4 avril 2002

Les risques à la santé associés à l’utilisation de pesticides à des fins esthétiques

Article
Auteur(s)
Onil Samuel
B. Sc., expert et conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec

Introduction

L’engouement de plus en plus marqué pour l’entretien paysager et l’horticulture ornementale est en grande partie responsable de l’utilisation accrue de pesticides à des fins esthétiques. Cette augmentation de l’utilisation domestique des produits de synthèse ne manque pas d’inquiéter de nombreux citoyens, les groupes environnementaux, de même que les intervenants du secteur public (santé publique et environnement). C’est dans ce contexte que le ministère de l’Environnement du Québec a créé le Groupe de réflexion sur les pesticides en milieu urbain dont le mandat était de dégager des recommandations visant à réduire l’utilisation des pesticides en milieu urbain (voir l'encadré). Le présent article présente d’abord un bref profil de l’utilisation des pesticides à des fins esthétiques, pour aborder ensuite la question des effets sur la santé associés à leur utilisation ainsi que les orientations proposées par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

En mars dernier, le Groupe de réflexion sur les pesticides en milieu urbain déposait officiellement un rapport intitulé « Pour la protection de la santé et de l’environnement, la gestion environnementale en milieu urbain ». Ce rapport constitue la synthèse de 48 mémoires présentés par différents groupes ainsi que des points de vue exprimés lors des journées de consultation par divers organismes issus des milieux universitaires et environnementaux, d’ordres professionnels, du monde municipal, d’associations de professionnels de fabricants et d’utilisateurs de pesticides. Dans la démarche entreprise par le groupe, deux principes ont orienté les recommandations du groupe soit le principe de précaution et celui d’exemplarité. Le premier indique qu’en l’absence de certitude scientifique, il faut observer une certaine prudence tandis que le second suggère que pour favoriser le changement d’attitudes chez les citoyens, les autorités gouvernementales et les institutions publiques doivent donner l’exemple. De plus, la gestion environnementale est identifiée comme point central tel qu'en témoignent les recommandations suivantes:

  • Interdire les pesticides sur les espaces verts publics et municipaux et également sur tous les autres espaces verts lorsqu’ils sont appliqués par un service d’entretien, sauf lorsque des seuils d’intervention sont atteints.
  • Limiter l’accès aux pesticides dans les points de vente.
  • Former les intervenants qui gravitent autour du citoyen (vendeurs de pesticides, professionnels qui offrent des services, professionnels des lieux publics et parapublics) afin qu’ils puissent les conseiller en matière de gestion environnementale.
  • Mettre sur pied des campagnes d’information, de sensibilisation et d’éducation de la population aux risques inhérents aux pesticides, à la gestion environnementale et aux méthodes alternatives.
  • Favoriser la mise en disponibilité des méthodes alternatives et de produits moins nocifs.
  • Créer un encadrement réglementaire adéquat, comprenant l’adoption prochaine d’un Code de gestion des pesticides, qui pourra accélérer l’implantation de la gestion environnementale.
  • Favoriser la recherche relative aux effets sur la santé et l’environnement ainsi que sur les solutions alternatives aux pesticides.

Source : Gouvernement du Québec, Rapport du Groupe de réflexion sur les pesticides en milieu urbain, 2002. Pour la protection de la santé et de l’environnement, la gestion environnementale en milieu urbain, 63 p. Le document complet peut être consulté à l’adresse Internet suivante : http://www.menv.gouv.qc.ca/sol/pesticid/reflexion/rapport-pesticide.pdf

Utilisation des pesticides au Québec

Les pesticides sont des produits qui visent à limiter, détruire ou repousser les ravageurs. Ils incluent les herbicides, insecticides et fongicides, produits algicides, répulsifs d’animaux et d’insectes, produits nettoyants et antimicrobiens, produits de préservation des matériaux et du bois et dispositifs contre les insectes et les rongeurs1.Selon les données compilées à ce jour, les ventes de pesticides domestiques, soit ceux utilisés par des particuliers, ont augmenté de près de 600 % entre la fin des années 1970 et le début des années 19902 et de 60 % de 1992 à 19963. Dans le secteur de l’horticulture ornementale, qui concerne les produits utilisés par les firmes professionnelles d’entretien des espaces verts, l’augmentation a également été substantielle au cours de la dernière décennie.

