Rapport sur la surveillance de laboratoire des souches d'entérobactéries résistantes aux carbapénèmes isolées au Québec entre août 2010 et octobre 2011
L'émergence récente des entérobactéries résistantes aux carbapénèmes (ERC) est un problème de santé majeur, car ces bactéries sont résistantes à plusieurs classes d'antibiotiques ce qui peut conduire à des impasses thérapeutiques. La résistance aux carbapénèmes peut être secondaire à plusieurs mécanismes, dont la production de carbapénèmases. Les trois catégories de carbapénèmases en émergence chez les entérobactéries sont les enzymes KPC (Klebsiella pneumoniae productrice de carbapénèmases), NDM (New-Delhi metallo-beta-lactamase) et OXA-48. La détection des ERC par les tests de laboratoire phénotypiques classiques est difficile et représente un défi pour les laboratoires de microbiologie médicale.
Un programme québécois de surveillance de laboratoire des ERC a été instauré à l'été 2010. Entre août 2010 et octobre 2011, 593 souches ont été reçues au Laboratoire de santé publique du Québec (LSPQ) dans ce cadre et 409 répondaient aux critères d'inclusion. La production de carbapénèmases a été confirmée chez 87 (21,3 %) souches; parmi celles-ci, 83 étaient de type KPC (K. pneumoniae n = 48). Les gènes blaNDM-1 et blaOXA-48 ont été retrouvés chez 2 souches distinctes de K. pneumoniae, le gène blaNMC chez une souche d'Enterobacter cloacae et le gène blaSME chez une souche de Serratia marcescens. Des mécanismes de résistance autres que la production de carbapénèmases ont également été identifiés chez 319 souches. La surexpression de l'AmpC chromosomique possiblement combinée à des mutations au niveau des porines conduisant à une imperméabilité membranaire était le mécanisme le plus fréquemment identifié (241 souches, 59,3 %).
Les souches produisant une enzyme de type KPC étaient généralement résistantes aux 3 carbapénèmes testées et elles se sont avérées majoritairement sensibles à la tigécycline. Les taux de résistance aux aminosides, à la colistine et à la ciprofloxacine étaient variables.
À la lumière de l'analyse des résultats obtenus au cours de cette période de surveillance, un nouvel algorithme a été développé pour mieux cibler les souches à soumettre au LSPQ pour études phénotypiques et génotypiques supplémentaires. Cette nouvelle approche, qui s'appuie aussi sur les derniers critères du document du Clinical Laboratory Standards Institute (CLSI) 2012, devrait permettre d'améliorer la qualité du programme.