Promotion de la vaccination : agir pour maintenir la confiance
S'inscrivant dans la foulée de la démarche de promotion de la vaccination au Québec, ce document présente une synthèse des études sur les connaissances, attitudes et pratiques au regard à la vaccination au Québec et des interventions efficaces pour favoriser des attitudes positives par rapport à la vaccination, et ce, autant chez la population que les professionnels de la santé. Cette mise à jour de la littérature permet de mieux circonscrire les facteurs externes et internes susceptibles d'avoir un impact sur le processus de planification des interventions de promotion de la vaccination.
Afin de compléter la synthèse qualitative des connaissances, une consultation d'experts, selon une méthode Delphi, a été réalisée pour identifier des interventions à prioriser dans l'élaboration des futures stratégies de promotion (public cible, objectifs à prioriser, interventions pressenties efficaces).
L'ensemble des informations recueillies permettra de baliser la démarche d'élaboration du plan d'action (phase&nbdp;II). Les principaux constats sont présentés ci-dessous.
Connaissances, attitudes et pratiques en regard à la vaccination au Québec
- Plusieurs études sur les connaissances, attitudes et pratiques de la population et des professionnels de la santé à l'égard de la vaccination ont été réalisées au Québec depuis la publication du Plan québécois de promotion de la vaccination en 2010.
- La perception des risques et des bénéfices des vaccins, les attitudes par rapport à la vaccination, les normes et les connaissances étaient parmi les déterminants les plus fréquemment associés aux décisions vaccinales dans la population, mais également chez les professionnels de la santé pour leur propre vaccination.
- Les recommandations des professionnels de la santé ont été identifiées comme ayant une influence importante sur les décisions vaccinales, et ce, tant chez les parents pour la vaccination infantile, que chez les adolescents ou les adultes.
- La perception des bénéfices, de l'efficacité et de la sécurité des vaccins ainsi qu'un niveau suffisant de connaissances étaient fortement associés à l'intention des professionnels de la santé de recommander la vaccination.
- Les résultats de la plupart des études qui questionnaient différents groupes de professionnels de la santé ont relevé des différences entre les attitudes et les comportements des médecins, des infirmières et des autres travailleurs de la santé; les premiers étant généralement les plus favorables à la vaccination.
Interventions et stratégies de promotion de la vaccination
- Les méta-analyses et revues de la littérature recensées ont souligné que le rappel et la relance étaient efficaces pour augmenter les couvertures vaccinales (CV).
- Les conclusions sont plus nuancées en ce qui a trait à l'impact des communications en face à face, de la formation et l'éducation des professionnels de la santé et de l'utilisation des médias de masse, dont Internet.
- Il demeure difficile d'identifier un type d'intervention réussissant mieux dans un contexte vaccinal particulier, car les études analysées incluent des interventions dont le contenu et les modalités diffèrent et qui sont déployées dans des contextes différents, auprès de populations distinctes et en employant divers supports pour l'intervention.
- Certains grands principes peuvent néanmoins être formulés. Pour être efficaces, les stratégies devraient : reposer sur un cadre de planification et des théories de changement de comportement; utiliser une combinaison de différentes interventions plutôt qu'une intervention unique; être soutenues dans le temps plutôt que ponctuelles et réactives; être personnalisées et s'appuyer sur des données empiriques, tant pour bien connaître la situation au départ (identifier les groupes à cibler, développer les outils adéquats et les tester, avoir une bonne compréhension des barrières potentielles) que pour pouvoir bien évaluer les retombées de l'intervention.
Consultation auprès des experts
Au total, quatre-vingt-huit (88) experts et vaccinateurs sur le terrain ont été invités à participer à la consultation. En avril 2014, 60 personnes ont répondu au premier questionnaire qui comportait majoritairement des questions ouvertes (taux de réponse de 68 %). Les réponses obtenues ont été regroupées en fonction de grands thèmes qui ont servi à l'élaboration du second questionnaire comportant principalement des questions fermées. En mai 2014, l'ensemble des experts et vaccinateurs ciblés, qu'ils aient répondu ou non au premier questionnaire, ont été invités à remplir le second questionnaire et 73 l'ont fait (taux de réponse de 83 %). Les résultats de ce second questionnaire sont présentés ci-dessous. La proportion de participants ayant répondu « assez prioritaire » ou « très prioritaire » est indiquée entre parenthèses.
En ce qui concerne les principaux problèmes pour lesquels des interventions de promotion de la vaccination auprès de la population seraient prioritaires, les experts et vaccinateurs ont identifié les craintes par rapport aux effets secondaires et à la sécurité des vaccins (93 %) ainsi que le manque de connaissances et les fausses croyances (92 %).
De plus, les parents ont été identifiés comme étant le groupe à cibler en priorité lors du développement d'interventions de promotion de la vaccination (97 %). Les autres groupes mis en priorité étaient les personnes plus à risque (personnes défavorisées, malades chroniques) (88 %) et les adultes (86 %). Les vaccins administrés durant l'enfance (99 %) ont été identifiés comme cibles prioritaires pour les interventions de promotion de la vaccination, suivis de l'ensemble des vaccins recommandés (91 %). Les vaccins contre l'influenza (86 %), le RRO (83 %), le VPH (82 %) et le pneumocoque (81 %) figurent parmi les vaccins individuels mis en priorité par les experts et les vaccinateurs.
