huit publications sélectionnées en fonction des critères énoncés dans la section Mise en contexte et méthodologie.

Sel ou sodium?

À l’international, les dénominations sel et sodium sont utilisées pour désigner la consommation de sel. Au Canada, c’est le terme sodium qui est généralement employé puisqu’il s’agit de la composante du sel de table (chlorure de sodium, NaCl) à l’origine de l’hypertension artérielle.

1 g de sel de table ≈ 400 mg de sodium

Le terme sodium est utilisé dans les résumés ci-dessous, en dépit du terme employé dans la publication originale. Les quantités de sel sont traduites en sodium, selon l’équivalence disponible ci-dessus.

À noter que, dans les résumés, « cibles de reformulation » réfère à la définition générale de la politique publique, tandis que « cibles de réduction » est utilisé pour désigner les cibles de reformulation qui visent la réduction d’un nutriment en particulier (sucre, sodium, etc.).


Résultats préliminaires des cibles volontaires de réduction du sodium des États-Unis

Contexte

Depuis 2021, les États-Unis, par le biais de la Food and Drug Administration, mettent en œuvre des cibles volontaires de réduction du sodium. Ces cibles comprennent des seuils spécifiques aux aliments du secteur de la vente au détail et aux aliments du secteur de la restauration. Les cibles publiées en octobre 2021 étaient considérées comme la phase 1, et avaient des seuils à atteindre d’ici avril 2024. Ces cibles devaient permettre de réduire l’apport en sodium de la population américaine de 3400 mg/jour à 3000 mg/jour.

En août 2024, de nouvelles cibles de réduction du sodium ont été publiées (phase 2) avec des seuils à atteindre d’ici trois ans. Celles-ci visent à réduire l’apport en sodium de la population américaine à 2750 mg/jour.

Objectifs et méthodes

Ce rapport a évalué les effets des cibles de réduction du sodium de la phase 1 sur la composition nutritionnelle des catégories d’aliments visées par ces cibles. Les analyses demeurent préliminaires, puisque les données utilisées pour l’évaluation ont été collectées en 2022, soit avant la fin de la période couverte par les cibles de la phase 1. Pour cette évaluation préliminaire, des données quant aux teneurs en sodium des aliments disponibles sur les étiquettes des produits du secteur de la vente au détail, et aux teneurs en sodium des mets disponibles sur les menus des restaurants pour le secteur de la restauration ont été collectées. Dans le document de publication des cibles de la phase 1, des données de 2010 ont été utilisées comme teneurs initiales en sodium. Pour cette évaluation préliminaire, les comparaisons ont été réalisées que pour les catégories d’aliments pour lesquelles un appariement était possible entre les données initiales (2010) et celles de suivi (2022). À noter que la significativité statistique des comparaisons réalisées dans le cadre de cette évaluation préliminaire n’a pas été évaluée.

Ce que l’on y apprend

Les résultats préliminaires provenant des données collectées en 2022 permettent de constater les progrès réalisés vers l’atteinte des cibles de la phase 1 :

  • Pour toutes les catégories d’aliments visées par les cibles, c’est-à-dire autant celles qui ont des seuils qui s’appliquent aux deux secteurs (vente au détail et restauration) ou qu’à l’un d’eux :
    • Pour 40 % des 16 catégories d’aliments visées par les cibles, les seuils visés par ces cibles étaient déjà atteints ou étaient à moins de 10 % d’être atteints;
    • Pour 11 des 16 catégories d’aliments visées par les cibles, au moins 50 % des catégories d’aliments évaluées avaient réduit leurs teneurs en sodium;
  • Pour les catégories d’aliments qui ont des seuils spécifiques pour le secteur de la vente au détail :
    • Les teneurs en sodium avaient diminué pour 62 % des catégories d’aliments, alors qu’elles avaient augmenté pour 25 % des catégories ou étaient demeurées stables pour 13 % d’entre‑elles;
  • Pour les catégories d’aliments qui ont des seuils spécifiques pour le secteur de la restauration :
    • Les teneurs en sodium avaient diminué pour 35 % des catégories d’aliments, alors qu’elles avaient augmenté pour 49 % des catégories ou étaient demeurées stables pour 16 % d’entre‑elles.

