Présence de plomb dans l’eau des écoles et des garderies : importance du risque et pertinence d’une surveillance à chaque point d’utilisation
L’exposition au plomb de la population générale a diminué de façon importante en Amérique du Nord au cours des dernières décennies. Néanmoins, certaines sources d’exposition, comme l’eau potable, requièrent toujours une attention particulière. Si l’exposition liée aux entrées de service en plomb de bâtiments résidentiels est bien démontrée, l’exposition liée aux constituants en plomb de canalisation et de robinetterie de certains bâtiments institutionnels l’est moins.
Puisque les jeunes enfants sont particulièrement susceptibles aux effets délétères du plomb, le présent avis se penche sur le risque potentiel que peut représenter la présence occasionnelle de plomb dans l’eau potable distribuée dans les écoles et les garderies du Québec. Des propositions sont également faites pour appuyer la gestion de ce risque par les instances concernées.
Afin d’évaluer le risque, les auteurs de l’avis ont eu recours à une procédure de simulation des plombémies d’enfants exposés au plomb présent dans l’eau potable des écoles et des garderies. Pour ce faire, un modèle toxicocinétique1 a permis de reproduire des scénarios hypothétiques mais réalistes de l’exposition au plomb des jeunes enfants. Dans ces scénarios, figurent notamment les rares cas de dépassement important de la norme de plomb prescrite au règlement québécois sur la qualité de l’eau potable. En raison de la rareté des données québécoises, l’analyse réalisée a dû reposer principalement sur les niveaux de contamination de l’eau observés dans d’autres provinces canadiennes. Il n’est donc pas acquis que ces données soient représentatives de la situation prévalant au Québec.
Afin de discuter des modalités possibles de surveillance et de gestion de la qualité de l’eau dans les écoles et les garderies, quatre scénarios ont été comparés en faisant varier le niveau de surveillance. Les critères de comparaison suivants ont été utilisés : efficacité et efficience (pour la détection des situations potentiellement problématiques et leur correction), conformité avec les normes en vigueur, valeurs éthiques en présence et cohérence avec les actions de développement durable.
Situation générale sur le territoire québécois
- La présence de plomb dans l’eau potable des écoles des garderies du Québec au-delà de la norme actuelle du Règlement sur la qualité de l’eau potable (RQEP) semble peu fréquente et plutôt intermittente. Cependant, les données à cet égard demeurent limitées et doivent être interprétées avec prudence.
- Selon des modélisations effectuées sur la base des données de contamination disponibles à l’échelle d’un territoire – province ou région –, le plomb présent dans l’eau des écoles et des garderies ne contribue généralement ni à l’augmentation significative de la plombémie moyenne annuelle des enfants, ni à l’augmentation de leur plombémie maximale pouvant être atteinte au cours d’une année.
Évaluation du risque
- Pour un nombre restreint d’écoles ou de garderies au sein d’un tel territoire, il est possible qu’un impact significatif sur la plombémie moyenne et maximale atteinte au cours de l’année ainsi que sur le nombre d’enfants ayant une plombémie supérieure au seuil acceptable soit présent; cet impact étant imperceptible sur l’ensemble d’un territoire.
- En ce qui concerne les enfants fréquentant ce nombre restreint d’établissements, l’augmentation de leur plombémie pourrait se traduire par une perte moyenne de 1 à 3 points de quotient intellectuel, et cette perte pourrait atteindre près de 7 points dans le cas d’une exposition plus fréquente ou de plus grande ampleur chez les enfants les plus sensibles, notamment les nourrissons.
- L’impact évalué sur le quotient intellectuel demeure un exercice théorique en raison de nombreuses incertitudes associées à l’étendue des expositions et des effets incertains du plomb à très faibles doses. Bref, il est très difficile d’estimer l’impact réel de ces contaminations et leur signification concrète sur le plan sanitaire.
Analyse comparative de scénarios de surveillance et de gestion de la qualité de l’eau
Selon l’analyse des modalités possibles de surveillance en appui à la gestion du risque, les valeurs éthiques de bienfaisance, d’équité, de prudence et d’autonomie plaideraient pour une surveillance plus serrée. En revanche, les principes d’efficience, de non-malfaisance et de développement durable plaideraient plutôt pour une limitation de cette surveillance.
Cependant, les données disponibles quant à l’efficacité et l’efficience des différents scénarios étudiés sont insuffisants pour aider à définir une orientation précise.
Recommandations
En vue d’appuyer la gestion de ce risque, l’INSPQ suggère aux instances concernées d’en apprendre davantage sur les niveaux de contamination de l’eau par le plomb dans les écoles et les garderies du Québec; de favoriser des projets pilotes de surveillance de la qualité de l’eau dans ces établissements et de concevoir des outils afin que les professionnels des directions de santé publique puissent conseiller adéquatement les parties concernées, incluant la population.