Effets sur la santé de la consommation du cannabis

Les publications abordant les effets sur la santé de la consommation de cannabis se sont multipliées au cours des dernières années dans la foulée de la légalisation et de la commercialisation de cette substance à des fins médicales et non médicales. Bien qu’il soit rarement possible d’identifier le cannabis comme une cause directe ou unique, certaines associations entre la consommation de cannabis et la survenue d’effets sur la santé se renforcent et se précisent. Les effets de la consommation du cannabis présentés ci-dessous sont principalement ceux pour lesquels des associations notables ont été identifiées dans la littérature.

Des maladies respiratoires et mentales pourraient être engendrées par la consommation régulière de cannabis.

Effets neurologiques et cognitifs 

Le début précoce de la consommation de cannabis et son intensité peuvent nuire au développement du cerveau des adolescents et des jeunes adultes (1,2). La consommation de cannabis peut affecter certaines fonctions cognitives comme l’apprentissage, la mémoire et l’attention (3). Une consommation hebdomadaire ou plus fréquente est par ailleurs associée à des difficultés scolaires (4). L’usage fréquent de cannabis contribue à allonger la période d’abstention nécessaire pour que les effets cognitifs se résorbent (4). Ainsi, plus la consommation débute tôt et plus elle est fréquente, plus grands seront les risques d’avoir des fonctions cognitives altérées et plus il faudra attendre longtemps après avoir cessé l’usage pour retrouver toutes ses capacités.

Effets sur la santé mentale

Plusieurs études ont établi des liens entre la consommation régulière de cannabis et les risques d’apparition de symptômes ou troubles psychotiques. Ces risques s’accroissent particulièrement chez les personnes ayant commencé leur consommation tôt à l’adolescence, ainsi que chez les personnes ayant des antécédents psychiatriques personnels ou familiaux (4).  L’usage de cannabis peut être associé à la survenue de symptômes psychotiques pendant l’intoxication et ces symptômes peuvent être plus intenses chez les personnes qui consomment des produits à haute teneur en THC (4). Il est également rapporté un lien entre la consommation de cannabis et le développement de la schizophrénie et d’autres troubles psychotiques, les usagers fréquents (quotidiens ou quasi quotidiens) étant plus vulnérables (3,4). L’usage des produits de cannabis d’une teneur en THC de plus de 10% est associé à un risque accru de développer d’autres troubles mentaux, tels que les troubles dépressifs ou d’anxiété sociale (3,4). Les adolescents et jeunes adultes faisant usage de cannabis sont plus à risque d’avoir des idées suicidaires et de faire des tentatives de suicide que ceux qui n’en font pas usage (3,4). Toutefois, ces associations ne permettent pas d’établir si le cannabis en est la cause directe. 

Troubles de l’usage au cannabis (dépendance au cannabis)

La consommation de cannabis peut conduire à un problème de dépendance à cette substance (trouble d’usage) (4). Plus on commence à consommer jeune et plus on consomme fréquemment, plus le risque est élevé (3). Les hommes sont plus susceptibles de développer une dépendance plus sévère que les femmes (3). Les consommateurs de cannabis sont également plus souvent à risque de présenter un problème de dépendance à l’alcool et aux autres drogues (4). On observe aussi que les personnes qui consomment du cannabis et qui sont des fumeurs réguliers de tabac sont plus à risque de développer une dépendance au cannabis (3).

Effets respiratoires

Une personne qui fume un joint de cannabis inhale beaucoup plus de monoxyde de carbone et   de goudron qu’une personne qui fume une cigarette (6). Ceci est probablement dû au fait d’inhaler plus profondément et plus longtemps la fumée de cannabis que celle du tabac, et au fait que le joint n’est pas muni d’un filtre. Comme pour la cigarette, la consommation prolongée de cannabis peut provoquer des épisodes de bronchite, une respiration sifflante, de la toux et la production de sécrétions (mucus) (3). La plupart de ces symptômes peuvent s’améliorer suivant l’arrêt de la consommation (3). L’état actuel de la science n’a toutefois pas démontré que la fumée de cannabis peut causer des maladies pulmonaires obstructives chroniques comme l’emphysème ou la bronchite chronique ou encore de l’asthme (3).

Intoxications accidentelles

La légalisation du cannabis et la commercialisation de produits du cannabis qui sont survenus ici et ailleurs au cours des dernières décennies ont augmenté l’exposition involontaire des enfants au cannabis et le nombre d’appels aux centres antipoison pour intoxication, notamment au Colorado (4,7). Les manifestations de ces intoxications semblent plus sévères chez les enfants que chez les adultes, et nécessitent dans certains cas une prise en charge en unité de soins intensifs (3). Les symptômes parfois retrouvés chez les enfants sont des manifestations neurologiques (somnolence, léthargie, ataxie, étourdissement et coma), des vomissements et plus rarement la détresse respiratoire (3).

Risques de cancers

La fumée de cannabis renferme un bon nombre de composants chimiques cancérigènes. La consommation de cannabis est associée à un sous-type de cancer testiculaire (3,4). Toutefois, le lien entre la consommation de cannabis et d’autres types de cancers n’a pas été établi. Ceci pourrait être dû au manque d’études dans ce domaine et au fait que la plupart des cancers prennent du temps à se développer (3).

