Surveillance des incidents et accidents liés au retraitement des dispositifs médicaux au Québec : résultats 2020-2021

Faits saillants

  • En 2020-21, un total de 2 402 événements indésirables liés au retraitement des dispositifs médicaux (RDM) ont été rapportés, ce qui représente une réduction de 40 % par comparaison à l’année précédente.
  • Parmi les événements rapportés :
    • 2 165 (90 %) étaient des incidents et 237 (10 %) des accidents;
    • 57 % des accidents déclarés provenaient de deux établissements parmi les 34 possédant des unités de RDM;
    • 7 accidents ont impliqué plus d’un usager (de 2 à 12 usagers);
  • Comme pour les années précédentes, des lacunes au niveau de trois étapes de la chaîne de retraitement ont été à l’origine de la majorité des événements indésirables rapportés :
    • 35 % (n = 840) des incidents et accidents sont associés à des lacunes au niveau de l’assemblage;
    • 29 % (n = 697) des incidents et accidents sont associés à des lacunes au niveau de l’emballage;
    • 33 % (n = 79) des accidents sont associés au recours à la stérilisation rapide.

Entre le 1er avril 2020 et le 31 mars 2021, 2 684 déclarations en lien avec le RDM ont été complétés (par le biais du formulaire AH-223-1 avec section 4-D cochée)1 . De ce nombre, 2 402 (89 %) ont fait l’objet d’une analyse détaillée RARDM (par le biais du formulaire AH-223-2-RDM) (Figure 1).

Par comparaison à l’année précédente, le nombre d’événements indésirables rapportés en 2020-21 a été réduit de 40 %. Ceci pourrait être principalement expliqué par le délestage massif des activités régulières aux blocs opératoires en lien avec la pandémie de la COVID-19.

Figure 1 - Nombre d’incidents et accidents liés au RDM au Québec, 2018-2019 à 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Parmi les événements rapportés, 90 % étaient des incidents de gravité A ou B, 10 % étaient des accidents sans conséquences sur les usagers de gravité C ou D et un accident dont le niveau de gravité n’a pas été déterminé2 (Figure 2).

Figure 2 - Nombre d’incidents et accidents liés au RDM selon l’échelle de gravité, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Le nombre d’événements indésirables a fluctué d’un mois à l’autre (Figure 3). L’augmentation observée entre septembre et novembre 2020 reflète la reprise des activités aux blocs opératoires à la fin de l’été. Tandis que le retour au délestage en décembre 2020, suite à la monté des hospitalisations dues à la COVID-19, explique la baisse du nombre d’événements rapportés entre décembre 2020 et février 2021.

Figure 3 - Nombre d’incidents et accidents liés au RDM selon le mois de la survenue de l’événement, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

En 2020-21, un peu plus de 32 % des événements indésirables déclarés provenaient du même établissement (Centre hospitalier universitaire de Québec-Université Laval (CHU de Québec - Université Laval) (Tableau 1). À noter que la variation interétablissement du nombre d’événements rapportés pourrait entre autre refléter la variation dans le volume d’activité d’un établissement à l’autre.

Au total, 237 événements accidents ont été rapportés, dont 58 % provenaient de deux établissements (CHU de Québec - Université Laval et CISSS de Chaudière-Appalaches). La proportion d’accidents (par rapport à l’ensemble des événements) a varié entre 0 % à plus de 70 % selon l’établissement. Ces variations sont similaires à celles observées au cours des années précédentes et pourraient suggérer une sous-déclaration des événements indésirables différente d’un établissement à l’autre. De plus, parmi les 34 établissements possédant une unité de RDM, cinq dont trois n’ayant pas de répondant d’établissement, n’ont rapporté aucun événement indésirable (Tableau 1).