Dans le secteur domestique, les statistiques de vente pour 19963 démontrent que ce sont surtout des insecticides qui sont utilisés par les particuliers avec 84,4 % des ventes. Les produits anti-mites représentaient à eux seuls 77 % des insecticides et 60 % de toutes les ventes domestiques. Les herbicides aryloxyacides (2,4-D, mécoprop) et les insecticides organophosphorés (malathion, diazinon), carbamates (carbaryl) et pyréthrinoïdes (deltamethrine, perméthrine) représentaient quant à eux près de 6 % des ventes. L’ensemble des herbicides ainsi que les fongicides, rodenticides, huiles minérales et autres produits ne constituent que 4,5 % des ventes.

Dans le cas de l’horticulture ornementale, la majorité des produits vendus à des utilisateurs professionnels étaient des herbicides aryloxyacides (2,4-D, mécoprop et dicamba), soit 78,4 % des ventes. Les fongicides dérivés de l’acide phtalique (captane) et les insecticides organophosphorés représentaient respectivement 16,4 et 5,1 % des ventes totales pour ce secteur3.

Les pesticides et la santé

Compte tenu du nombre considérable d’études traitant des risques à la santé des pesticides, il a été jugé plus à propos pour le présent article de mettre l’emphase sur les études traitant des risques d’exposition des enfants en milieu résidentiel. Les enfants sont généralement plus à risque d’être exposés aux pesticides en raison de leur modèle comportemental particulier et de leur susceptibilité plus importante. Les effets néfastes peuvent en effet être plus marqués chez ces derniers en raison de l’immaturité et de la sensibilité de leurs organes cibles.

Les intoxications aiguës

Les intoxications aiguës mettant en cause les pesticides sont habituellement associées à une exposition significative par ingestion ou contact cutané. Pour la période de 1995 à 2000, le Centre Anti-Poison du Québec a répertorié annuellement une moyenne de 1 518 cas d’intoxication aiguë aux pesticides4. Environ 45 % de ces cas concernaient des enfants de 0 à 15 ans. Les données révèlent que 63 % de l’ensemble des personnes exposées ont présenté des symptômes et que 15 % se sont rendues à l’hôpital. Il est impossible de préciser le nombre d’intoxications qui sont survenues à la suite de l’application de pesticides pour l’entretien paysager, mais près d’une centaine de cas liés à un contact direct avec le gazon traité seraient déclarés annuellement4. Près de 40 % des intoxications répertoriées résultent d’une exposition par voie orale, principalement chez les enfants, ce qui met en lumière les risques d’un mauvais entreposage de ces produits à la maison.

Les effets chroniques potentiels

Si les risques d’intoxications aiguës reliées à certains pesticides sont bien connus, il n’en va pas de même en ce qui concerne les effets chroniques, effets qui soulèvent d’ailleurs de nombreuses inquiétudes. Plusieurs études épidémiologiques traitant de cette question ont été publiées au cours des dernières années. Certaines d’entre elles laissent supposer un risque plus important de développer certaines formes de cancers chez les enfants qui ont été exposés à des pesticides en milieu résidentiel (à l’extérieur comme à l’intérieur de la résidence) ou dont les mères sont exposées dans le même milieu pendant la grossesse (voir le tableau1).

Tableau 1 : Principaux résultats d’études sur l’association entre l’exposition aux pesticides et le cancer chez les enfants

Buckley et al.5 ont observé certaines associations entre l’exposition résidentielle aux pesticides et la survenue de leucémie chez les enfants. Les associations étaient significatives dans les cas où les mères étaient exposées de façon intensive à des pesticides domestiques pendant la grossesse et dans les cas d’exposition directe des enfants moins d’une fois par semaine ou de façon plus intensive. Lowengart et al.6 ont aussi démontré la possibilité d’un risque accru de ce type de cancer chez les enfants dont les parents utilisaient des pesticides dans la maison une fois ou plus par semaine ou dans le jardin et/ou dans la cour une fois ou plus par mois pendant la grossesse et l’allaitement. Meinert et al.7 notent une association significative entre l’utilisation de pesticides dans le jardin et la survenue de leucémie chez les enfants. Les auteurs font ressortir que, dans les communautés ayant eu une incidence élevée de leucémie chez les enfants entre 1984 et 1993, la prévalence d’utilisation de pesticides dans le jardin était plus importante que dans les autres communautés étudiées.