Ces données préliminaires suggèrent que c’est dans le secteur de la vente au détail qu’un nombre plus grand de réduction des teneurs en sodium a été observée. D’autres évaluations sont prévues, lorsque les données de l’année 2024 seront disponibles, afin d’évaluer les effets des cibles de réduction du sodium des États-Unis sur la totalité de la période couverte par la phase 1.

Food and Drug Administration & Center for Food Safety and Applied Nutrition (2024). Sodium Reduction in the U.S. Food Supply 2010-2022: A Preliminary Assessment of Progress.


Évaluation de l’atteinte des cibles réglementaires de réduction du sodium de l’Argentine

Contexte

L’Argentine est le premier pays d’Amérique latine à avoir mis en œuvre des cibles réglementaires de réduction du sodium afin de diminuer les apports de sa population en ce nutriment. Ces cibles ont été mises en œuvre initialement en 2014, et ont depuis été ajustées en 2019 avec des seuils à atteindre d’ici 18 mois.

Objectifs et méthodes

L’objectif de cette étude transversale était d’évaluer les teneurs en sodium des aliments transformés vendus en Argentine afin de mesurer l’atteinte des seuils visés par les cibles de réduction du sodium de ce pays.

Une collecte de données a été réalisée, en mars 2022, dans deux des principales chaînes de supermarchés de Buenos Aires. Les supermarchés inclus dans l’étude représentaient 80 % du marché de l’alimentation au détail. Les teneurs en sodium, indiquées sur le tableau de la valeur nutritive, ont été collectées, et ce, pour tous les produits alimentaires préemballés (n = 3997 produits).

L’étude visait également à comparer ces teneurs en sodium aux seuils visés par les cibles volontaires de réduction du sodium du Bureau régional pour les Amériques de l’OMS (PAHO). Ces cibles du PAHO, qui ont des seuils à atteindre d’ici 2022 et 2025, peuvent être utilisées comme guide par les pays des Amériques. Les cibles volontaires du PAHO visent davantage de catégories d’aliments que les cibles réglementaires de l’Argentine.

Ce que l’on y apprend

En comparant les teneurs en sodium mesurées aux seuils visés par les cibles réglementaires de l’Argentine :

  • 6,3 % (n = 48/760) des produits évalués avaient des teneurs qui excédaient les seuils visés;
  • Pour plusieurs catégories d’aliments (n = 15/33), tous les produits évalués avaient des teneurs en sodium inférieures aux seuils visés par ces cibles;
  • Les deux catégories d’aliments qui avaient la plus grande proportion de produits dont les teneurs en sodium excédaient les seuils visés étaient les pains à grains entiers (n = 6/29; 20,7 %) et les mayonnaises (n = 6/27; 22,2 %);
  • En comparant avec l’ensemble des produits (n = 3997) pour lesquels les teneurs en sodium ont été collectées, des catégories d’aliments dont les teneurs médianes en sodium étaient élevées n’étaient pas visées par les cibles de l’Argentine.

Lorsque les teneurs en sodium mesurées étaient comparées aux seuils visés par les cibles volontaires du PAHO :

  • 51,1 % (n = 741/1449) des produits évalués avaient des teneurs qui excédaient les seuils visés pour l’année 2022 de ces cibles;
  • Alors qu’il s’agissait de 57,9 % (n = 840/1449) des produits évalués qui avaient des teneurs qui excédaient les seuils visés pour l’année 2025 de ces cibles.

Les auteurs concluent en recommandant de mettre à jour les cibles réglementaires de réduction du sodium de l’Argentine afin qu’elles visent plus de catégories d’aliments, et que ses seuils soient plus stricts. Ils mentionnent également l’importance d’une évaluation continue de l’atteinte de ces cibles.

Guarnieri, L., Castronuovo, L., Flexner, N., Yang, Y., L’Abbe, M. R., & Tiscornia, V. (2024). Monitoring sodium content in processed and ultraprocessed foods in Argentina 2022: Compliance with National Legislation and Regional Targets. Public Health Nutrition, 27(1), e193.


