Veille scientifique en santé buccodentaire, été 2023

Publications récentes

Nouvelles publications scientifiques d’intérêt

Eaton, K., Yusuf, H. et Vassallo, P. « Editorial: The WHO Global Oral Health Action Plan 2023-2030 ». Community Dental Health 40, no 2 (30 mai 2023): 68‑69 (libre accès).

Franzén, C. « Dental Professionals Participating in a Home Visiting Programme for First-Time Parents ». Community Dental Health 40, no 2 (30 mai 2023): 97‑102.

Galante, M. L., Cornejo-Ovalle, M. A., Otálvaro-Castro, G. J., Patiño-Lugo, D. F., Pischel, N., Giraldes, A. I. et Carrer, F. C. d. A. « Oral Health Policies and Decision-Making Process in Brazil, Colombia and Chile ». Brazilian Oral Research 37 (29 mai 2023): e051 (libre accès).

Rochmah, T. N., Ramadhani, A., Bramantoro, T., Permata, L. G. et Tun, T. Z. « Systematic Review on Cost-Effectiveness Analysis of School-Based Oral Health Promotion Program ». PLOS ONE 18, no 4 (20 avril 2023): e0284518 (libre accès).

Sirivichayakul, P., Jirarattanasopha, V., Phonghanyudh, A., Tunlayadechanont, P., Khumsub, P. et Duangthip, D. « The Effectiveness of Topical Fluoride Agents on Preventing Development of Approximal Caries in Primary Teeth: A Randomized Clinical Trial ». BMC Oral Health 23, no 1 (2 juin 2023): 349 (libre accès).

Yusuf, H., Vassallo, P. et Eaton, K. « The WHO Action Plan for Oral Health - How Can the EADPH Contribute - Opportunities and Challenges ». Community Dental Health 40, no 2 (30 mai 2023): 70‑74.

Résumés d’articles

Promotion et prévention de la carie dentaire

Promotion de la santé buccodentaire en milieu scolaire par des intervenants non dentaires

Narayan, V., Thomas, S, Gomez, M. s. S., Bhaskar, B., V. et Rao, A., K. « Auxiliary Delivered School Based Oral Health Promotion among 12–14-Year-Old Children from a Low Resource Setting – A Cluster Randomized Trial ». Journal of Public Health Dentistry 83, no 2 (2023): 177‑84.

Contexte

En région éloignée, le déploiement des professionnels dentaires en milieu scolaire demeure ardu considérant la rareté de la main-d’œuvre. La formation des enseignants et des infirmières scolaires pour offrir un programme de santé buccodentaire devient alors une possibilité envisageable.

Objectifs et méthodologie

Évaluer les effets d’un programme de promotion de la santé buccodentaire, dispensé par des intervenants non dentaires, chez des élèves de 12 à 14 ans. Cette étude randomisée s’est déroulée dans quatre écoles situées en zones rurales de l’Inde. Les 770 participants étaient issus de familles défavorisées (revenu annuel approximatif par habitant de la population cible de 1708 USD).

Dans le groupe intervention, un rince-bouche fluoré était administré à l’école une fois par semaine pendant un an. Puis, les enseignants dispensaient un cours structuré en éducation à la santé buccodentaire, répété tous les trois mois. Enfin, les infirmières scolaires effectuaient un dépistage dentaire tous les six mois. Les élèves ayant besoin de soins dentaires étaient dirigés vers l’établissement public de soins dentaires le plus proche. Les participants du groupe témoin ont subi un dépistage au début de l’étude et ont été référés au besoin.

Un questionnaire autoadministré recueillait les connaissances, l’attitude et les pratiques (CAP) de santé buccodentaire au début et après un an auprès des élèves. En même temps, des dentistes préalablement formés et calibrés ont évalué l’indice d’hygiène buccale simplifié (OHIS), le CAOD/F et la présence de saignements gingivaux.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

Après un an, les CAP étaient significativement améliorés dans le groupe intervention par rapport au groupe témoin. De même, l’amélioration de l’OHIS et du saignement gingival était meilleure dans le groupe intervention (p < 0,001). Cependant, malgré une augmentation nette du CAOD/F supérieure dans le groupe témoin, la différence n’était pas statistiquement significative comparativement au groupe intervention. Ainsi, l’inclusion d’intervenants non dentaires déjà présents dans l’école peut contribuer à l’atteinte de la santé buccodentaire chez les enfants.

