Programme de surveillance de l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) au Québec : cas cumulatifs 2002-2012
L'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) fait l'objet d'une collecte de données épidémiologiques à des fins de surveillance continue de l'état de santé de la population depuis avril 2002 au Québec. Le présent rapport décrit les principales caractéristiques des cas confirmés en 2012 et dont la collecte épidémiologique a été complétée, ainsi que la tendance des nouveaux diagnostics dans la période 2003-2012 (années complètes du programme).
Résultats saillants
Le nombre des tests de détection des anticorps contre le VIH à la hausse jusqu'en 2010 varie relativement peu depuis. La proportion confirmée positive se maintient à moins de 1 % depuis le début du programme. En 2012, elle est de 0,37 %.
Le nombre de cas en 2012 est de 625; il comprend 319 nouveaux diagnostics, 286 anciens et 20 cas non classés dans l'une ou l'autre de ces catégories. Il inclut aussi 111 cas rapportés sans numéro d'assurance-maladie (NAM)1 : 69 anciens diagnostics, 38 nouveaux diagnostics et 4 non classés.
Plus des trois quarts (76,2 %) des cas (anciens et nouveaux diagnostics) en 2012 sont rapportés chez les hommes.
La moitié (51,8 %) ont été infectés par des rapports sexuels entre hommes (54,6 % si on inclut les HARSAH qui s'injectent des drogues), 37,4 % par transmission hétérosexuelle et 6,2 % par usage de drogues injectables (UDI).
Les deux tiers (66,0 %) des cas chez les hommes et 26,2 % chez les femmes sont d'origine canadienne. À l'inverse, 62,4 % chez les femmes et 14,5 % chez les hommes sont originaires des Caraïbes (essentiellement d'Haïti) ou de l'Afrique subsaharienne.
Les cas sont concentrés dans la région de Montréal : celle-ci compte 25 % de la population du Québec, mais déclare 62,1 % des cas en 2012; une proportion de 10,1 % habitait dans la région de la Montérégie et 7,4 % dans celle de la Capitale-Nationale.
Concernant les cas sans NAM, la majorité sont aussi de sexe masculin (64,0 %) et ont leur résidence à Montréal (82,9 %). Ils sont moins comparables à l'ensemble pour l'origine ethnoculturelle et la catégorie d'exposition : 71,2 % ont été infectés par des rapports hétérosexuels non protégés (89,9 % de ces cas de transmission hétérosexuelle sans NAM sont reliés à l'origine d'un pays endémique); les HARSAH ne représentent que 27,0 % des cas sans NAM et les UDI, 1,8 %.
Dans les nouveaux diagnostics rapportés en 2012 (avec ou sans NAM), 68,1 % sont confirmés dans le groupe des 25-49 ans, 18,2 % chez les 50 ans et plus et 15,1 % chez les moins de 25 ans.
Quelle que soit l'année du diagnostic, les femmes sont en moyenne plus jeunes que les hommes. En 2012, l'âge médian au moment du diagnostic était de 36 ans chez les femmes et de 37 ans chez les hommes.
Plus de quatre-vingts pour cent (82,8 %) des infections nouvellement diagnostiquées en 2012 le sont chez les hommes.
Chez les femmes, 16,4 % ont été dépistées à l'occasion d'une consultation pour grossesse.
En 2012, le nombre des nouveaux diagnostics est de 239 chez les hommes : 74,2 % de ceux-ci sont chez des HARSAH (76,9 % en comptant les HARSAH/UDI), 20,5 % ont été infectés par des rapports hétérosexuels et 2,7 % par usage de drogues injectables.
Les nouveaux diagnostics sont au nombre de 55 chez les femmes en 2012 : 83,6 % de celles-ci ont été infectées par voie hétérosexuelle et 12,7 % en s'injectant des drogues.
