Perspective quant à la pertinence et la faisabilité d'un système de surveillance des infections à Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline communautaire

Le Staphylococcus aureus est fréquent dans la communauté et dans les milieux de soins. Il peut causer des infections de la peau, des tissus mous, des plaies chirurgicales, des cathéters intravasculaires, et des infections invasives telles des bactériémies, des endocardites, des abcès profonds et des pneumonies.

Le S. aureus a la capacité de développer des résistances aux antibiotiques. Le S. aureus résistant à la méthicilline (SARM) est présent depuis de nombreuses années dans les milieux de soins. Vers la fin des années :1990, une nouvelle souche de SARM est apparue et s'est répandue dans la communauté sans lien avec les milieux de soins. Cette nouvelle souche aux propriétés particulières est appelée SARM communautaire (SARM-C). Les premiers cas ont été documentés en mars 2004 au Québec.

Dans le cadre de l'entente spécifique de protection de la santé publique 2009-2012, le ministère de la Santé et des Services sociaux a mandaté l'Institut national de santé publique du Québec pour « évaluer la pertinence et la faisabilité d'un système de surveillance du Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline communautaire (SARM-C) ».

L'Institut a retenu les critères de priorisation de Steven M. Teutsch pour la surveillance des évènements de santé afin d'évaluer la pertinence d'un système de surveillance du SARM-C. Ainsi le SARM-C a été comparé avec d'autres bactéries résistantes d'intérêt médical d'origine communautaire telles le streptocoque β-hémolytique du groupe A, le Streptococcus pneumoniae, le Neisseria meningitidis, le Neisseria gonorrhoeae, les E. coli et Klebsiella sp. urinaires et les pathogènes entériques. Les critères d'évaluation étaient : la fréquence de l'infection, sa sévérité, sa contagiosité, l'existence de mesures de prévention et de contrôle, les coûts de la maladie et l'intérêt public.

Par ailleurs, l'Institut s'est appuyé sur le modèle de l'Observatoire National de l'Épidémiologie de la Résistance Bactérienne aux Antibiotiques (ONERBA) pour la faisabilité et les modalités d'un système de surveillance du SARM-C. ONERBA distingue quatre types d'information d'un programme de surveillance de la résistance aux antibiotiques : 1) l'analyse des souches selon le niveau de sensibilité, afin de définir les valeurs critiques délimitant les catégories cliniques : sensible, intermédiaire, résistant; 2) la surveillance en laboratoire de la résistance aux principaux antibiotiques des bactéries d'intérêt médical afin de soutenir les protocoles de traitements aux antibiotiques; 3) la surveillance des bactéries isolées d'infections définies et documentées, afin de soutenir l'élaboration des recommandations sur l'antibiothérapie et le bon usage des antibiotiques. Cette surveillance s'appuie sur les données cliniques et épidémiologiques et 4) la surveillance des bactéries multirésistantes, l'objectif étant de soutenir les politiques publiques et les actions de santé publique. 

Recommandations

Recommandation 1 : La surveillance des SARM isolés des infections d'origine communautaire

Considérant :

  • La fréquence des infections de la peau et des tissus mous à S. aureus dans toute la population incluant les personnes en bonne santé;
  • La sévérité des infections de la peau et des tissus nous causées par le SARM-C;
  • L'impact de la fréquence des SARM-C sur la prescription empirique d'antibiotiques pour le traitement de ces infections;
  • La menace des bactéries multirésistantes pour la santé publique;
  • L'intérêt des autorités de santé publique pour la surveillance du SARM-C.

L'Institut recommande de mettre en place un programme de surveillance périodique des souches de SARM isolés des infections d'origine communautaire, dont les objectifs seraient de soutenir la pratique médicale et l'élaboration des guides de traitement par 1) la mesure de la prévalence des souches sensibles à l'oxacilline, des souches SARM nosocomiales (SARM-H) et des souches SARM-C, 2) l'établissement de la densité d'incidence du SARM-C et 3) le suivi des tendances temporelles et géographiques.

Recommandation 2 : La surveillance des SARM isolés des bactériémies

L'Institut recommande de poursuivre la surveillance obligatoire des SARM isolés des bactériémies telles que, définie par le programme SPIN.