Limites

Les effets de chacune des activités n’ont pas pu être déterminés, car le groupe intervention a reçu l’ensemble du programme. De surcroît, la période de suivi relativement courte pourrait avoir influencé les résultats.


Allaitement prolongé et carie dentaire chez les enfants d’âge préscolaire

Sæthre, H. B., Wang, N. J. et Wigen, T. I. « Prolonged Breastfeeding and Dental Caries in Preschool Children ». Acta Odontologica Scandinavica, 21 mai 2023, 1‑6 (libre accès).

Contexte

Le lait maternel est l’une des premières sources de sucre auxquelles les enfants sont exposés. Or, l’allaitement maternel est fortement recommandé pour un nouveau-né en raison de ses nombreux avantages tels que la protection contre les infections, le développement du système immunitaire et le développement de l’enfant.   

Objectifs et méthodologie

Évaluer la relation entre l’allaitement maternel réalisé au cours des six à dix-huit premiers mois de vie et la prévalence de la carie dentaire à l’âge de cinq ans. Cette étude longitudinale rétrospective a été menée à partir d’une banque de données provenant d’une étude de cohorte des naissances norvégiennes. Un total de 1088 enfants ont été examinés par un hygiéniste dentaire pour l’évaluation de l’expérience carieuse au stade dentinaire. L’examen était complété par la prise de radiographies lorsque c’était nécessaire. Parallèlement à cela, les chercheurs ont examiné les résultats des questionnaires remplis par les parents alors que l’enfant avait dix-huit mois. Les informations obtenues portaient sur la durée de l’allaitement, le type de liquide consommé durant la nuit, la fréquence de consommation de boissons sucrées durant le jour ainsi que la fréquence du brossage des dents et la prise de comprimés de fluorure.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

Les résultats démontrent que l’allaitement maternel poursuivi jusqu’à l’âge de dix-huit mois n’est pas associé avec le développement de la carie dentaire à l’âge de cinq ans. Cependant, les enfants qui, à dix-huit mois, consommaient durant la nuit des liquides sucrés ou du lait non maternisé étaient 2,4 fois plus susceptibles d’avoir des lésions carieuses au stade dentinaire à l’âge de cinq ans que ceux qui n’avaient rien bu ou utilisés que de l’eau (OR = 2,4; IC 95 % : 1,4 à 4,1). De plus, ceux qui brossaient leurs dents moins de deux fois par jour avaient 2,4 fois plus de chance de développer la carie au stade dentinaire à cinq ans que ceux qui brossaient leurs dents deux fois par jour (OR = 2,4; IC 95 % : 1,5 à 3,9).

Limites

Approximativement 55 % des participants ont abandonné l’étude ce qui constitue un biais d’attrition pouvant conduire à une sous ou sur estimation des résultats.

Interventions non ou minimalement invasives

Prédiction de la carie et indication de scellement des puits et fissures

Emmanuelli, B., Knorst, J. K., Menegazzo, G. R., Mendes, F. M. et Ardenghi, T. M. « Dental Caries Prediction and the Indication of Pit and Fissure Sealant in Children First Permanent Molars: A Prospective Study ». Journal of Dentistry 135 (1er août 2023): 104557.

Contexte

Bien que le scellement des puits et fissures soit efficace, les critères pour son indication connaissent encore des lacunes. Ainsi, la reconnaissance des facteurs déterminant un risque plus élevé de carie pourrait être utilisée pour orienter les stratégies préventives. En ce sens, l’évaluation de la précision des facteurs influençant la pose des scellants est pertinente.

Objectifs et méthodologie

Identifier les prédicteurs possibles de l’incidence de la carie sur les faces occlusales des premières molaires permanentes. Aussi, évaluer la précision et l’efficacité de ces prédicteurs pour orienter l’indication de la pose de scellants chez les enfants. Cette étude de cohorte prospective a été menée au Brésil auprès de 639 enfants âgés de 12 à 59 mois.

