La mortalité évitable des deux principales communautés linguistiques du Québec

Nous étudions ici la mortalité évitable pour les deux principales communautés linguistiques du Québec, francophone et anglophone, pour quatre périodes : 1990-1994, 1995-1999, 2000-2004 et 2005-2007. L'analyse est faite pour l'ensemble du Québec et pour trois territoires de résidence : la région métropolitaine de recensement (RMR) de Montréal, les autres régions métropolitaines de recensement regroupées (Gatineau, Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières et Saguenay) et le reste du Québec soit hors des régions métropolitaines de recensement.

La mortalité évitable considère les décès survenus avant l'âge de 75 ans pour des causes identifiées comme évitables; elle est considérée comme un indicateur de la qualité des services de santé et des interventions de santé publique. Dans des conditions idéales, compte tenu de l'évolution des connaissances sur les causes des maladies et sur les moyens pour les traiter, on devrait constater une diminution du nombre de décès pour ces causes évitables, peu importe le lieu de résidence des personnes ou leur appartenance linguistique. Nous utilisons le mode de classification de Tobias et Jackson (2001) qui différencie le potentiel de réduction de la mortalité selon le type d'intervention primaire, secondaire ou tertiaire, en retenant 62 causes de décès.

Les anglophones et les francophones du Québec connaissent de façon générale une baisse des taux de décès pour les causes de mortalité évitable entre 1990-1994 et 2005-2007, à quelques exceptions près.

Alors que chez les hommes anglophones et francophones le taux de mortalité évitable pour le cancer du poumon a nettement diminué depuis 1990-1994, il est resté le même en 18 ans chez les femmes anglophones pour l'ensemble du Québec et pour la région métropolitaine de recensement de Montréal. Dans les autres régions métropolitaines de recensement et hors des régions métropolitaines, ces taux semblent avoir augmenté mais il est impossible de le confirmer statistiquement. Chez les femmes francophones par contre ce taux a connu une hausse significative au Québec et dans les différentes régions géographiques.

Le taux de mortalité évitable pour le cancer colorectal a diminué de façon significative en 18 ans chez les hommes et les femmes francophones. Une telle diminution n'a toutefois pas été observée chez les anglophones alors que la tendance des taux est à la stagnation.

D'autres causes majeures de mortalité évitable comme les maladies ischémiques du cœur et le cancer du sein (chez les femmes) ont diminué considérablement dans les deux groupes au cours de la période étudiée, partout au Québec. Cependant, ces diminutions ne sont pas toujours significatives dans la population anglophone.

Les anglophones présentaient très souvent des taux de mortalité évitable inférieurs à ceux des francophones en 1990-1994 mais la diminution plus rapide chez ces derniers a amené un rapprochement des taux de mortalité des deux groupes linguistiques et a parfois fait disparaître des différences qui étaient significatives au début de la période étudiée.

Les hommes et les femmes anglophones du Québec présentaient toujours des taux significativement plus faibles en 2005-2007 pour le cancer du poumon, les suicides et blessures volontaires, les accidents de la circulation et les maladies pulmonaires obstructives chroniques.

Par ailleurs, la baisse de la mortalité chez les hommes francophones a fait disparaître des différences à l'avantage des anglophones qui existaient en 1990-1994 pour les maladies ischémiques du cœur, le cancer colorectal et les maladies cérébrovasculaires.

Chez les femmes, durant toute la période étudiée, aucune différence significative entre les deux groupes linguistiques n'a été observée pour le cancer colorectal, les maladies cérébrovasculaires et le cancer du sein. La différence à l'avantage des anglophones qui existait pour les maladies ischémiques du cœur s'est, quant à elle, estompée.