Interdiction de vendre du tabac, de l'alcool et de la loterie aux mineurs : analyse de la situation et des écrits scientifiques

Le tabagisme, la consommation d'alcool et la pratique des jeux de hasard et d'argent chez les jeunes sont des questions de santé publique importantes. Alors que le tabagisme est la première cause de maladies et de décès dans les pays occidentaux, l'initiation au tabac survient surtout à l'adolescence, un stage du développement caractérisé par le désir d'expérimentation. La consommation d'alcool, pour sa part, est en cause dans une soixantaine de problèmes sociaux et de santé, aigus ou chroniques. Chez les jeunes, la consommation précoce d'alcool augmente le risque de problèmes dus à la consommation et même le risque d'alcoolisme. Quant à la pratique des jeux de hasard et d'argent, elle peut occasionner des problèmes sociaux et économiques importants et l'exposition précoce a une influence sur le taux de prévalence des problèmes de jeu à l'âge adulte.

Afin de protéger les jeunes des effets néfastes liés à la consommation de ces produits, des lois imposent un âge minimal pour se procurer des produits du tabac, de l'alcool ou de loterie dans la majorité des pays, bien que cet âge soit variable d'un produit ou d'un pays à l'autre. Les lois sur l'âge minimal légal ont pour but de restreindre l'accès aux sources commerciales de ces produits, avec l'intention d'en réduire l'usage et les problèmes connexes.

Au Québec, les contextes de prévention du tabagisme et des problèmes liés à la consommation d'alcool ou à la pratique des jeux de hasard et d'argent sont bien différents. Depuis près de vingt ans, le Plan québécois de lutte contre le tabagisme « reconnaît la pertinence d'une approche globale et intégrée et la nécessité de la contribution de nombreux acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux à l'atteinte de l'objectif de protéger et d'améliorer la santé de la population québécoise par la réduction des méfaits du tabagisme ». Le Québec s'est ainsi doté d'un programme écologique qui met à profit divers secteurs gouvernementaux et de la société et qui obtient l'adhésion de la majorité de la population.

Pour ce qui est de la consommation d'alcool, il n'existe pas de tel plan d'action au Québec. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande que les états se dotent de stratégie sur l'alcool et un groupe d'experts canadiens a fait des recommandations pour l'élaboration d'une stratégie nationale sur l'alcool. Dans une étude comparant la présence de politiques efficaces pour réduire les problèmes liés l'alcool dans les provinces canadiennes, le Québec obtient une faible cote en se distinguant par la présence de politiques plus libérales que dans les autres provinces. Parallèlement, la consommation d'alcool est en hausse depuis une quinzaine d'année.

La présente analyse ne permet pas de dire s'il faut ou non harmoniser les lois sur la vente de tabac, d'alcool et de loterie aux mineurs. Au Québec, les lois et règlements qui visent l'ensemble de la population sont plus sévères pour le tabac que pour l'alcool. Ce n'est pas le cas en matière de vente aux mineurs où certains règlements sont plus sévères pour l'alcool que pour le tabac : il est interdit de posséder de l'alcool et les amendes pour la vente d'alcool à des mineurs sont plus sévères que celles pour la vente de tabac. En contrepartie, il n'existe pas d'inspections pour la vente d'alcool dans les commerces autres que la SAQ.

L'interprétation des résultats sur l'efficacité des mesures pour favoriser le respect des lois sur la vente aux mineurs rapportés dans cette recension des écrits doit être faite avec prudence. Il faut considérer que le contexte québécois est différent de celui qui prévalait dans les endroits et au moment où les études recensées ont été réalisées, la majorité d'entre elles l'ayant été aux États-Unis, il y a au moins une dizaine d'années. Si la décision d'harmoniser les lois sur la vente de tabac, d'alcool et de loterie est prise, les choix doivent avant tout contribuer à diminuer l'accessibilité des jeunes à ces substances et renforcer les normes sociales défavorables à la consommation d'alcool, de tabac et de jeux par les mineurs.

Enfin, la recension des écrits permet d'affirmer que les lois sur l'âge minimal légal et les mesures pour faire respecter les lois sur la vente aux mineurs sont nécessaires, mais probablement insuffisantes. Elles ont plus de portée si elles font partie d'un programme écologique gouvernemental qui, comme dans le cas de la lutte au tabagisme, comprend des interventions législatives, fiscales, éducatives, médiatiques et communautaires cohérentes.

Certaines de ces interventions touchent directement les jeunes alors que d'autres les touchent indirectement à travers les normes sociales et l'usage de ces produits par les adultes.

Type de publication

ISBN (électronique)

978-2-550-70044-9

ISBN (imprimé)

978-2-550-70043-2

Notice Santécom

Date de publication