Avis sur la vaccination contre la COVID-19 chez les personnes proches aidantes

Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) a demandé au Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) de fournir un avis au sujet des proches aidants de personnes aînées vivant en centre d’hébergement. Le MSSS aimerait connaître l’ordre de priorisation des proches aidants parmi les groupes prioritaires déjà établis pour la vaccination contre la COVID-19.

Définition de personne proche aidante

Une personne proche aidante peut ainsi être définie : « Toute personne qui, de façon continue ou occasionnelle, apporte un soutien à un membre de son entourage qui présente une incapacité temporaire ou permanente et avec qui elle partage un lien affectif, qu’il soit familial ou non. Le soutien est offert à titre non professionnel, et sans égard à l’âge, au milieu de vie ou à la nature de l’incapacité du membre de l’entourage, qu’elle soit physique, psychique, psychosociale ou autre. Il peut prendre diverses formes, par exemple, l’aide aux soins personnels, le soutien émotionnel ou la coordination des soins et des services. » (MSSS, 2020)

Stratégie préconisée pour la vaccination contre la COVID-19

Dans le cadre de recommandations récentes sur les groupes prioritaires pour la vaccination contre la COVID‑19, le CIQ a précisé qu’il était préférable de viser principalement une stratégie de protection « directe » (INSPQ, 2020). Cela signifie de protéger directement, par la vaccination, les personnes les plus vulnérables face aux complications de la COVID-19. La raison principale est qu’il n’y a pas de données disponibles sur la capacité des vaccins contre la COVID-19 à prévenir l’infection et éviter la transmission d’une personne vaccinée, qui deviendrait infectée par le virus, à une autre personne. Dans les essais de phase 3 réalisés pour les vaccins contre la COVID-19, les données d’efficacité disponibles concernent la protection « directe », c’est-à-dire la capacité à prévenir la COVID-19 symptomatique chez les personnes vaccinées (INSPQ, 2020). Les études qui seront entreprises après la mise en marché des vaccins devraient nous fournir des indications sur leur capacité à prévenir les infections, réduire la contagiosité et générer une protection indirecte (herd immunity).

La principale exception à cette stratégie « directe » concerne la priorisation des travailleurs de la santé (TdeS) pour la vaccination. Ces derniers sont priorisés rapidement pour plusieurs raisons (INSPQ, 2020) :

  • Les TdeS en contact avec les usagers sont à risque beaucoup plus élevé de COVID-19 par rapport à la population générale du même âge, ce qui a été observé au cours de la 1re vague et qui se poursuit durant la 2e vague (INSPQ, 2020).
  • Les TdeS en contact avec les usagers et les autres TdeS peuvent potentiellement transmettre la COVID‑19 à un nombre élevé de personnes et être à l’origine d’éclosions.
  • La vaccination des TdeS contre la COVID-19, qui pourraient avoir à être mobilisés à diverses tâches au cours de la pandémie, est une mesure importante pour maintenir l’intégrité du système de santé.

Au cours des prochains mois, la quantité de vaccins contre la COVID-19 disponibles sera très limitée. Dans un premier temps, la vaccination contre la COVID-19 visera les personnes résidant en centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) de même que les TdeS qui sont en contact direct avec des usagers. Considérant l’efficacité élevée des vaccins à ARN messager contre la COVID-19 (NEJM, 2020) de même que la couverture vaccinale élevée qui est attendue pour ces milieux, il est probable que les risques de nouveaux cas et d’éclosions dans les CHSLD ayant été visés par une opération de vaccination, surtout si la couverture vaccinale est élevée, diminueront grandement. En ce sens, la vaccination des proches aidants contribuera probablement peu à la prévention de nouveaux cas de COVID-19. Par ailleurs, les proches aidants étant le plus souvent attitrés aux soins d’une personne aînée en particulier, ils sont à moindre risque d’être une source d’éclosion de COVID-19. Finalement, les mesures de protection personnelle imposées aux proches aidants contribuent à réduire les risques de transmission du virus dans le milieu et à protéger les proches aidants.

Acceptabilité et faisabilité

Une priorisation élevée des proches aidants pour la vaccination contre la COVID-19 est susceptible d’être bien acceptée par la population. Au niveau de la faisabilité, si la vaccination des résidents et des TdeS de CHSLD est faite à l’intérieur même du CHSLD, l’inclusion des proches aidants pourrait causer certains défis logistiques, par exemple pour rejoindre ces personnes en même temps que les résidents et les TdeS.

Aspects éthiques

Nous ne disposons pas de données précises sur le nombre de proches aidants de personnes résidant en CHSLD. Ce nombre peut aussi varier en fonction de la définition utilisée. Il est possiblement supérieur au nombre total de personnes résidant en CHSLD, soit environ 40 000, ce qui n’est pas négligeable. L’inclusion des proches aidants dans l’opération initiale de vaccination, où un nombre très restreint de doses sera disponible, pourrait faire en sorte de retarder la vaccination des résidents des CHSLD du Québec de même que des TdeS à risque élevé de COVID-19. Considérant le niveau de risque très élevé associé à ces milieux, une telle situation pourrait être liée à la survenue d’un certain nombre de cas supplémentaires de COVID-19 dans les CHSLD, ce qui pourrait soulever certains enjeux éthiques.

Conformité

À notre connaissance, parmi les juridictions ayant proposé une séquence de vaccination contre la COVID-19, la question de la priorisation des personnes proches aidantes n’était pas spécifiquement discutée (CCNI, 2020 ; CDC, 2020 ; JCVI, 2020 ; HAS, 2020). Par ailleurs, comme au Québec et au Canada, les autorités anglaises, américaines et françaises misent principalement sur la protection directe des plus vulnérables en ce qui concerne l’attribution des premières doses de vaccin contre la COVID-19.

Recommandations

À la lumière des connaissances actuelles, le CIQ recommande de ne pas inclure les personnes proches aidantes dans les priorités initiales de vaccination contre la COVID-19. Le CIQ reconnaît toutefois la contribution inestimable des proches aidants au système de santé et de services sociaux, notamment en ce qui concerne les soins, services et soutien aux aînés. En ce sens, le CIQ propose qu’ils soient considérés comme des travailleurs des services essentiels au sens de l’avis préliminaire sur les groupes prioritaires pour la vaccination contre la COVID-19 au Québec (INSPQ, 2020). Bien sûr, si un proche aidant avait des critères additionnels de vulnérabilité, par exemple un âge avancé, il pourrait être vacciné plus précocement, en fonction du niveau de priorité associé à sa condition (par exemple son âge) et de la disponibilité des vaccins.

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