Au niveau des thèmes à aborder par les interventions de promotion de la vaccination, les participants ont retenu plusieurs des thèmes identifiés lors du premier questionnaire, soit : les bénéfices et l'importance de la vaccination (96 %), les maladies évitables par la vaccination (96 %), les fausses croyances (96 %), la sécurité des vaccins (96 %) et l'efficacité des vaccins (92 %).
Le développement d'interventions sur Internet et les médias sociaux destinées aux parents pour la vaccination de l'enfance a été identifié comme étant prioritaire par la majorité des participants pour la phase II du plan d'action.
En ce qui a trait à la promotion auprès des professionnels de la santé, le manque de connaissances et les fausses croyances (90 %), le manque de conviction (88 %) et le manque de compétences liées à l'acte vaccinal (88 %) étaient les principaux problèmes identifiés par les participants. Bien qu'aux yeux des experts consultés, l'ensemble des vaccinateurs (85 %) devraient être ciblés par les interventions de promotion de la vaccination, les infirmières (93 %) constituaient le principal groupe pour lequel des interventions devraient être mises en place en priorité selon les experts et les vaccinateurs. En ce qui concerne les thèmes à aborder, les bénéfices et l'importance de la vaccination (94 %), le développement de compétences pour répondre aux patients hésitants (94 %), la sécurité (92 %) et l'efficacité (92 %) des vaccins figuraient parmi les plus prioritaires.
Chez les professionnels de la santé, l'amélioration des connaissances semble être un point unanime chez les experts et vaccinateurs sondés, mais la formule choisie devra être attrayante et s'inscrire dans les contraintes des milieux, notamment le peu de temps disponible pour participer à des activités de formation. On suggère également de développer les compétences des professionnels pour discuter de la vaccination avec les patients hésitants et de diffuser de l'information sur la vaccination de façon plus soutenue dans les médias utilisés par les professionnels de la santé.
Recommandations
Les travaux de la phase II viseront principalement à développer des interventions sur Internet et les médias sociaux destinées aux parents pour faire la promotion de la vaccination ainsi que des stratégies novatrices pour améliorer les connaissances et les compétences des professionnels de la santé au regard de la vaccination. La définition d'objectifs opérationnels précis, la description détaillée des interventions, la segmentation des groupes cibles et les approches prévues pour l'évaluation formative et de l'implantation seront au cœur de ce deuxième plan d'action.
Pour ce faire, nous recommandons que les travaux de la phase II de promotion de la vaccination misent sur les éléments suivants :
- La conception et l'implantation des stratégies devront être planifiées rigoureusement, en s'appuyant sur un cadre théorique et sur des données de recherche (connaissance des publics cibles, de leurs comportements et des facteurs qui influent sur eux).
- L'évaluation devra faire partie prenante du développement, de la planification et de l'implantation des stratégies de promotion de la vaccination. Le développement des outils et des messages devra également être soutenu par des évaluations formatives. Ensuite, lorsque les interventions seront mises en œuvre, l'évaluation permettra de mesurer le niveau d'implantation des différentes stratégies ou composantes de la campagne. Enfin, l'évaluation des résultats visera à décrire quels ont été les impacts de l'intervention, notamment en ce qui a trait à la couverture vaccinale. On pourra aussi vouloir vérifier la notoriété des messages et leur influence sur les connaissances et attitudes des groupes ciblés.
- Les interventions de promotion devront être basées sur une approche permettant de répondre rapidement aux doutes soulevés dans la population (être proactif) et évaluer régulièrement les perceptions, afin d'identifier les programmes qui pourraient faire face à des problèmes d'acceptabilité. À ce sujet, les enquêtes sur les couvertures vaccinales permettent ce type de suivi. Par ailleurs, l'existence d'outils permettant de suivre l'évolution de l'opinion publique via les médias sociaux peut également être utilisée pour la conception de stratégies s'adressant aux préoccupations décelées.
- Les interventions devront être implantées en collaboration avec les différents acteurs impliqués dans la promotion de la vaccination, notamment entre les paliers provincial, régional et local. Il faudra donc s'assurer que les conditions nécessaires à cette collaboration soient en place, par exemple en favorisant le partage des connaissances auprès des partenaires (réseau des responsables régionaux en immunisation, à la TCNMI, etc.), en encourageant le développement de communautés de pratique et en favorisant la synergie avec des projets de recherche sur la vaccination menés au Québec.
En plus du développement d'interventions à court et moyen termes, nous recommandons qu'une stratégie globale à long terme soit élaborée, afin que les actions de promotion soient cohérentes et incitent au changement. Afin de maintenir la confiance de la population et des professionnels de la santé envers la vaccination, il apparaît essentiel que l'ensemble des actions en matière de promotion de la vaccination s'insère dans une réflexion stratégique plus large. Pour ce faire, une nouvelle entité qui aurait la responsabilité de la diffusion et de l'implantation des interventions de promotion à l'échelle provinciale pourrait être créée.