Conséquences sur la santé
Les études qui se sont intéressées aux conséquences sur la santé de la VRA concernent essentiellement les victimes (voir le tableau 5 pour un résumé), et, par conséquent, peu d’informations sont disponibles relativement aux auteurs de la VRA.
Conséquences immédiates
La VRA peut être associée à plusieurs conséquences, dont des répercussions immédiates affectant la santé physique. O’Leary et ses collaborateurs mentionnent que 25 % des victimes de VRA physique provenant de leur échantillon de 2 363 adolescents avaient été blessées [92]. L’Enquête PAJ a révélé que les jeunes vivant des situations de cooccurrence de différentes formes de VRA sont plus susceptibles de rapporter avoir subi des blessures (ecchymoses, coupures), des douleurs physiques ou de nécessiter une visite médicale suite à la VRA subie [27]. Près du tiers des jeunes déclarent avoir été bouleversés, et près du quart mentionnent avoir eu peur après un épisode de VRA; ces sentiments étant plus souvent mentionnés par les filles que les garçons. Les filles indiquent avoir davantage des symptômes de stress post-traumatique suivant l’événement, incluant de la réviviscence, de l’évitement et de l’hypervigilance [23].
Conséquences à moyen et long terme
Outre les conséquences directement en lien avec les épisodes de VRA subis, la littérature suggère que la VRA est associée à une panoplie de répercussions négatives ultérieures sur la santé physique et mentale, incluant des sentiments de tristesse, une perception de soi plus négative, de la détresse psychologique, des symptômes de dépression, des idéations suicidaires, de même que des tentatives de suicide [52,93,94]. La VRA serait aussi associée à des conséquences somatiques et des troubles alimentaires [95]. De plus, comparativement à leurs pairs non victimes, les jeunes victimes de VRA sont plus susceptibles de présenter des problèmes de consommation d’alcool et de drogues [96]. Il est toutefois important de souligner que la majorité des études réalisées sont transversales, et qu’il est donc difficile de statuer si les corrélats identifiés sont des conséquences de la VRA ou plutôt des facteurs de risque.
L’étude transversale réalisée par Vagi et ses collaborateurs auprès d’un échantillon représentatif de 9 900 jeunes Américains rapportant avoir une relation amoureuse a, par exemple, identifié différentes conséquences associées à la VRA. Plusieurs d’entre elles peuvent avoir des répercussions considérables sur la santé. Ainsi, selon cette enquête, les filles et les garçons victimes de VRA physique sont plus susceptibles d’avoir des pensées suicidaires ou d’avoir fait une tentative de suicide, d’être impliqués dans une bataille, de transporter une arme, d’être cyberintimidés, de consommer régulièrement de l’alcool, de la marijuana ou de la cocaïne, d’être actif sexuellement et d’avoir eu une relation sexuelle avec plus de quatre personnes que les filles et les garçons non-victimes. Chez les filles et garçons victimes de VRA physique et sexuelle (cooccurrentes), ces comportements étaient plus prévalents comparativement à leurs pairs non-victimes ou à leurs pairs uniquement victimes de VRA physique. Ces auteurs ont aussi rapporté que les filles victimes de VRA sexuelle étaient plus à risque que leurs pairs non-victimes d’avoir des pensées suicidaires, de faire des tentatives de suicide, d’avoir des altercations physiques, d’être intimidé sur Internet, ainsi que de consommer de l’alcool, notamment d’avoir des comportements de « calage ». Les garçons victimes de VRA sexuelle étaient quant à eux plus à risque que ceux non-victimes d’adopter les comportements à risque mentionnés ci-dessus, ainsi que d’être actifs sexuellement et d’avoir des relations sexuelles avec plus de quatre partenaires [97].