Tableau 1 Nombre d’incidents et accidents liés au RDM par établissement, 2020-2021
RSS Établissement Incidents Accidents Total I/A
01 CISSS du Bas-Saint-Laurent 167 13 180
02 CIUSSS du Saguenay–Lac-Saint-Jean 13 2 15
03 CIUSSS de la Capitale-Nationale 9 1 10
03 Centre hospitalier universitaire de Québec - Université Laval 678 95 773
03 Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec 107 0 107
04 CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec 147 2 149
05 CIUSSS de l’Estrie 50 5 55
06-1 CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal 0 0 0
06-2 CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal 10 1 11
06-3 CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal 146 4 150
06-4 CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal 33 1 34
06-5 CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal 3 4 7
06 Centre hospitalier de l’Université de Montréal  20 9 29
06 Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine 29 2 31
06 Centre universitaire de santé McGill  161 0 161
06 Institut Philippe-Pinel de Montréal* 0 0 0
06 Institut de cardiologie de Montréal 34 2 36
07 CISSS de l’Outaouais 8 4 12
08 CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue 75 3 78
09 CISSS de la Côte-Nord 4 5 9
09 CLSC Naskapi (Côte-Nord) 3 8 11
10 CRSSS de la Baie-James 10 0 10
11-1 CISSS de la Gaspésie 3 1 4
11-2 CISSS des Îles 1 0 1
12 CISSS de Chaudière-Appalaches 15 42 57
13 CISSS de Laval 6 2 8
14 CISSS de Lanaudière 68 1 69
15 CISSS des Laurentides 31 17 48
16-1 CISSS de la Montérégie-Centre 79 10 89
16-2 CISSS de la Montérégie-Est 74 7 81
16-3 CISSS de la Montérégie-Ouest 181 1 186
17 Centre de santé Innuulitsivik (Baie d’Hudson)* 0 0 0
17 Centre de santé Tulattavik (Baie d’Ungava)* 0 0 0
18 Conseil Cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James 0 0 0

* Établissements sans répondants en RDM.
  Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.


1. Rapport 2020-2021 sur les incidents et accidents survenus lors de la prestation de soins de santé et de services sociaux au Québec (MSSS, 2022).
2. L’échelle de gravité des événements rapportés dans l’analyse détaillée peut varier par rapport aux données du rapport provincial (voir Note 1). Ceci peut être dû, entre autres, à la validation effectuée dans l’analyse détaillée et au moment de l’analyse des données.

Cause principale

La cause principale est la cause directement impliquée dans la survenue de l’événement indésirable. Des bris au niveau des étapes d’emballage et d’assemblage ont été à l’origine de la majorité des événements. Plus précisément, en cas d’incident, la non-conformité au niveau de l’assemblage du plateau, l’absence d’indicateur chimique interne, la non-conformité au niveau de l’étape de nettoyage et un problème d’intégrité du DM étaient à l’origine de 1 379 (64 %) incidents (Figure 4a). Alors que 79 (33 %) accidents étaient dû au recours à la stérilisation rapide (Figure 4b). La proportion d’accidents dus à l’utilisation de ce procédé de stérilisation n’a cessé d’augmenter au fil du temps, passant de 19 % en 2016-2017 à 41 % en 2019-2020 (Figure 5). Bien que la réduction observée au cours de cette année pourrait être le reflet du délestage des activités aux blocs opératoires, elle pourrait aussi être le résultat des efforts entrepris par l’un des établissements les plus affectés par cette pratique, qui a limité la survenue de ces événements par l’achat de nouveaux instruments.

Figure 4a - Nombre d’incidents,  selon la cause principale, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Figure 4b - Nombre d’accidents, selon la cause principale, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Figure 5 - Nombre et proportion1 d’accidents dus à la stérilisation rapide, 2016-2017 à 2020-2021

 

1la proportion est le nombre d’accidents dus au recours à la stérilisation rapide par rapport au nombre total d’accidents.
Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Causes associées à la survenue des incidents et accidents liés au RDM

Les causes associées sont les facteurs à l’origine de la cause principale des événements indésirables. Elles peuvent découler de l’organisation du travail, de facteurs humains ou de lacunes liées à l’environnement. Il s’agit des causes concomitantes à l’événement indésirable.

En 2020-21, des causes associées ont été rapportées dans plus de 90 % des événements. La grande majorité des événements indésirables rapportés ont été liés à des facteurs d’organisation de travail. Parmi elles, des lacunes de procédure, de politiques ou de protocoles et une distraction du personnel ont été notées dans le cas de près de 60 % des incidents (Figure 6). Alors qu’en cas d’accident, des lacunes de procédures, de politiques et de protocoles et la non disponibilité de DM ont été rapportés dans le cas de 47 % des événements (Figure 6). Les événements indésirables ont moins souvent été associés au manque de connaissance ou à un défaut de compétence des professionnels, à un manque d’encadrement, ou de communication au sein des équipes.