Des données socioéconomiques et psychosociales ont été recueillies par un questionnaire structuré auquel ont répondu les parents ou les tuteurs. Des dentistes formés et calibrés ont évalué la carie selon les critères de l’ICDAS. L’évaluation de suivi a eu lieu après 7 à 8 ans, les enfants étant âgés de 8 à 13 ans.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

Les résultats ont démontré que le faible revenu familial, le faible niveau d’éducation de la mère, la mauvaise perception parentale envers la santé buccodentaire de l’enfant et l’expérience de carie élevée confèrent des risques similaires pour l’incidence de la carie sur les premières molaires permanentes. Cependant, ces critères avaient une faible précision, identifiant incorrectement les enfants développant de la carie qui auraient dû recevoir des scellants.

Limites

Seulement certaines variables pour prédire le risque de carie et indiquer la pose des scellants ont été étudiées. Également, les habitudes de vie des participants n’ont pas été prises en compte dans cette étude. Sachant que la carie est une maladie d’origine multifactorielle, il est possible que ces omissions aient influencé les résultats.


Approches non opératoires pour traiter des lésions carieuses actives de l’émail

Arduim, A. d. S., Gonçalves, D. P., Scherer, M. M., Araújo, F. B. d., Lenzi, T. L. et Casagrande, L. « Effectiveness of Non-Operative Approaches in Active Enamel Carious Lesions: A Retrospective Longitudinal Study ». Brazilian Oral Research 37 (29 mai 2023): e057 (libre accès).

Contexte

Le brossage des dents avec un dentifrice fluoré ou encore l’application de vernis fluoré sont des interventions non invasives qui peuvent contribuer à limiter la progression de la carie débutante. À l’instar des mesures précédentes, l’utilisation des scellants dentaires offre une solution non seulement efficace, mais également respectueuse de l’intégrité de la structure dentaire par son approche dite micro-invasive.

Objectifs et méthodologie

L’objectif de cette étude longitudinale rétrospective visait à évaluer l’efficacité des interventions non invasives et micros invasives pour le traitement des caries débutantes chez des enfants à haut risque. Au cours de l’année scolaire 2017-2018, 105 élèves âgés en moyenne de 8,3 (± 2,4) ans ont été traités pour des lésions carieuses au niveau de l’émail (ICDAS1-3) totalisant 365 caries actives. Pour le traitement des lésions, trois approches ont été utilisées : approche non invasive (trois applications topiques de fluorure [1,23 % gel APF] durant une semaine ou instructions d’hygiène buccale ou conseils alimentaires), approche micro invasive (scellants) et aucune intervention.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

Après un suivi moyen de 6,5 (± 4,1) mois, la prévalence des lésions carieuses arrêtées était 1,43 fois plus élevée chez les enfants de ≥ 6 ans que chez ceux de < 6 ans (PR = 1,43 [IC 95 % : 1,00 à 2,03; p = 0,04]). De plus, une prévalence plus élevée de lésions carieuses actives après le traitement était associée à une plus grande quantité de plaque visible [PR = 0,99; CI 95 % : 0,98 à 0,99; p = 0,03]. Cependant, il n’y avait aucune différence statistiquement significative entre les traitements non invasifs et micros invasifs sur la prévalence du contrôle des lésions carieuses.

Limites

Le délai de suivi est relativement court et les participants avaient accès à de l’eau fluorée (0,8 mg/L) ce qui peut avoir eu pour effet de surestimer les résultats sur la prévalence des lésions carieuses. Outre ces deux limites, il existe un biais de saisie dans le rapport des résultats à l’égard de la plaque dentaire ce qui peut influencer la validité de la conclusion des chercheurs.

Fluorures et fluoration


Comprendre les comportements d’hésitation et de refus du fluorure topique

Leung, E., Kerr, D., Askelson, N. et Chi, D. L. « Understanding Topical Fluoride Hesitancy and Refusal Behaviors through the Extended Parallel Process Model and Health Belief Model ». Journal of Public Health Dentistry 83, no 1 (2023): 3‑8.

Contexte

La compréhension de la façon dont les parents prennent des décisions liées au fluorure pour leurs enfants est limitée. À cet effet, certains modèles peuvent informer sur les déterminants comportementaux inhérents au refus du fluorure topique. Ces modèles pourraient éventuellement contribuer au développement d’interventions comportementales pour améliorer les communications concernant ce service préventif.