Analyses des facteurs contribuant à la réduction de la densité de sucre dans les aliments et boissons achetés en Grande‑Bretagne

Contexte

Le Royaume-Uni a lancé, en 2016, son programme visant le sucre qui a pour but d’encourager l’industrie à améliorer la valeur nutritive de ses produits, et les consommateurs à faire des choix plus sains. Ce programme comprend une taxe sur les boissons avec sucres ajoutés et des cibles volontaires de réduction du sucre. La taxe est composée de paliers de taxation selon la teneur en sucre, ce qui incite l’industrie à reformuler leurs boissons. Les cibles de réduction du sucre visent plusieurs catégories d’aliments dans le but de réduire de 20 % les teneurs en sucre des produits visés. Dans le cadre de ces cibles, trois options ont été proposées à l’industrie, soit : 1) reformuler les produits pour réduire leurs teneurs en sucre; 2) réduire le nombre de calories et/ou la taille des portions des produits susceptibles d’être consommés en une seule occasion; et/ou 3) orienter les achats des consommateurs vers des produits à faibles teneurs en sucres ajoutés ou sans sucres ajoutés.

Objectifs et méthodes

L’objectif de cette étude était d’identifier quels facteurs ont conduit à la réduction de la densité de sucre dans les aliments et boissons achetés en Grande-Bretagne. Les facteurs considérés concernaient l’amélioration de la valeur nutritive de l’offre alimentaire (facteurs « offre » : 1) reformulation de produits existants ou 2) renouvellement de produits par l’introduction de nouveaux produits ou le retrait de certains produits), et concernaient l’évolution des ventes de produits à plus faibles teneurs en sucre (facteur « demande »).

Des données d’achats alimentaires ont été utilisées pour réaliser cette étude, et ce, comme approximation de la consommation alimentaire. Ce sont les données d’achats et de teneurs en sucre de la société d’étude de marché Kantar, qui recrute un échantillon représentatif des ménages anglais (moyenne annuelle de 30 000 ménages), qui ont été utilisées. Chaque ménage de ce panel scanne le code-barres des produits qu’ils achètent. Ces données sont, par la suite, appariées aux données de teneurs en sucre qui sont collectées par l’équipe de Kantar.

Pour les analyses, les données agrégées reflétant les ventes annuelles totales de chaque produit ont été utilisées pour estimer les changements de la densité de sucre pour l’ensemble de la population et leurs facteurs (« offre » ou « demande »), et la densité moyenne de sucre des produits achetés a été obtenue en pondérant la densité de sucre de chaque produit par le volume de vente respectif. Ces analyses ont porté sur les données de 2015 et de 2019.

Les données des panels ont également été désagrégées afin de permettre des analyses selon le statut socioéconomique. Pour ce volet des analyses, ce sont les données de 2015 et de 2018 qui ont été utilisées, et seulement pour trois catégories : 1) « boissons avec sucres ajoutés », qui correspond uniquement aux boissons visées par la taxe, 2) « toutes les boissons non alcoolisées », qui correspond à l’eau et au jus purs à 100 %, qui ne sont pas visées par la taxe, ainsi qu‘aux boissons taxées, et 3) « céréales à déjeuner », une catégorie visée par les cibles de réduction du sucre.

Ce que l’on y apprend

Cette étude a permis de dégager les constats suivants :

  • De 2015 à 2019, la densité moyenne de sucre des produits achetés a diminué, passant de 7,4 à 6,8 g/100 g, et ce, autant pour les produits taxés (0,4 à 0,3 g/100 g), pour ceux visés par les cibles (2,5 à 2,3 g/100 g) et pour ceux qui ne sont pas visés par la taxe ou les cibles (4,5 à 4,2 g/100 g);
  • La reformulation a été identifiée comme le facteur principal pouvant expliquer la diminution de la densité de sucre observée pour les produits visés par les cibles (- 2 %; 25,4 à 24,8 g/100 g). Pour les boissons taxées, les trois facteurs ont contribué à la diminution de la densité de sucre observée (- 41 %; 3,7 à 2,2 g/100 g), mais les effets de la reformulation et du renouvellement de produits étaient plus importants;
  • Selon les analyses en fonction du statut socioéconomique, la réduction du sucre acheté provenant des céréales à déjeuner a été plus marquée chez les ménages les plus défavorisés, alors qu’aucun gradient social n’a été observé pour les boissons taxées.