Dans une autre étude, Buckley et al.8 notent que la fréquence d’utilisation d’insecticides domestiques par la mère pendant la grossesse serait associée à une augmentation du risque de contracter un lymphome non hodgkinien. Une association a aussi été démontrée lorsque la mère était exposée pendant des travaux d’extermination autour de la maison. L’association la plus statistiquement significative fut observée pour l’exposition directe des enfants (p < 0,01 pour les lymphomes à cellules B et T, les lymphomes à grandes cellules et le groupe d’âge de moins de 6 ans et p < 0,05 pour les lymphomes de Burkitt, les leucémies lymphoblastiques aiguës et le groupe d’âge de 6 ans et plus). Selon les auteurs, l’exposition postnatale directe des enfants aux pesticides serait significativement associée au lymphome non hodgkinien.

Leiss et Savitz9 ont effectué une étude cas-témoin chez des enfants de moins de 15 ans. Une association forte mais imprécise sur les pesticides en cause fut démontrée entre l’utilisation de pesticides dans la cour pendant la période comprise entre la naissance et deux ans avant le diagnostic ou au cours de la période de deux ans précédant le diagnostic et la survenue de sarcome des tissus mous.

Une étude cas-témoin10 indique des associations significatives entre le cancer du cerveau chez les enfants et l’exposition aux pesticides lorsque les cas sont analysés en faisant des comparaisons avec des témoins qui étaient choisis parmi les amis des jeunes malades. De telles associations ont été démontrées pour l’utilisation d’insecticides dans la maison, pour l’utilisation du diazinon dans le jardin et le verger et l’utilisation d’herbicides pour contrôler les mauvaises herbes dans la cour. Lorsque les comparaisons ont été effectuées avec un groupe témoin composé d’enfants souffrant aussi d’un cancer, des associations positives significatives ont été observées entre autres pour l’utilisation de pesticides en aérosol dans la maison, pour l’utilisation d’insecticides dans le jardin ou le verger et l’utilisation d’herbicides dans la cour. Les auteurs notent que malgré les incertitudes liées aux aspects méthodologiques, les résultats suggèrent des associations significatives entre le cancer du cerveau chez les enfants et plusieurs situations d’utilisation de pesticides en milieu résidentiel. Pogoda et Preston-Martin11 n’ont cependant pas observé de risque accru de cancer du cerveau chez des jeunes enfants ayant été exposés lors de l’utilisation d’insecticides, d’herbicides ou de fongicides dans la cour ou le jardin et ce, que l’exposition ait eu lieu en cours de grossesse ou en période postnatale.

Dans une étude cas-témoin, Daniels et al.12 ont évalué la relation entre la survenue de neuroblastomes chez les jeunes enfants et l’exposition résidentielle aux pesticides. Ils notent une association modeste dans le cas d’utilisation de pesticides dans la maison et le jardin. Selon les résultats présentés, l’utilisation d’herbicides était plus fortement associée aux neuroblastomes que l’utilisation d’insecticides. Gold et al.13 ont observé que les enfants avec une tumeur du cerveau avaient été davantage exposés aux insecticides que les témoins et que cette relation approchait le seuil significatif.

Le cas du 2,4-D

Parmi les produits qui soulèvent le plus d’inquiétude, on retrouve le 2,4-D, un des herbicides phénoxys les plus utilisés pour l’entretien des gazons. Malgré les incertitudes qui persistent encore sur le risque associé à ces herbicides, l’Agence internationale de recherche sur le cancer a classé ce groupe chimique comme cancérigène possible pour l’humain13. Bien que l’on n’ait pas vraiment réussi à expliquer complètement comment le 2,4- D pouvait induire des cancers, certains auteurs pensent que ce produit agirait par perturbation du système immunitaire15. Au début des années 1990, un groupe d’expert a conclu que même si les relations de causalité entre l’exposition au 2,4-D et la survenue de lymphome non hodgkinien était loin d’être prouvée, l’évidence d’une telle relation était fortement suggérée et que des investigations plus poussées étaient nécessaires. Selon l’évaluation du groupe, l’association entre l’exposition au 2,4-D et les sarcomes des tissus mous ou la maladie de Hodgkin serait faible mais pas impossible. Aucune relation n’a pu être établie avec toutes les autres formes de cancers16. Enfin, une étude de l’Université de Guelph17 laisse à penser que dans des circonstances normales, les dangers que posent l’utilisation du 2,4-D pour les écosystèmes et les personnes qui les fréquentent seraient minimes.

