Évaluation du risque de transmission et d'une exposition significative au plomb associé à la transfusion de sang

L'Institut national de santé publique du Québec a reçu à l'automne 2003 le mandat d'évaluer pour Héma-Québec le risque d'une exposition au plomb lié à la transfusion de sang.

La base des préoccupations soulevées par les gestionnaires d'Héma-Québec faisait suite à la parution d'un article publié en 2003 dans la revue scientifique The Lancet. Selon les auteurs de cet article, le contenu en plomb des poches de sang destinées à la clientèle des enfants nés prématurément ne devrait pas dépasser 0,09 μmol/l. Dans cette étude, 36 % des unités de sang analysées dans le cadre de cette étude dépassaient ce seuil (Bearer et al., 2003). Héma-Québec, en tant qu'unique fournisseur de sang au Québec, est responsable de la qualité des produits dans le domaine de la médecine transfusionnelle. De même, en vertu de la Loi sur Héma-Québec et sur le comité d'hémovigilance, le comité d'hémovigilance a pour mandat de donner au ministre son avis sur l'état des risques reliés à la transfusion sanguine (L.R.Q., C. H-1.1).

Le risque de transmission et d’une exposition significative au plomb associé à la transfusion de sang est un phénomène encore peu documenté en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde. Le plomb est un métal non essentiel dont les effets sur la santé chez l’humain et en particulier les jeunes enfants sont bien documentés. Plus les connaissances avancent, plus il semble difficile d’établir un seuil sécuritaire d’exposition au plomb, c’est-à-dire une concentration dans le sang sans effet. Ceci est particulièrement vrai pour les effets documentés sur le développement du système nerveux. En effet, alors qu’on croyait jusqu’à tout récemment sécuritaire un niveau de 0,48 μmol/l, on rapporte maintenant une augmentation du risque avec des concentrations de plomb dans le sang aussi faibles que 0,25 μmol/l. Selon les données disponibles, la transmission de plomb par la transfusion de sang pourrait représenter un risque d’exposition significative au plomb chez les très jeunes enfants, notamment chez les bébés nés prématurément. La valeur guide correspondant à la concentration maximale acceptable de plomb dans le sang transfusé a été établie dans le cadre de la présente évaluation à 0,15 μmol/l. Différents paramètres, en plus de la valeur tolérable par ingestion de l’OMS, ont été considérés pour définir le niveau seuil de concentration de plomb à ne pas dépasser dans les poches de sang. Il est estimé qu’entre 10 et 30 % des donneurs de sang au Québec pourraient dépasser la valeur guide de 0,15 μmol/l.

Divers scénarios de gestion du risque peuvent être envisagés pour réduire le risque d’une exposition non nécessaire par le plomb chez les individus qui doivent recevoir des transfusions de sang. Parmi l’ensemble des scénarios envisagés pour la gestion du risque, l’analyse ciblée de la plombémie sur des lots de sang apparaît, à première vue, comporter plus d’avantages que d’inconvénients tant sur le plan des coûts, de la faisabilité analytique, que du suivi des cas. La gestion de produits sanguins avec une faible teneur en plomb ne semble pas à priori poser de problèmes majeurs pour les banques de sang des hôpitaux du Québec. La réalisation d’une étude sur les niveaux d’imprégnation par le plomb chez les donneurs de sang semble indiquée au Québec. Ces résultats permettront d’une part de mieux définir la prévalence d’une exposition significative au plomb par la transfusion de sang et d’autre part de fournir des renseignements utiles pour la gestion de ce risque. L’évaluation du risque d’une exposition significative au plomb associée à la transfusion de sang soulève d’autres questions au regard du risque potentiel associé à l’exposition à d’autres contaminants chimiques par le sang. Une telle réflexion devrait être amorcée afin de réduire au minimum l’exposition de la population à divers contaminants transmissibles par le sang et reconnus pour avoir des effets néfastes sur la santé.

Auteur(-trice)s
Marc Rhainds
Institut national de santé publique du Québec
ISBN (électronique)
978-2-550-61023-6
ISBN (imprimé)
978-2-550-61022-9
Notice Santécom
Date de publication