Les auteurs concluent que la taxation et les cibles de réduction du sucre sont complémentaires, et que leur combinaison au sein d’un programme d’amélioration de l’offre alimentaire accroit les chances d’observer une amélioration de la qualité de l’alimentation.

Gressier, M., Frost, G. S., Hill, Z., Li, D., Olney, J., Pineda, E., Targett, V., Young, M., & Sassi, F. (2024). Supply- and demand-side drivers of the change in the sugar density of food purchased between 2015 and 2018 in Great Britain. British Journal of Nutrition, 1‑12.


L’effet de taxes d’accise municipales visant les boissons sucrées sur l’indice de masse corporelle des jeunes

Contexte

Plusieurs taxes d’accise municipales visant les boissons sucrées ont été mises en œuvre ces dernières années dans le but de réduire la consommation de ce type de boissons, et ultimement, la prévalence des maladies cardiométaboliques. L’effet des taxes sur les achats alimentaires des boissons taxées et sur leur consommation a été documenté. Toutefois, leur effet potentiel sur l’indice de masse corporelle (IMC) des jeunes demeure peu connu.

Objectifs et méthodes

Cette étude avait pour objectif d’évaluer l’effet des taxes municipales visant les boissons sucrées sur l’IMC des jeunes. Pour ce faire, les données d’une étude de cohorte active de 2009 à 2020 ont été utilisées. Le groupe avec intervention était composé de quatre villes de la Californie (Albany, Berkeley, Oakland et San Francisco), où une taxe municipale visant les boissons sucrées est en place, alors que le groupe contrôle était composé de 40 villes californiennes similaires sur le plan sociodémographique où il n’y a pas ce type de taxe. Chaque ville où il y a une taxe municipale visant les boissons sucrées a été appariée à dix villes sans taxe. Étant donné que les taxes dans ces quatre villes ont été implantées à des moments différents, pour Albany, Oakland, San Francisco et leurs villes contrôles, la période prétaxe était de 2010 à 2016, et la période post-taxe était de 2017 à 2020. Pour Berkeley et ses villes contrôles, la période prétaxe était de 2009 à 2014, et la période post-taxe était de 2015 à 2020.

La cohorte regroupait des participants âgés de 2 à 19 ans lors de leur entrée dans l’étude, qui vivaient dans l’une des villes étudiées et pour lesquels au moins une valeur mesurée d’IMC prétaxe et une valeur mesurée d’IMC post-taxe étaient disponibles. Les analyses ont porté sur la comparaison des percentiles d’IMC spécifiques à l’âge et au sexe, et sur la comparaison du pourcentage de jeunes en surpoids ou présentant de l’obésité entre les villes avec et sans taxe.

Ce que l’on y apprend

Les résultats permettent de constater que :

  • L’étude a compté 44 771 jeunes habitant dans les villes où une taxe visant les boissons sucrées était en place (groupe intervention), et 345 428 jeunes habitant dans les villes contrôles;
  • Plusieurs caractéristiques, comme l’âge moyen, le pourcentage de femmes, les percentiles d’IMC appariés selon l’âge et le sexe, ainsi que les pourcentages de jeunes en surpoids ou présentant de l’obésité, étaient similaires en période prétaxe entre les villes exposées et les villes contrôles. Toutefois, il y avait des différences démographiques pour les répartitions raciales et ethniques. Dans les villes contrôles de Berkeley, San Francisco et Oakland, les jeunes hispaniques étaient surreprésentés, alors que ceux d’origine noire étaient sous-représentés dans les villes contrôles de Berkeley et Oakland;
  • En comparant les périodes prétaxe et post-taxe, le percentile moyen d’IMC a diminué de façon significative dans les quatre villes exposées, comparativement aux villes contrôles (- 1,64 point de pourcentage). Cependant, ce résultat ne s’est pas traduit sur la proportion de jeunes classés en surpoids ou en obésité, puisqu’il n’y a pas eu de différence significative pour cette proportion entre les villes exposées et les villes contrôles;
  • Entre les périodes prétaxe et post-taxe, pour certains sous-groupes des participants de la cohorte, des résultats significatifs ont été observés. Par exemple :
    • Dans les villes exposées, comparativement aux villes contrôles, le percentile moyen d’IMC a diminué de façon significative pour les plus jeunes participants de la cohorte (- 2.06 point de pourcentage pour les 2 à 5 ans, et - 2.79 point de pourcentage pour les 6 à 11 ans), pour les garçons (- 1.98 point de pourcentage), pour les jeunes d’origine asiatique (- 1.63 point de pourcentage), et pour ceux d’origine caucasienne (- 2.58 point de pourcentage);
    • Pour les villes de Berkeley et de San Francisco, comparativement à leurs villes contrôles, des résultats statistiquement significatifs ont été observés pour le percentile moyen d’IMC (- 3,55 et - 1,97 points de pourcentage respectivement), et pour le pourcentage des jeunes classés en surpoids ou en obésité (- 4,44 et - 2,56 points de pourcentage respectivement).

