Le fardeau des cardiopathies ischémiques et des tumeurs malignes au Québec et dans les autres régions canadiennes
Les cardiopathies ischémiques et les tumeurs malignes figurent parmi les principales causes de mortalité au Canada et dans les provinces canadiennes en 2000-2002 (Statistique Canada et Institut canadien d'information sur la santé, 2008). Au Québec, ces causes représentent respectivement 18,0 % et 33,4 % de l'ensemble des décès. Au cours de cette même période, le Québec se situe au second rang des dix provinces canadiennes pour les cardiopathies ischémiques, avec un taux ajusté de mortalité de 103 pour 100 000, et au huitième rang pour les tumeurs malignes, avec un taux ajusté de 195 pour 100 000 (Institut national de santé publique du Québec [INSPQ], 2008). C'est la Colombie-Britannique qui affiche les taux de mortalité les plus faibles au Canada pour ces deux causes.
Afin de mieux comprendre l'impact de certaines maladies chroniques sur la santé, dont les cardiopathies ischémiques et les tumeurs malignes, Martel et Choinière (2007) ont mesuré, au Québec, pour la période de 2000 à 2003, le fardeau associé à ces maladies à l'aide de l'espérance de vie ajustée en fonction de l'état de santé en l'absence d'une maladie1. Les résultats ont démontré que ce sont les cardiopathies ischémiques et des tumeurs malignes qui, lorsqu'éliminées, engendreraient les gains en années vécues et en années vécues en santé les plus importants au cours de la période étudiée. Nous ignorons cependant si les gains obtenus en éliminant ces deux maladies seraient plus importants au Québec qu'ailleurs au Canada puisqu'à notre connaissance, le fardeau relié aux cardiopathies ischémiques et aux tumeurs malignes n'a jamais été comparé entre les provinces.
Dans ce contexte, nous proposons d'estimer le fardeau relié aux cardiopathies ischémiques et aux tumeurs malignes au Québec et dans les autres régions canadiennes. Notre approche repose sur l'utilisation de deux indicateurs, l'espérance de vie et l'espérance de vie ajustée en fonction de l'état de santé, calculés pour l'ensemble des causes et en l'absence de chacune de ces deux maladies. Ces deux indicateurs permettent d'examiner, sous l'angle de la durée de vie ainsi que de la qualité de vie, le rang qu'occupe chacune des régions canadiennes pour les cardiopathies ischémiques et les tumeurs malignes. Par ailleurs, les Québécois ont tendance à percevoir leur santé de façon plus positive que les Canadiens (INSPQ et ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec [MSSS] en collaboration avec l'Institut de la statistique du Québec [ISQ], 2006a; Dunstan, 2003; Bordeleau et Traoré, 2007). On peut donc se demander quel est l‘impact réel de cette déclaration positive lorsque l'on compare les valeurs du Québec à celles des autres régions canadiennes à partir de l'espérance de vie ajustée en fonction de l'état de santé. Cette perception plus positive pourrait-elle créer un biais affectant le positionnement du Québec au sein du Canada en ce qui concerne le fardeau de ces maladies? C'est également un des objectifs visés par cette étude.
Dans les sections qui suivent, nous décrivons les données et la méthodologie utilisées. Puis, nous présentons les résultats et les discutons en tenant compte des limites associées à la méthodologie retenue. Finalement, à partir des résultats obtenus, nous tentons de mieux comprendre la position du Québec, en ce qui concerne les cardiopathies ischémiques et les tumeurs malignes, en établissant des comparaisons avec les autres régions canadiennes.
1L'espérance de vie ajustée en fonction de l'état de santé en l'absence d'une maladie permet d'examiner l'impact d'une maladie sur la durée de vie (composante mortalité) et sur la qualité de vie (composante morbidité) des personnes qui en sont atteintes. En comparaison, l'espérance de vie en l'absence d'une cause permet de tenir compte uniquement de l'effet qu'a cette cause sur la composante mortalité. De façon plus générale, nous utiliserons le terme « espérance de santé » pour désigner les indicateurs qui permettent de considérer à la fois les deux composantes.