Environ la moitié (49,1 %) des nouveaux diagnostics chez les femmes et 58,7 % de ceux attribués aux rapports hétérosexuels pour cette population sont chez des immigrantes de pays où le VIH est endémique.
Deux nouveaux diagnostics de transmission verticale sont rapportés en 2012 chez deux enfants nés au Canada. La transmission verticale reste marginale et rare chez les enfants nés de mères d'origine canadienne. La majorité des cas enregistrés dans cette catégorie d'exposition depuis le début du programme sont des immigrants infectés à la naissance dans leurs pays d'origine.
La transmission par des dons de sang, des greffes d'organes et de tissus semble contrôlée au Québec. Aucun nouveau diagnostic n'est relié aux dons sanguins en 2012. Les cas dans cette catégorie d'exposition depuis 2002 sont rapportés pour des personnes qui peuvent avoir été infectées avant les mesures de sécurité des dons de sang ou à l'extérieur du Canada. La grande majorité avait plus de 45 ans et les rares cas plus jeunes sont des immigrants.
Le dépistage a été tardif dans 18,5 % des nouveaux diagnostics en 2012. Au moment de leur premier test positif, les personnes concernées étaient rendues au stade du sida ou des infections chroniques symptomatiques du VIH.
Près de la moitié (46,4 %; 148/319) des personnes nouvellement diagnostiquées en 2012 n'avaient jamais eu de dépistage du VIH auparavant; 56 (17,8 %) avaient eu leur dernier test négatif dans les douze derniers mois et étaient donc récemment infectées; les autres situaient ce dépistage négatif plus loin dans le temps ou en ignoraient la date.
La grande majorité (51/56) des cas nouvellement diagnostiqués et dont on sait que l'infection était récente sont des HARSAH. Un peu plus d'un tiers (20/56) de ces cas récents étaient relativement jeunes : ils avaient entre 15 et 30 ans.
Parmi les nouveaux diagnostics enregistrés depuis le début du programme, plus de la moitié des cas âgés de 30 ans et plus n'avaient jamais été dépistés pour le VIH auparavant (79,4 % chez les 60 ans ou plus, 63,5 % pour les 50-59 ans, 57,3 % chez les 40-49 ans et 52,8 % dans le groupe de 30-39 ans).
La tendance du nombre des nouveaux diagnostics est à la baisse dans l'ensemble (p de tendance linéaire < 0,01)2.
Cette diminution cache une tendance à la hausse chez les jeunes HARSAH (< 35 ans, p = 0,03).
Limites et interprétation des résultats
Les données du programme ne permettent pas de préciser la prévalence ou l'incidence du VIH au Québec. Elles portent sur les cas confirmés depuis avril 2002 et dont la collecte épidémiologique est complétée; tandis qu'elles excluent les cas dépistés avant son implantation qui n'ont pas eu de prescription d'un test depuis avril 2002, les cas confirmés depuis avril 2002 qui ne sont pas enregistrés, ainsi que les PVVIH non dépistées qui ignorent qu'elles ont le VIH.
Le programme a une faible capacité de différencier les infections récentes des anciennes tardivement dépistées dans les nouveaux diagnostics. Les infections nouvellement diagnostiquées chez des personnes qui n'avaient jamais eu de dépistage du VIH auparavant et chez celles avec un test négatif de plus d'un an ou non daté pouvaient être récentes ou anciennes; elles représentent 82,5 % des nouveaux diagnostics.
De toute évidence, le virus se transmet encore activement au Québec, surtout parmi les jeunes HARSAH. La tendance des nouveaux diagnostics à la hausse chez ces jeunes est une indication d'une possible transmission à la hausse chez les HARSAH, le groupe de population au centre de l'épidémie du VIH au Québec.
1Les cas sans NAM sont enregistrés depuis avril 2012.
2Les cas sans NAM n'étant enregistrés que depuis avril 2012, la tendance dans la période 2003-2012 a été testée sur les cas qui ont un NAM.