Objectifs et méthodologie

Comprendre les comportements de prise de décision des parents concernant l’utilisation du fluorure topique pour leurs enfants. Cette étude qualitative examine les construits du modèle étendu de processus parallèles (extended parallel process model) et du modèle de croyance en la santé (health belief model). Des entrevues semi-structurées ont été menées auprès de 56 parents hésitants ou ayant refusé le fluorure topique pour leur enfant.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

La plupart des parents reconnaissaient que la carie est préoccupante, mais ne croyaient pas que leur enfant y était susceptible. Les parents comprenaient le rôle préventif du fluorure cependant, ils pensaient que son efficacité était faible chez leur enfant. D’ailleurs, ils préféraient les autres moyens pour réduire le risque de carie, comme avoir une bonne hygiène et une saine alimentation. Presque tous les parents avaient des inquiétudes au sujet du fluorure topique et souvent, les conséquences perçues l’emportaient sur les avantages potentiels.

Limites

Étant donné le petit échantillon, les résultats doivent être interprétés avec prudence. Aussi, les chercheurs n’ont pas évalué le risque de carie des enfants. Cette limite rend difficile l’interprétation des résultats de la susceptibilité à la carie perçue par leurs parents. Enfin, l’étude ne tient pas compte de l’interaction des influences communautaires et individuelles sur les décisions concernant le fluorure topique.


Lois touchant la santé dentaire et les besoins de traitement

Levy, D. H., Sgan-Cohen, H., Solomonov, M., Shemesh, A., Ziv, E., Glassberg, E. et Yavnai, N. « Association of Nationwide Water Fluoridation, Changes in Dental Care Legislation, and Caries-Related Treatment Needs: A 9-Year Record-Based Cross-Sectional Study ». Journal of Dentistry 134 (1er juillet 2023): 104550.

Contexte

Le gouvernement israélien a instauré la fluoration obligatoire de l’eau en 2002, mais il l’a abandonnée en 2014 lors d’un changement législatif. Entretemps, en 2010, une loi ajoutant les soins dentaires au panier de services gratuits pour les enfants a été adoptée.

Objectifs et méthodologie

Comparer les besoins de traitement liés à la carie chez les adultes non exposés à la fluoration de l’eau et n’ayant pas eu accès aux soins dentaires gratuits pendant l’enfance, avec ceux ayant été exposés uniquement à la fluoration de l’eau ou de façon concomitante avec l’accès aux soins dentaires gratuits. Cette étude écologique a été menée auprès de 34 450 recrues militaires nées de 1985 à 2003.

Le groupe A, né après 2001, a été exposé à l’eau fluorée et a eu accès aux soins dentaires gratuits. Le groupe B, né de 1994 à 2000, a seulement été exposé à l’eau fluorée. Enfin, le groupe C, né avant 1994, n’a bénéficié d’aucune de ces mesures.

Les données ont été extraites à partir des plans de soins dentaires établis par les dentistes militaires lors des examens préalables obligatoires au moment du recrutement. Les dents nécessitant des restaurations, des traitements de canal ou des extractions pour cause de carie constituaient les besoins de traitement liés à la carie.

Qu’est-ce qu’on y apprend?

Les participants du groupe C étaient plus susceptibles d’avoir des besoins de traitement comparativement à ceux du groupe A (OR = 1,53; IC 95 % : 1,44-1,63). Cependant, il n’y avait aucune différence entre les groupes B et A (OR = 0,93; IC 95 % : 0,86-1,00). Ainsi, l’eau fluorée était corrélée à une diminution des besoins de traitement, mais la gratuité des soins ne l’était pas.

Limites

L’échantillon était constitué de jeunes recrues militaires, incluant peu de femmes. Par conséquent, cette étude n’est pas représentative de la population générale des adultes en Israël.

La veille scientifique sur les pratiques préventives contre la carie chez les jeunes est réalisée par l’équipe Santé buccodentaire, à la demande du ministère de la Santé et des Services sociaux. Publiée tous les trois mois, elle résume les publications scientifiques les plus pertinentes et récentes afin d’actualiser les connaissances des autorités et du personnel exerçant en santé dentaire publique.
Elle ne reflète pas une prise de position ni l’appui d’une méthode, d’une pratique, d’une intervention ou d’un programme particulier. Pour plus d’informations, consultez la méthodologie de la veille en santé buccodentaire.