Figure 6 - Nombre d’incidents et d'accidents liés au RDM selon les causes associées, Québec, 2020-2021

 

Conséquences sur les usagers

En 2020-2021, l’ensemble des accidents rapportés étaient de gravité C ou D, n’impliquant pas de conséquences sur les usagers.

Conséquences sur l’établissement

Une bonne proportion des événements indésirables (16 %) ont eu un impact sur l’établissement, en particulier d’ordre financier (Figure 7a). La démotivation des employés et dans certains cas, l’absentéisme ont également été rapportés (Figure 7b).

Figure 7a - Impact des incidents et accidents sur l’établissement, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Figure 7b - Impact des incidents et accidents sur le personnel, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Des mesures pour prévenir la récidive des événements indésirables ont été rapportées suite à 84 % des événements. Comme pour les années précédentes, la formation du personnel demeure la principale mesure rapportée, particulièrement en cas d’incident (72 %) (Figure 8). Alors qu’en cas d’accident, la formation du personnel, suivie par l’achat de nouveaux instruments étaient les principales mesures considérées par les établissements (Figure 8). Bien que des lacunes de procédure, de politiques ou de protocoles soient les facteurs les plus associés à la survenu des événements indésirables, peu de mesures pour élaborer ou mettre à jour une procédure, politique ou protocole ont été rapportés.

Toutefois, bien que les établissements soient tenus de mettre en place des plans d’action pour prévenir la récidive de leurs événements indésirables les plus fréquents, les informations rapportées au RARDM ne permettent pas de confirmer si ces mesures ont été appliquées ou non sur le terrain. Ainsi, il est difficile de connaitre l’impact de ces mesures sur l’évolution du nombre des événements indésirables.

Figure 8 - Principales mesures préventives rapportées en cas d’incidents et d’accidents, Québec, 2020-2021

 

Source : Système d’information sur la sécurité des soins et des services (SISSS), données extraites le 17 juin 2021.

Bien que la réduction dans le nombre d’événements indésirables rapportés en 2020-21 soit principalement due au délestage des activités du bloc opératoire, une sous-déclaration des événements est fort probable et constitue un problème important qui est dû à plusieurs facteurs dont le manque de temps et une charge élevée de travail. La pandémie de la COVID-19 est venue accentuer ce problème au cours des deux dernières années.

La stérilisation rapide a occasionné 33 % des accidents. Malgré que cette proportion a baissé au cours de cette année, les efforts pour assurer un meilleur équilibre entre le volume chirurgical et la disponibilité de DM - avec un facteur de sécurité - devraient être poursuivis afin de réduire l’occurrence de ces événements.

Auteurs

Comité du Centre d’expertise en retraitement des dispositifs médicaux (CERDM)
Najwa Ouhoummane, Ph. D., conseillère scientifique spécialisée
Valérie Cortin, ing. Ph. D., conseillère scientifique spécialisée et coordonnatrice du CERDM
Caroline Bernier, B. Sc. inf., conseillère scientifique
Andrée Pelletier, B. Sc. inf., conseillère scientifique
Sandie Briand, Ph. D., conseillère scientifique spécialisée

Direction des risques biologiques et de la santé au travail

Remerciements

Nous remercions les répondants d’établissements en retraitement des dispositifs médicaux et les gestionnaires de risques pour leur collaboration aux rapports d’analyse des incidents et accidents en retraitement des dispositifs médicaux (RARDM), Mme Cynthia Lévesque du MSSS, Mme Manon Tanguay, pilote du système d’information sur la sécurité des soins et services, ainsi que Mr Karl Forest-Bérard de l’INSPQ.

Pour citer ces données :

Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) 2022. Centre d’expertise en retraitement des dispositifs médicaux (CERDM). Surveillance des incidents et accidents liés au retraitement des dispositifs médicaux au Québec : résultats 2020-2021. Disponible à : https://www.inspq.qc.ca/retraitement-des-dispositifs-medicaux/surveilla…

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