L'utilisation des services de santé par les Montréalais de 40 ans et plus souffrant d'une maladie pulmonaire obstructive chronique en 2003-2004 : rapport
L'objectif principal de ce rapport est de permettre aux décideurs montréalais des milieux clinique et administratif de la santé de mieux connaître l'utilisation des services ambulatoires et institutionnels par les personnes de leur territoire souffrant d'une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC). Le rapport sur la MPOC s'inscrit dans le cadre du Projet «nbsp;Monitorage interprétatifnbsp;» mené par l'Équipe Santé des populations et services de santé (ESPSS) qui est une équipe conjointe de la Direction de santé publique de l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal et de l'Institut national de santé publique du Québec. Il fait partie d'une série de rapports produits par l'équipe sur l'utilisation des services par les Montréalais atteints de maladies chroniques. Au moment de la rédaction de ce document, les données les plus récentes pouvant être analysées étaient celles de 2003-2004. Toutefois, les analyses du projet de monitorage porteront sur les années 2002-2003 à 2009-2010, le but étant de suivre globalement les effets des transformations des services de santé de première ligne au cours de cette période. Il est aussi à noter que les services reçus dans le cadre du Réseau de services intégré destinés aux personnes atteintes d'une MPOC ne sont pas analysés dans ce rapport. Ils feront l'objet d'une publication spécifique au cours de la prochaine année.
Prévalence
- En 2003-2004, la prévalence des MPOC chez les utilisateurs de services de 40 ans et plus est de 3,0 % à Montréal, ce qui correspond à 26 870 personnes.
- Ce taux est présenté par territoire de CSSS à la figure 2 de la page 10. On note qu'il varie de 1,7 % pour le territoire du CSSS de la Montagne à 4,5 % pour celui du CSSS du Sud-Ouest - Verdun.
- 68,4 % des personnes de 40 ans et plus souffrant d'une MPOC sont âgées de 65 ans et plus.
Nous avons choisi de ne pas standardiser les taux pour l'âge et le sexe parce que notre objectif est de décrire le nombre réel des personnes avec une MPOC et les services qu'elles utilisent selon le territoire de résidence.
Utilisation des services de santé
- En 2003-2004, les personnes souffrant d'une MPOC ont été très nombreuses à consulter plusieurs fois des médecins et à en consulter plusieurs différents :
- 52,8 % ont eu dix consultations et plus auprès d'omnipraticiens ou spécialistes;
- 56,4 % ont vu trois spécialistes différents et plus; 25,3 % en ont vu six différents et plus;
- 18,4 % ont consulté trois omnipraticiens différents et plus;
- 86,3 % ont consulté au moins un spécialiste au cours de l'année mais 63,2% n'ont eu aucune consultation avec un pneumologue;
- 17,8 % des personnes n'ont consulté aucun omnipraticien, 13,7 %, aucun spécialiste et 3,1 % n'ont vu aucun médecin en milieu ambulatoire au cours de l'année.
- Les personnes souffrant d'une MPOC ont aussi été de grandes utilisatrices de services institutionnels en 2003-2004 :
- 61,9 % sont allées à l'urgence et 52,5 % ont été hospitalisées;
- parmi celles qui ont eu au moins un épisode de soins institutionnels, 11,8 % (soit 2 192 personnes) reviennent à l'urgence comme lieu de premier contact avec les services de santé suite à un épisode de soins; chez ces personnes, 54,3 % sont revenues à l'urgence dans un délai de neuf jours et moins;
- 35,2 % des hospitalisations ne sont pas suivies d'un examen médical en clinique externe ou en cabinet privé dans les 30 jours suivant la fin de l'hospitalisation;
- Les personnes de 65 ans et plus souffrant d'une MPOC ont utilisé environ de deux à trois fois plus les services institutionnels que les personnes du même âge ne souffrant pas de cette maladie en 2003-2004.
Profil d'utilisation des services de santé par les personnes atteintes d'une MPOC
Les résultats obtenus par les 12 territoires de CSSS ont été regroupés dans un tableau synthèse (tableau 2 de la page 34) selon trois catégories d'indicateurs : les caractéristiques de la population des territoires de CSSS, l'utilisation des services ambulatoires et l'utilisation des services institutionnels. Nous avons ordonnancé les proportions obtenues pour chaque indicateur retenu dans un classement allant de 1 à 12, 1 correspondant à la valeur la plus faible et 12, à la plus élevée. Ainsi, on note qu'au niveau des caractéristiques de la population des territoires, celui du CSSS de l'Ouest de l'Île a, par rapport aux autres territoires, la plus faible proportion de sa population qui est âgée de 65 ans et plus (classement = 1) et l'indice de défavorisation le plus faible (classement = 1). Par contre, on y retrouve des proportions assez élevées de personnes souffrant d'une MPOC qui ont consulté au moins une fois un omnipraticien (classement = 9) et les proportions les plus faibles d'utilisation des services institutionnels (visite à l'urgence et hospitalisation : classement = 1). On note aussi que le territoire du CSSS de St-Léonard et de St-Michel présente des caractéristiques populationnelles parmi les moins favorables et la proportion la plus forte de personnes avec une MPOC qui ont consulté au moins une fois un omnipraticien (classement = 12).
