Avis sur la pertinence d'ajouter les enfants âgés de 24 à 59 mois dans le Programme québécois de vaccination contre l'influenza

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a demandé au Comité sur l'immunisation du Québec (CIQ) d'évaluer la pertinence d'inclure les enfants âgés de 24 à 59 mois dans le Programme québécois de vaccination contre l'influenza. Cette demande découlait des modifications importantes au programme de vaccination contre l'influenza au Canada, et spécifiquement de la recommandation du Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) d'ajouter les enfants âgés de 24 à 59 mois à la liste des personnes pour qui le vaccin antigrippal saisonnier est recommandé pour la saison 2012-2013.

Le Programme d'immunisation contre l'influenza du Québec (PIIQ) vise actuellement la protection des personnes les plus à risque de développer des complications. Comme le programme recommande déjà la vaccination des enfants ayant des maladies sous-jacentes, l'évaluation de la pertinence d'inclure tous les enfants âgés de 24 à 59 mois dans le programme doit porter sur le bénéfice et le risque de recommander la vaccination des enfants en bonne santé.

Un groupe de travail créé dans le but d'évaluer la pertinence de cette recommandation au Québec a conduit une démarche permettant d'estimer le fardeau de l'influenza (consultations en externe, consultations à l'urgence, hospitalisations et décès) chez les enfants en bonne santé âgés de 24 à 59 mois et d'estimer par la suite le coût-bénéfice de l'ajout de ces enfants au programme de vaccination, en incluant aussi les éléments du cadre analytique Erickson-De Wals pour la prise de décision.

L'évaluation a mis en évidence le défi que représente l'obtention de données-sources représentatives et complètes en ce qui concerne le fardeau de l'influenza, notamment dans le groupe d'âge considéré et en stratifiant par la présence ou non de maladies sousjacentes. Le fardeau de l'influenza chez les enfants en bonne santé de cet âge réside essentiellement dans l'utilisation importante des consultations en externe qui seraient de plus de 150 fois plus fréquentes que les hospitalisations; les décès restent exceptionnels. Le coût-efficacité de ce programme pour la prévention des hospitalisations et des décès est peu favorable. La prévention des consultations en externe ne s'inscrit pas dans les objectifs actuels du PIIQ, mais même en considérant les coûts associés à ces consultations, ils sont bien inférieurs à ceux d'un programme d'immunisation qui ne permettrait donc pas de faire des économies.

L'évolution de la couverture vaccinale contre l'influenza au cours des dernières années remet en doute la capacité à obtenir une meilleure couverture vaccinale et à la maintenir à long terme avec l'ajout de nouveaux groupes au programme. De plus, les ajouts représentent un fardeau supplémentaire pour le système et pourraient se faire au détriment des groupes à plus haut risque déjà ciblés et mal rejoints.

L'acceptabilité d'un tel programme tant dans la population en général que parmi les groupes ciblés et parmi les professionnels de la santé reste un défi. Les contraintes liées à l'ajout des enfants de 24-59 mois dans le programme concernent les aspects opérationnels et sont réelles, puisqu'il n'y a pas de vaccination prévue dans le calendrier régulier de vaccination à cet âge.

Notre évaluation démontre que l'ajout des enfants de 24 à 59 mois en bonne santé dans le PIIQ coûtera cher et aura des impacts sur des issues non ciblées par les objectifs du Programme national de santé publique. Elle met en évidence les graves difficultés du programme actuel à rejoindre les patients ayant des risques d'hospitalisation et de décès substantiellement plus élevés et de la nécessité de concentrer les efforts de vaccination sur ces personnes plutôt que de les diluer sur des individus à plus faible risque. Le CIQ ne recommande donc pas l'ajout des enfants de 24 à 59 mois dans le PIIQ.

Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-67998-1
Notice Santécom
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