Une étude récente18 indique que les classes chimiques des herbicides phénoxys et du dicamba augmenteraient de façon statistiquement significative le risque de développer un lymphome non hodgkinien. Une telle constatation a aussi été faite pour l’exposition aux carbamates et aux insecticides organophosphorés. L’analyse multivariée indique que, pris individuellement, le 2,4-D, le mécoprop et le dicamba augmenteraient significativement le risque de lymphome non hodgkinien. Certaines relations statistiquement significatives ont aussi été rapportées pour des insecticides comme le malathion et le carbaryl. Pour l'ensemble des associations, les rapports de cote se situaient entre 1,3 et 2,1. Il faut par ailleurs spécifier que l’étude a tenu compte de nombreuses variables confondantes et que, contrairement à plusieurs études précédentes qui mettaient l’emphase sur de petites régions géographiques ou sur un groupe professionnel en particulier, celle-ci a porté sur six provinces canadiennes, diverses pratiques agricoles et différents types d’exposition professionnelle et non-professionnelle aux pesticides.

En résumé, la plupart des auteurs des études sur le cancer des enfants en rapport avec l’exposition aux pesticides en milieu résidentiel notent que des biais méthodologiques propres aux études cas-témoin ont pu influencer leurs résultats (biais de rappel, difficulté à bien préciser les niveaux d’exposition, comparaisons multiples et taille des échantillons). Par ailleurs, les études épidémiologiques ne ciblent que très rarement un pesticide en particulier et parlent plutôt, de façon générale, de types de pesticides comme les herbicides ou les insecticides. Quoiqu’il en soit, les résultats pris dans leur ensemble supposent un risque de cancer non négligeable pour de nombreux scénarios d’exposition aux pesticides.

Effets sur la reproduction

Certaines études soulèvent la possibilité d’un lien entre l’exposition aux pesticides chez les femmes enceintes et la survenue de certaines anomalies congénitales. Quoiqu’une telle relation ait surtout été observée lors d’études portant sur les utilisateurs professionnels, quelques études supportent aussi l’existence d’un tel lien chez les utilisateurs en milieu résidentiel19,20. Par ailleurs, certains auteurs ont observé une relation entre le nombre de mort-nés et la proximité résidentielle avec le lieu d’application de pesticides pyréthrinoïdes, organohalogénés et organophosphorés21. Une étude canadienne récente démontre qu’on peut retrouver du 2,4-D dans le sperme d’utilisateurs professionnels, ce qui pourrait être en lien avec l’augmentation significative de l’incidence des avortements spontanés chez la conjointe22,23. Bien que le 2,4-D soit massivement utilisé en horticulture ornementale, nous ne possédons que très peu de données sur les impacts de ce type de pesticides pour la population en général.

Effets sur le développement

Un nombre grandissant d’auteurs soupçonnent une relation entre l’exposition à certains contaminants pendant la grossesse et la survenue de problèmes chez l’enfant. C’est le cas de l’exposition à certains pesticides neurotoxiques comme les organophosphorés et les organochlorés et la survenue de problèmes d’apprentissage et de développement chez les enfants24. Certains pesticides pourraient aussi interrompre le processus de développement neurologique lors de la période critique de développement et provoquer des effets néfastes sur les fonctions sensorielles, motrices et cognitives25. Les données récentes concernant les effets des organophosphorés en période de développement précoce du système nerveux ont par ailleurs amené le U.S. EPA et Santé Canada à réévaluer la toxicité de ces produits. C’est d’ailleurs sur la base de ces nouvelles évaluations que des restrictions sévères d’utilisation viennent d’être imposées pour des insecticides très utilisés en milieu résidentiel en entretien paysager tel le chlorpyrifos et le diazinon.

Effets sur le système immunitaire

Bien que les études concernant les effets des pesticides sur le système immunitaire soient encore très limitées, certaines indiquent la probabilité d’une relation causale entre l’exposition aux pesticides et l’augmentation de maladies infectieuses, la chute de production d’anticorps et les réactions d’hypersensibilité retardée. Repetto et Baliga26 ont effectué une recherche exhaustive sur les effets des pesticides en regard des fonctions du système immunitaire; ils ont noté que plusieurs pesticides communément utilisés en milieux résidentiel et agricole pourraient supprimer la réponse normale du système immunitaire humain.

Effets endocriniens

Les effets des perturbateurs endocriniens sont également peu documentés, mais la liste des pesticides qui pourraient posséder un tel potentiel s’allonge à mesure que les résultats de nouvelles recherches sont publiés27, 28. Des pesticides couramment utilisés comme le 2,4-D, le malathion et le bénomyl sont des substances pour lesquelles des effets perturbateurs sur le système endocrinien ont été notés dans la littérature scientifique.