Parmi les limites, les auteurs soulignent qu’il n’est pas possible de savoir si les résultats obtenus découlent d’une réduction de la consommation des boissons taxées, d’autres mesures ou interventions liées à la taxe ou d’autres mécanismes potentiels dans la chaîne causale. En conclusion, les auteurs indiquent que les taxes d’accise municipales visant les boissons sucrées sont associées à un percentile d’IMC plus faible chez les jeunes. Ainsi, les taxes visant les boissons sucrées pourraient être mises en œuvre comme politiques publiques dans le but de réduire la prévalence de surpoids et d’obésité chez les jeunes.

Young, D. R., Hedderson, M. M., Sidell, M. A., Lee, C., Cohen, D. A., Liu, E. F., Barton, L. J., Falbe, J., Inzhakova, G., Sridhar, S., Voorhees, A. C., & Han, B. (2024). City-Level Sugar-Sweetened Beverage Taxes and Youth Body Mass Index Percentile. JAMA Network Open, 7(7), e2424822.


Les effets des politiques et interventions volontaires et réglementaires non fiscales visant la reformulation des aliments et boissons

Contexte

La reformulation, c’est-à-dire l’amélioration de la valeur nutritive des aliments et boissons, est une avenue utilisée par plusieurs pays par la mise en œuvre de politiques et interventions volontaires et réglementaires. Les politiques et interventions fiscales, comme la taxe visant les boissons sucrées, se sont avérées efficaces pour encourager l’industrie à reformuler leurs produits. Celles de nature non fiscale peuvent être moins difficiles à mettre en œuvre, et ce, particulièrement pour les politiques et interventions volontaires qui ne nécessitent pas de changement législatif. Toutefois, aucune revue de la littérature n’a encore examiné de façon systématique les effets des politiques et interventions non fiscales sur la reformulation.

Objectifs et méthodes

Cette revue systématique de la littérature avait comme objectif d’évaluer les effets des politiques et interventions volontaires et réglementaires non fiscales visant la reformulation des aliments et boissons sur la composition nutritionnelle des produits visés, et ce, pour plusieurs nutriments. Pour ce faire, dix bases de données internationales et neuf bases de données de littérature grise ont été consultées pour identifier des études publiées de 2013 à 2023. Les résultats ont été analysés en fonction du sens des effets rapportés (amélioration, détérioration, effet mixte ou pas d’effet statistiquement significatif), et de façon narrative par types d’interventions.

Ce que l’on y apprend

La stratégie de recherche a permis d’identifier 77 études répondant aux critères de sélection. Ces études portaient sur 100 politiques et interventions non fiscales provenant de 19 pays.

