La participation citoyenne dans l'évaluation d'impact sur la santé : survol des enjeux

Au cours de l’hiver 2005, quelque 175 citoyens et près d’une vingtaine d’experts participaient à un vaste dialogue visant à dégager des idées pour soutenir un Québec en santé. Ces délibérations, menées par l’Institut du Nouveau Monde (INM), ont mis en lumière le souhait des citoyens de créer un Bureau d'audiences publiques en santé (BAPS). Inspirée par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) fondé en 1978 au Québec, cette nouvelle instance offrirait une place privilégiée aux citoyens afin d’évaluer les effets potentiels sur la santé de tout projet d'importance qui serait développé dans la province. Ces citoyens exigeaient « que le gouvernement fasse l’évaluation systématique et préalable de l’impact sur la santé des politiques publiques et qu’il corrige ces politiques pour en réduire les conséquences néfastes » (Venne et Famhy, 2005, p. 83).

De telles préoccupations ont également été exprimées dans d’autres provinces canadiennes. Le 23 avril 2009, le président du comité de la santé des populations à l’autorité régionale de Capital Health (Halifax, Nouvelle-Écosse) s’inquiétait, dans une lettre ouverte au Chronicle Herald, de l’introduction de nouvelles machines de loteries vidéo en Nouvelle-Écosse. L’auteur, Dr E. Kinley (2009), soutenait que cette décision avait été prise sans consultation publique suffisante et sans évaluation indépendante de ses impacts potentiels sur la santé de la population. Il incita alors le gouvernement néo-écossais à mettre en place une approche d’évaluation d’impact qui engagerait activement la communauté avant l’adoption de toutes nouvelles initiatives ayant des risques potentiels sur la santé. Selon lui, une telle approche présenterait bien des avantages sur les plans sanitaire et économique : « [Cette approche] permettrait aux décideurs de mesurer les effets potentiellement néfastes de nouveaux produits, programmes ou politiques avant leur implantation, et ainsi de prévenir des problèmes de santé qui nécessiteraient, en fin de compte, des interventions ou des traitements coûteux » (p. A13, traduction libre).

Bien que ces propositions soient restées lettres mortes, elles illustrent bien deux choses. Tout d’abord, on reconnaît de plus en plus que les politiques des différents secteurs gouvernementaux peuvent influencer la santé de la population. Que ce soit dans les secteurs des loisirs, du transport, de l’environnement, du revenu, de l’éducation, des garderies, ou encore du logement social, les politiques publiques peuvent avoir des répercussions sur la santé et ses déterminants. Il devient ainsi souhaitable d’évaluer leurs impacts potentiels avant leur implantation. Enfin, ces deux cas démontrent également que des citoyens et des professionnels de la santé souhaitent que les citoyens puissent prendre part à de telles évaluations.

Définition de l’ÉIS
L’évaluation d’impact sur la santé (ÉIS) peut être définie comme une combinaison de procédures, de méthodes et d'outils par lesquels une politique, un programme ou un projet peut être jugé quant à ses effets potentiels sur la santé d'une population (Centre collaborateur de l’OMS pour les Villes-Santé francophones, 2005).

L’évaluation d’impact sur la santé (ÉIS) est une pratique qui soulève beaucoup d’intérêt depuis son émergence dans les années 1990. L’ÉIS peut être définie comme une combinaison de procédures, de méthodes et d’outils par lesquels une politique, un programme, ou un projet peut être jugé quant à ses effets potentiels sur la santé d’une population (European Centre for Health Policy, 1999). L’ÉIS vise à estimer, à l’aide d’informations scientifiques et contextuelles, les effets possibles sur la santé de la population afin de minimiser les impacts négatifs et de maximiser les impacts positifs.

Les documents fondateurs de l’ÉIS, notamment le Consensus de Göteborg (European Centre for Health Policy, 1999), considèrent la participation citoyenne comme l’un de ses piliers. Certains praticiens et chercheurs affirment d’ailleurs qu’une ÉIS demeure incomplète sans la participation effective et concrète de la communauté (Dannenberg, Bhatia et al., 2006, p. 266). Toutefois, il semble y avoir un écart important entre la rhétorique et la pratique. En effet, non seulement les pratiques participatives dans l’ÉIS demeurent encore limitées (Gagnon, St-Pierre et al., 2010), mais l’idée même de participation citoyenne dans l’ÉIS ne semble pas très bien articulée et est parfois remise en question (Mahoney, Potter et al., 2007; Wright, Parry et al., 2005).

Définition de la participation citoyenne
La participation citoyenne fait référence à tout mécanisme mis en place afin d’impliquer, de façon active ou passive, des citoyens ou leurs représentants dans la démarche d’ÉIS.

Le présent rapport vise à initier les acteurs de santé publique aux enjeux entourant la participation citoyenne dans l’ÉIS. Dans ce rapport, la participation citoyenne fait référence à tout mécanisme mis en place afin d’impliquer, de façon active ou passive, des citoyens ou leurs représentants dans la démarche d’ÉIS. En nous basant sur une revue de la littérature sur l’ÉIS à l’aide de termes prédéterminés, nous discuterons tout d’abord des principaux arguments favorables à la participation citoyenne. Enfin, nous mettrons ces arguments en perspective en présentant également certains obstacles et risques associés à la participation citoyenne dans l’ÉIS.

ISBN (électronique)
978-2-550-65322-6
ISBN (imprimé)
978-2-550-65321-9
Notice Santécom
Date de publication