Orientations proposées

En considérant les résultats des études réalisées, les éléments qui demeurent moins connus et l’existence de groupes d’individus plus sensibles, le groupe scientifique sur les pesticides de l’INSPQ considère qu’il existe suffisamment d’éléments pour justifier la prudence et préconiser l’application du principe de précaution dans le cas de l’utilisation de pesticides pour des raisons esthétiques. Ce principe reconnu en santé publique s’applique aux situations où la prise de décisions doit être fondée sur le risque d’un préjudice grave ou irréversible, dans un contexte d’incertitude scientifique très élevée.

Il va de soi qu’un meilleur encadrement de l’utilisation des pesticides et des stratégies d’information sur ces produits s’impose. Il apparaît cependant préférable de favoriser une transition par étape supportée par des activités de sensibilisation de la population. Les modifications aux cadres actuels de gestion de l’utilisation de pesticides pour des usages esthétiques devraient particulièrement viser l’atteinte des objectifs suivants :

- Protéger les groupes les plus sensibles de la population

En raison des considérations déjà énumérées, il apparaît important de mettre en place des moyens visant à protéger les groupes plus vulnérables aux pesticides que sont les enfants et les femmes enceintes. Ces moyens devraient entre autres permettre de diminuer l’exposition involontaire dans les endroits publics comme les cours d’écoles et de garderies, les parcs et les terrains de jeux.

- Rationaliser l’utilisation de pesticides en milieu résidentiel

Actuellement, les consommateurs peuvent recourir à des services professionnels ou effectuer les traitements eux-mêmes. Ceux-ci ont directement accès à la majorité des pesticides couramment utilisés par les firmes professionnelles, puisqu’ils sont en vente libre dans la plupart des centres-jardins et dans plusieurs magasins à grande surface. Aucun mécanisme obligatoire d’information au client n’est prévu dans les cas de la vente libre. L’utilisation des pesticides par les particuliers augmente souvent les risques d’exposition en raison d’une méconnaissance des pratiques sécuritaires qui doivent nécessairement être respectées lors de l’entreposage, de la préparation, de l’application et après l’application des pesticides. Il y aurait donc lieu de restreindre l’accès des pesticides aux consommateurs en gardant, par exemple, dans les centres de vente, les produits derrière un comptoir et en s’assurant que les vendeurs aient reçu une formation adéquate afin de conseiller leur clientèle sur les pratiques sécuritaires.

Il est tout aussi important de revoir le mode de fonctionnement des firmes professionnelles (ex. publicité, plans de traitement proposés) afin de favoriser une diminution de l’exposition aux pesticides utilisés en entretien paysager. Parmi les moyens qui permettent d’éviter le recours systématique aux pesticides chimiques pour des fins esthétiques, l’approche de lutte intégrée apparaît être une solution valable pour une gestion plus rationnelle et sécuritaire des pesticides. À la ville de Québec, par exemple, la mise en application des principes de lutte intégrée a permis une réduction de l’ordre de 50 % de l’utilisation de pesticides. Par contre, une telle approche ne pourra être efficace sans la mise sur pied de mécanismes de contrôle et le développement de seuil d’intervention.

- Informer la population sur les risques à la santé associés aux pesticides et sur l’existence des alternatives à ces produits

Il est probable que les consommateurs seraient plus tolérants face aux organismes nuisibles s’ils connaissaient mieux les risques découlant de l’usage de produits anti-parasitaires. Seule l’éducation du public peut modifier la perception négative de la population face aux mauvaises herbes et aux insectes. Ainsi, toute modification importante du cadre actuel d’utilisation de ces pesticides devrait être accompagnée d’une campagne de sensibilisation de grande envergure sur les risques pour la santé et l’environnement, afin de bien faire comprendre aux citoyens les motifs de ces changements. Une campagne de promotion des méthodes d’entretien paysager sans usage de pesticides devrait aussi être mise de l’avant.

- Documenter davantage l’importance du risque pour la santé et l’environnement

Bien que les données disponibles permettent déjà de supporter l’application du principe de précaution en matière d’utilisation de pesticides pour des «raisons esthétiques», nous ne possédons que peu d’information sur les niveaux d’exposition de la population et sur la contamination environnementale qui découlent de l’utilisation de ces produits. Il est donc souhaitable de favoriser le développement des connaissances afin de mieux évaluer les risques et les effets sur la santé des pesticides utilisés en entretien paysager et ce, tant en milieu urbain que rural.

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