Les auteurs ont dégagé les principaux constats suivants :

  • Les politiques et interventions non fiscales étaient majoritairement volontaires (n = 67 volontaires et n = 33 réglementaires);
  • Elles visaient en ordre décroissant : le sodium (n = 56), le sucre (n = 38), les calories (n = 30), les gras saturés (n = 29), les acides gras trans (n = 13), les fibres (n = 13), les lipides totaux (n = 11), les protéines (n = 11), les succédanés du sucre (n = 5) et les vitamines et micronutriments (n = 2);
  • Les cibles de reformulation étaient le type de politiques et d’interventions le plus souvent rapporté (n = 44 cibles volontaires de reformulation, n = 23 étiquetage sur le devant des emballages, n = 8 normes publicitaires, n = 7 étiquetage sur le dos des emballages, n = 7 étiquetage des menus, n = 4 cibles réglementaires de reformulation, n = 4 stratégies de reformulation menées par l’industrie, n = 2 interdiction de méthodes de cuisson et n = 1 critères nutritionnels d’approvisionnement dans les écoles);
  • Des 17 études qui ne portaient que sur des politiques et interventions réglementaires, 15 rapportaient des effets positifs (n = 15 amélioration, n = 0 détérioration, n = 0 effet mixte et n = 2 pas d’effet);
  • Des 53 études qui ne portaient que sur des politiques et interventions volontaires, 42 rapportaient des effets positifs (n = 42 amélioration, n = 3 détérioration, n = 5 effet mixte et n = 3 pas d’effet);
  • La majorité des études étaient de faible qualité en raison des devis observationnels.

En somme, il est indiqué par les auteurs que, malgré l’absence de causalité en raison des devis des études analysées, il est possible de noter que les politiques et interventions non fiscales peuvent contribuer à améliorer la composition nutritionnelle des aliments et boissons. Les interventions réglementaires semblent plus efficaces que celles volontaires.

Packer, J., Michalopoulou, S., Cruz, J., Dhar, D., Stansfield, C., Kaczmarska, H., Viner, R. M., Mytton, O., & Russell, S. J. (2024). The Impact of Non-Fiscal Mandatory and Voluntary Policies and Interventions on the Reformulation of Food and Beverage Products: A Systematic Review. Nutrients, 16(20), Article 20.


Références

  1. Monteiro, C. A., J.–C. Moubarac, G. Cannon, S. W. Ng et B. Popkin (2013). « Ultra-processed products are becoming dominant in the global food system », Obesity reviews, vol. 14, n° S2, p. 21–28.
  2. Moubarac, J.-C. (2017). « Ultra-processed foods in Canada: consumption, impact on diet quality and policy implications ». Montréal TRANSNUT, Université de Montréal.
  3. Moubarac, J.-C., M. Batal, A. P. B. Martins, R. Claro, R. B. Levy, G. Cannon et C. Monteiro (2014). « Processed and ultra-processed food products: consumption trends in Canada from 1938 to 2011 », Canadian Journal of Dietetic Practice and Research, vol. 75, n° 1, p. 15‑21.
  4. MSSS (2016). « Politique gouvernementale de prévention en santé : un projet d’envergure pour améliorer la santé et la qualité de vie de la population ».

Pour des questions ou des commentaires concernant cette veille scientifique, veuillez contacter Julie Maltais-Giguère à [email protected]

Les numéros précédents sont disponibles sur le site de l’INSPQ à l’adresse www.inspq.qc.ca/veille-scientifique-amelioration-de-la-qualite-nutritionnelle-des-aliments-transformes

Cette veille est réalisée grâce à la participation financière du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.

Rédactrice

Julie Maltais-Giguère, Dt.P., M. Sc., conseillère scientifique 
Unité Milieux de vie inclusifs, sains et sécuritaires 
Direction du développement des individus et des communautés

Avec la collaboration de : 
Aurélie Maurice, M.D., M. Sc., FRCPC, médecin spécialiste en santé publique et médecine préventive
Marie-Claude Paquette, Dt.P., Ph. D., conseillère scientifique spécialisée
Claudia Savard, Dt.P., Ph. D., conseillère scientifique spécialisée
Unité Milieux de vie inclusifs, sains et sécuritaires 
Direction du développement des individus et des communautés

Sous la coordination de : 
Maryse Caron, cheffe d’unité scientifique 
Unité Milieux de vie inclusifs, sains et sécuritaires 
Direction du développement des individus et des communautés

Relecture : 
Sarah Mei Lapierre, agente administrative
Direction du développement des individus et des communautés