Recommandation 3 : La surveillance des facteurs de risque et de la morbidité et la mortalité des infections à SARM-C

Considérant :

  • L'évolution relativement contrôlée des infections à SARM-C depuis les premiers cas documentés de SARM-C au Québec selon les médecins microbiologistes-infectiologues;
  • Les études récentes sur les infections à SARM dans les urgences au Canada;
  • Les difficultés inhérentes et les ressources nécessaires pour réaliser de telles études.

L'Institut recommande d'encourager les initiatives de recherche sur les facteurs de risque et sur la morbidité et la mortalité des infections à SARM-C sans toutefois intégrer de telles études dans un programme de surveillance provincial du SARM.

Recommandation 4 : Le rattachement des activités de surveillance du SARM-C à celle du programme de surveillance intégrée de la résistance aux antibiotiques de l'Institut

  • Le projet de l'INSPQ de mettre en place un programme de surveillance intégrée de la résistance aux antibiotiques;
  • La mise sur pied d'un comité d'experts scientifiques sur la résistance aux antibiotiques composés entre autres de médecins microbiologistes-infectiologues, d'épidémiologistes et de chercheurs des domaines clinique et fondamental;
  • Le soutien de la haute direction de l'Institut, de la Direction générale de santé publique du MSSS et de l'AMMIQ dans ce projet;
  • Le besoin d'arrimage et d'intégration pour la surveillance de l'ensemble des bactéries multirésistantes.

L'Institut recommande de rattacher les activités de la surveillance du SARM-C à celles du programme de surveillance intégrée de la résistance aux antibiotiques de l'INSPQ.

À cet effet, l'Institut recommande de présenter les recommandations contenues dans cet avis scientifique au comité d'experts scientifiques sur la résistance aux antibiotiques, de même qu'à l'AMMIQ et à la TCNSP.

Recommandation 5 : La vigie du SARM-C et définitions nosologiques

Considérant :

  • La définition nosologique actuelle d'Éclosion au Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), soit :
  • Présence, dans un même établissement de soins de longue durée, de deux nouveaux cas d'une infection grave causée par la même souche de SARM transmise en milieu de soins et nécessitant une chirurgie ou une antibiothérapie intraveineuse d'une durée de plus de quatorze jours. La transmission doit survenir à l'intérieur de 1 mois;
  • L'augmentation notée de SARM-C isolés d'infections, la survenue d'éclosions confirmées dans la communauté, ainsi que le potentiel de progression du SARM-C dans la communauté;
  • Les modalités d'intervention disponibles par les directions de santé publique régionales, pour la gestion et le contrôle des éclosions à SARM-C dans la communauté;
  • La nécessité lors d'un signalement, d'invoquer la Loi sur la santé publique, afin d'obtenir toutes les informations nécessaires pour l'intervention, dont celles nominales;
  • La possibilité pour les cliniciens de transmettre immédiatement toutes les informations pertinentes, dont les informations nominales, à leur direction de santé publique lors de la déclaration d'une MADO.

L'Institut recommande de proposer à la TCNMI la modification suivante à la définition d'éclosion au Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) qui est ::

Éclosion en milieu de soins :

Présence dans un même établissement de soins de longue durée, de deux nouveaux cas d'une infection grave causée par la même souche de SARM transmise en milieu de soins et nécessitant une chirurgie ou une antibiothérapie intraveineuse d'une durée de plus de quatorze jours. La transmission doit survenir à l'intérieur de 1 mois.

Éclosion dans la communauté :

Éclosion confirmée : Survenue dans la communauté de deux cas ou plus d'infection confirmée par une même souche de SARM, avec un lien épidémiologique entre les cas. Les infections doivent être survenues à l'intérieur de 1 mois;

Éclosion probable : Survenue dans la communauté d'infections possiblement causées par le SARM, avec un lien épidémiologique entre les cas, et dont une de ces infections est confirmée causée par une souche de SARM. Les infections doivent être survenues à l'intérieur de 1 mois.

 

Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-64925-0
ISBN (imprimé)
978-2-550-64924-3
Notice Santécom
Date de publication