Les données du tableau récapitulatif (tableau 2) nous ont permis de catégoriser les CSSS au regard de l'utilisation des services de santé par les personnes atteintes d'une MPOC de leur territoire. L'approche utilisée fait appel à des méthodes statistiques permettant d'identifier et de regrouper les territoires qui se ressemblent le plus au regard des variables présentées dans le tableau 2, variables susceptibles d'être liées au recours aux services par les personnes atteintes de MPOC ou à l'organisation de ces services. Les regroupements ainsi obtenus témoignent d'une association statistique entre certaines caractéristiques au sein de ces territoires; ils ne signifient toutefois pas qu'il existe une relation de cause à effet entre ces caractéristiques. Les regroupements sont illustrés sur la carte des territoires montréalais à la figure 18 (page 37).
- Profil «nbsp;Spécialiste élevé - Omnipraticien faiblenbsp;» :
- Territoires de ce groupe : CSSS Cavendish, CSSS de la Montagne, CSSS Bordeaux-Cartierville–St-Laurent, CSSS Dorval-Lachine-LaSalle et CSSS Jeanne-Mance.
- Les personnes souffrant d'une MPOC de ces territoires ont une utilisation faible des services d'omnipraticiens et une utilisation élevée des services de spécialistes (à l'exception du CSSS Jeanne-Mance).
- Profil «nbsp;Omnipraticien élevé - Institutionnel faiblenbsp;» :
- Territoires de ce groupe : CSSS de l'Ouest-de-l'Île, CSSS Pointe-de-l'Île et CSSS Lucille-Teasdale.
- Les personnes souffrant d'une MPOC de ces territoires ont une utilisation élevée des services d'omnipraticiens et une faible utilisation des services institutionnels.
- Profil «nbsp;Omnipraticien élevé - Défavorisation élevéenbsp;» :
- Territoires de ce groupe : CSSS Sud-Ouest-Verdun, CSSS Coeur-de-l'Île, CSSS St-Léonard et St-Michel et CSSS Ahuntsic et Montréal-Nord.
- Les personnes souffrant d'une MPOC de ces territoires ont une utilisation élevée des services d'omnipraticiens. La défavorisation dans ces territoires est aussi élevée.
Rappelons que le territoire de CSSS des personnes souffrant d'une MPOC est déterminé selon leur lieu de résidence et non selon le territoire du service utilisé. Or, on sait que les Montréalais, à l'exception de ceux de l'Ouest-de-l'Île, n'utilisent qu'un peu plus de 50 % de leurs services de santé de 1re ligne dans leur territoire de résidence. Il faut donc faire attention à ne pas attribuer directement aux services d'un territoire, les appréciations de l'utilisation des services des personnes avec une MPOC du territoire. Ces résultats mettent en évidence le défi qu'ont à relever les CSSS pour planifier leur services de santé dans une perspective d'approche populationnelle.
Tous ces constats soulèvent des questions quant à l'organisation et l'utilisation des services de santé par les personnes souffrant d'une MPOC. Ainsi, que penser du fait que 18 % des personnes souffrant d'une MPOC n'ont consulté aucun omnipraticien au cours de l'année 2003-2004 alors que pour la SCT (Société canadienne de thoracologie), le médecin de famille occupe un rôle de premier plan dans la prise en charge de la MPOC? Le fait que 15 % des personnes avec une MPOC ne consultent que des spécialistes est-il le reflet d'une plus grande sévérité de la maladie, d'un manque de médecins de famille ou d'un problème de continuité des services entre les milieux institutionnel et ambulatoire ou entre les spécialistes et les omnipraticiens? Doit-on s'inquiéter du fait que 63 % des personnes atteintes d'une MPOC n'ont vu aucun pneumologue au cours de l'année? Le nombre très élevé d'épisodes de soins institutionnels est-il le reflet de l'évolution inéluctable de cette maladie ou le reflet d'un besoin d'amélioration de la continuité et de l'accessibilité au niveau des services ambulatoires et de soutien à la personne atteinte? Enfin, les proportions élevées de retour à l'urgence après un épisode de soins institutionnels et les proportions élevées d'hospitalisation qui ne comportent pas de suivi médical dans les 30 jours sont-elles synonymes d'un problème de coordination et de continuité des services ou d'un problème d'accessibilité? D'autres analyses sont nécessaires pour répondre à ces questions.