Évaluation du risque de cancer pour les travailleurs œuvrant dans le secteur de l'entreposage de produits en caoutchouc en Estrie, dû à la présence de nitrosamines dans l'air ambiant - Résumé
La présente analyse de risque fait suite à une demande adressée le 4 avril 2008 par la docteure Louise Soulière, directrice de santé publique et de l'évaluation à l'Agence de la santé et des services sociaux de l'Estrie, au docteur Richard Massé, président-directeur général de l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Dre Soulière sollicitait le support de l'INSPQ pour assister l'équipe de santé publique dans l'évaluation du risque pour la santé associé à l'exposition aux nitrosamines dans les entrepôts de l'industrie de produits en caoutchouc en Estrie.
En Estrie, en 2006, l'industrie de produits en caoutchouc comptait une trentaine d'établissements qui employaient environ 3 500 travailleurs. Il s'agirait de 30 % des établissements et 50&nbps;% des travailleurs de cette industrie dans la province de Québec. Les usines établies en Estrie se spécialisent surtout dans la fabrication de bandes d'étanchéité pour le secteur automobile.
Dans sa demande, Dre Soulière mentionne que dans les dernières années, des évaluations environnementales effectuées par le réseau de santé publique dans cinq usines de l'Estrie démontraient une exposition significative des travailleurs aux fumées de caoutchouc. La N-nitrosodiméthylamine (NDMA) était nettement prédominante dans la majorité des échantillons prélevés dans ces milieux. Des concentrations jusqu'à 17 µg/m3 de nitrosamines totales ont été mesurées dans l'air ambiant de ces usines en zone respiratoire des travailleurs. Suite à ces observations, de nombreuses mesures préventives ont été mises en place, à divers postes de travail, au niveau de la production (ventilation, ajustements des méthodes de travail, protection respiratoire). Ceci a été rendu possible grâce à la collaboration de l'industrie, de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) et des équipes du réseau de santé publique en santé au travail. Ces actions ont permis d'abaisser, dans la majorité des situations, les concentrations de nitrosamines à des niveaux inférieurs à 1&nbps;µg/m3 dans les usines de production.
Cependant, l'émission de nitrosamines à partir de produits en caoutchouc refroidi, principalement en milieu d'entreposage des produits finis, et l'impact de cette exposition sur la santé des travailleurs, demeuraient une source de préoccupation pour l'équipe de santé publique de l'Estrie.
En effet, en 2006-2007 les concentrations en nitrosamines mesurées dans la zone respiratoire des travailleurs d'un important entrepôt de produits en caoutchouc refroidi étaient en moyenne de 2,7 µg/m3, alors que la concentration moyenne en NDMA était de 2,2&nbps;µg/m3. Au Québec, il n'existe pas de norme concernant ces molécules en milieu de travail. Cependant, dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST), il est prescrit que l'exposition à la NDMA doit être réduite au minimum (EM). Ainsi, sur la base des estimés de risque disponibles dans la littérature et des normes établies ailleurs dans le monde, ainsi que sur la base de la notation EM pour le NDMA dans la réglementation québécoise, le réseau de la santé publique et la CSST de l'Estrie jugèrent ces résultats préoccupants et qu'ils méritent d'être approfondis dans une perspective de prévention d'un risque potentiel de cancer à long terme. C'est dans ce cadre que s'inscrit la demande de support que la Dre Soulière a adressée à l'INSPQ.