Les conséquences périnatales

L’ingrédient actif du cannabis, le THC, a la propriété de traverser le placenta. Il affecte donc le développement des organes chez le fœtus et notamment son cerveau (4). La consommation de cannabis chez les femmes enceintes est associée à un faible poids de naissance (3). Des études indiquent que les enfants dont les mères ont consommé du cannabis présentent plus de risques d’atteintes des fonctions cognitives et que leur quotient intellectuel pourrait en être affecté (4). Chez ces enfants, on observe également plus souvent des troubles de l’attention. Le cannabis se retrouve également dans  le lait maternel et peut s’y accumuler à de fortes concentrations (3,4).

Risques cardiométaboliques

Les effets de l’usage du cannabis sur la santé du cœur et des vaisseaux sanguins sont encore à l’étude. Comme c’est le cas pour l’étude des effets du cannabis sur les système respiratoire, l’usage relativement fréquent du tabac chez les consommateurs de cannabis brouille souvent les résultats. Selon certaines études, les consommateurs de cannabis âgés de moins de 55 ans courent un risque accru d’accident vasculaire cérébral (4). Pour ce qui est de l’association entre la consommation de cannabis et la survenue du syndrome métabolique, du diabète, du prédiabète et de l’infarctus du myocarde, les recherches réalisées ne fournissent pas de conclusions claires (3).

La consommation de cannabis et le risque de blessures

Parce qu’elle entraine une altération des fonctions cognitives, la consommation de cannabis augmente significativement le risque de blessures, notamment suite à un accident de la route (3,4,8). Les victimes peuvent être tant les conducteurs de véhicules motorisés que leurs passagers, les occupants d’autres véhicules, des cyclistes ou des piétons. Selon le type de produit, le mode de consommation et la quantité consommée, la durée de la période où les fonctions cognitives sont altérées variera, mais elle peut être de plusieurs heures.  Une étude révèle que lors des tests cognitifs menés chez des individus ayant consommé du cannabis, les fonctions perceptuelles et psychomotrices sont grandement touchées : l’attention baisse, le temps de réaction augmente, le suivi de trajectoire et le contrôle moteur diminuent (9). Une altération significative de la capacité de conduite automobile se produirait surtout chez les consommateurs occasionnels (1). La consommation concomitante d’alcool accroît considérablement le risque (4). La consommation de cannabis en milieu de travail est également susceptible d’entraîner des blessures graves, notamment dans le contexte d’opération de machineries lourdes (10).


Références

  1. World Health Organization. The health and social effects of nonmedical cannabis use [Internet]. Geneva: World Health Organization; 2016 [cité 17 mars 2022]. 72 p. Disponible à: https://apps.who.int/iris/handle/10665/251056
  2. Volkow ND, Baler RD, Compton WM, Weiss SRB. Adverse Health Effects of Marijuana Use. N Engl J Med. 5 juin 2014;370(23):2219‑27.
  3. National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine. The Health Effects of Cannabis and Cannabinoids: The Current State of Evidence and Recommendations for Research [Internet]. Washington, DC: The National Academies Press; 2017 [cité 17 mars 2022]. 486 p. Disponible à: https://www.nap.edu/catalog/24625/the-health-effects-of-cannabis-and-ca…
  4. Colorado Department of Public Health and Environment. Monitoring Health Concerns Related to Marijuana in Colorado:2020 [Internet]. 2021 [cité 29 mars 2022]. Disponible à: https://johnnysambassadors.org/wp-content/uploads/2021/02/Monitoring-He…
  5. Volkow ND, Swanson JM, Evins AE, DeLisi LE, Meier MH, Gonzalez R, et al. Effects of Cannabis Use on Human Behavior, Including Cognition, Motivation, and Psychosis: A Review. JAMA Psychiatry. mars 2016;73(3):292‑7.
  6. Wu TC, Tashkin DP, Djahed B, Rose JE. Pulmonary hazards of smoking marijuana as compared with tobacco. N Engl J Med. 11 févr 1988;318(6):347‑51.
  7. Wang GS, Le Lait M-C, Deakyne SJ, Bronstein AC, Bajaj L, Roosevelt G. Unintentional Pediatric Exposures to Marijuana in Colorado, 2009-2015. JAMA Pediatrics. 6 sept 2016;170(9):e160971.
  8. Prisca-Samba C, Gagné D, Maurice P. Conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis [Internet]. INSPQ. [cité 17 mars 2022]. Disponible à: https://www.inspq.qc.ca/cannabis/cannabis-et-conduite-automobile
  9. Douville M, Dubé P-A. Les effets du cannabis sur la conduite automobile [Internet]. INSPQ. 2015 [cité 17 mars 2022]. Disponible à: https://www.inspq.qc.ca/publications/2044
  10. CNSSET. Facultés affaiblies en milieu de travail [Internet]. [cité 25 mars 2022]. Disponible à: https://www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/prevention-securite/identifier-corrige…
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