Les quelques études longitudinales disponibles attestent également des répercussions négatives de la VRA. Par exemple, Chiodo et ses collaborateurs ont rapporté dans leur étude longitudinale menée auprès de 519 filles que celles qui se trouvaient dans un contexte de VRA mutuelle (les deux partenaires sont à la fois victimes et agresseurs) rapportaient deux ans plus tard de plus hauts taux d’idéations suicidaires, ainsi que plusieurs autres conséquences liées à l’école (rendement scolaire moindre, moins de sentiment d’appartenance à l’école) et aux pairs (comportements d’agression et délinquance) [98]. Les idéations suicidaires ont aussi été identifiées par une autre étude longitudinale comme étant une conséquence de la VRA physique deux ans après qu’elle ait eu lieu [99].
Exner-Cortens et ses collaborateurs ont, quant à eux, examiné les données amassées auprès de 5 681 élèves (sous-échantillon) par l’étude américaine National Longitudinal Study of Adolescent Health. Leurs résultats révèlent que cinq ans après avoir rapporté avoir été victimes, les jeunes femmes adultes (18 à 25 ans) qui avaient vécu de la VRA de nature psychologique ou physique à l’adolescence avaient plus d’épisodes de consommation abusive d’alcool, de symptômes dépressifs, d’idéations suicidaires et plus de consommation de cigarettes. Chez les garçons ayant été victimes de VRA, il a été possible d’observer cinq ans plus tard davantage de comportements antisociaux, d’idéations suicidaires, ainsi qu’une consommation plus élevée de marijuana [100]. Outre les conséquences sur le plan de la santé physique et de la santé mentale, des conséquences affectant l’adaptation scolaire (ex. : une baisse des résultats, absentéisme scolaire, décrochage) sont aussi répertoriées [93,101].
Notons que différents facteurs peuvent influencer les conséquences de la VRA, dont la cooccurrence des différentes formes de VRA. Rares sont les études qui ont exploré les possibles différences quant aux conséquences en fonction des formes de VRA dont l’adolescent a été victime. Cependant, une étude rétrospective d’Eshelman et Levendosky a été menée auprès de 499 participantes âgées de 19 et 20 ans au sujet des conséquences de la VRA en fonction des formes subies. Elle a rapporté qu’avoir déjà vécu de la VRA psychologique ou sexuelle prédit la dépression ou les troubles de stress post-traumatique, alors qu’avoir vécu de la VRA physique et sexuelle prédit des problèmes de santé [102]. Comparativement aux adolescents impliqués comme victimes ou auteurs de violence verbale seulement, ceux impliqués dans des épisodes de VRA verbale et physique démontrent plus de symptômes physiques, de détresse psychologique et de dépression [96].
La VRA a aussi été associée à un risque de revictimisation ultérieure. Par exemple, dans l’étude menée par Exner-Cortens et ses collaborateurs, tant les filles que les garçons victimes de VRA étaient plus susceptibles que leurs pairs non-victimes de revivre de la VRA cinq ans plus tard [100]. Il faut aussi mentionner que chez les jeunes victimes de VRA qui ont été victimes de traumas interpersonnels pendant l’enfance, les conséquences peuvent se trouver amplifiées. Les adolescentes victimes à la fois d’agression sexuelle dans l’enfance et de VRA ont, par exemple, 6 à 7 fois plus de probabilité de présenter des problèmes extériorisés que celles qui ont soit été uniquement victimes d’une agression sexuelle ou uniquement victimes de VRA [103].
En raison de la gravité des conséquences de la VRA sur le développement psychosocial des adolescents victimes, mais également du fait que vivre cette problématique à l’adolescence augmente le risque d’en être victime à l’âge adulte [59,104,105], l’implantation d’approches préventives efficaces est prioritaire. La prochaine section offre un survol des initiatives de prévention dans le domaine de la VRA.
Tableau 5 - Principales conséquences de la violence dans les relations amoureuses des jeunes sur la santé
Conséquences immédiates |
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Conséquences à moyen et long terme |
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Problèmes d’adaptation ou revictimisation |
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