Programme de surveillance de l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) au Québec : mise à jour des données au 30 juin 2009

Le programme de surveillance de l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) au Québec est basé sur la déclaration de l'infection par le Laboratoire de santé publique du Québec (LSPQ) et sur le recueil de renseignements épidémiologiques sur la personne infectée auprès du professionnel de santé ayant prescrit le test de dépistage du VIH.

Les activités de collecte des données sont centralisées dans des locaux sécurisés du LSPQ, lequel effectue toutes les analyses de confirmation à l'échelle de la province. Pour tout test confirmé positif au LSPQ, une intervenante de santé publique (ISP) téléphone au professionnel qui l'a prescrit pour obtenir le numéro d'assurance maladie (NAM) si celui-ci n'est pas déjà disponible. Le NAM est encrypté pour avoir un identifiant unique permettant de savoir si le cas a déjà été déclaré ou s'il doit faire l'objet d'une déclaration. Dans ce dernier cas, l'ISP contacte le professionnel de santé pour procéder à l'enquête épidémiologique.

L'enregistrement des cas est anonyme. Le NAM n'est utilisé que pour éliminer les doublons. C'est la raison pour laquelle les cas sans NAM ne sont pas enregistrés dans le système actuel.

Le LSPQ a confirmé la positivité au VIH de 0,62 % des 155 736 spécimens prélevés au premier semestre 2009 et analysés par les laboratoires hospitaliers qui font partie du programme québécois de diagnostic de l'infection par le VIH. Cette proportion se maintient à moins de 1 % depuis le début du programme en avril 2002.

La déclaration des cas était impossible pour 21,9 % (3 125/14 243) des spécimens positifs soumis aux ISP pour la collecte épidémiologique depuis le début du programme en avril 2002 jusqu'au 30 septembre 2009, essentiellement à cause de l'absence d'un NAM.

La proportion des spécimens pour lesquels le cas ne pouvait être enregistré dans le système actuel et qui provenaient des immigrants ou des réfugiés a augmenté de 42,6 % (168/394) en 2002 à 72,2 % (200/277) en 2009 (janvier à septembre).

Dans l'ensemble, depuis le début du programme en avril 2002 jusqu'au 30 septembre 2009, plus de la moitié (57,3 %; 1 761/3 125) des spécimens positifs avec impossibilité de déclarer le cas concernent des demandeurs de résidence ou de statut de réfugié sans NAM. On estime qu'ils sont reliés à un minimum de 952 bénéficiaires. L'autre moitié est composée de spécimens à propos desquels les médecins n'ont pas donné suite à la demande de l'ISP pour la collecte épidémiologique, de sérologies chez des enfants de moins de deux ans, de spécimens provenant des projets de recherche, de spécimens anonymes des services intégrés de dépistage et de prévention (SIDEP) des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), de spécimens de résidants hors province ou de résidants du Québec sans NAM.

Au total, 309 cas d'infection par le VIH ont été déclarés au premier semestre 2009, dont 165 nouveaux diagnostics, 131 anciens cas et 13 personnes dont on ne peut dire avec les informations disponibles qu'elles ont reçu leur premier diagnostic de VIH au premier semestre 2009 ou avant.

Ces cas portent à 5 520 le nombre total cumulatif de personnes infectées par le VIH enregistrées au programme au 30 juin 2009. Ce nombre comprend 2 831 nouveaux diagnostics, 2 417 anciens cas et 272 cas de séropositivité au VIH impossibles à caractériser comme étant des diagnostics anciens ou nouveaux. Il reste en deçà des estimations de la prévalence du VIH produites pour le Québec par l'Agence de la santé publique du Canada, selon lesquelles environ 18 000 personnes vivaient avec le VIH dans la province en 20081. Il faut toutefois se rappeler que le programme québécois de surveillance n'a été mis en place qu'en avril 2002 et que les données qu'il génère n'incluent pas toutes les personnes au courant de leur statut biologique d'infection par le VIH avant son implantation, ni celles non dépistées qui ignorent leur séropositivité, et qu'elles excluent les cas confirmés qui n'ont pas de NAM et sont majoritairement des immigrants.

Plus de la moitié (61,5 %; 1 741/2 831) des nouveaux diagnostics n'avaient jamais eu de dépistage du VIH auparavant. Dans les 1 090 rapportant un test négatif antérieur, 125 n'ont pas précisé la date du dernier dépistage négatif. Parmi les 965 qui l'ont précisée, 313 ont été diagnostiqués dans les douze mois suivants cette date.

Ces cas incidents (survenus dans les douze derniers mois avant le dépistage positif) ne représentent que 11,1 % (313/2 831) des nouveaux diagnostics. La majorité (88,9 %; n = 2 518) de ceux-ci sont impossibles à différencier comme étant des infections récentes (de moins d'un an) ou des séroconversions anciennes tardivement diagnostiquées. C'est un mélange de cas avec un résultat négatif au dernier test de dépistage sans précision sur la date de celui-ci (4,4 %, n = 125), de cas négatifs au dernier test qui date de plus d'un an (23,0 %, n = 652) et de personnes jamais testées pour le VIH auparavant (61,5 %, n = 1 741).

Les cas du premier semestre 2009 sont comparables à ceux enregistrés de 2002 à 2008. Ils sont majoritairement de sexe masculin (80,6 %; 249/309). L'âge médian des nouveaux diagnostics est de 43 ans pour les hommes et 37,5 ans pour les femmes.

Le Canada reste le principal pays de naissance et d'origine ethnoculturelle des personnes trouvées infectées par le VIH au Québec avec 70,7 % (n = 217) des cas au premier semestre 2009. Trois cas ont été déclarés pour des Autochtones des Premières Nations.

La région de Montréal, qui compte un quart de la population du Québec et abrite la grande majorité des immigrants admis au Québec, reste la plus touchée dans la province. La majorité (57,9 %; n = 179) des cas du premier semestre 2009 résident dans cette grande ville métropolitaine.

Les cas du premier semestre 2009 se distribuent dans l'ordre ci-après de fréquence des catégories d'exposition :

  • Les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes (HARSAH) sont au premier rang avec 57,9 % (n = 179) des cas et 66,7 % (110/165) dans les nouveaux diagnostics.
  • Les infections reliées à l'origine d'un pays endémique où prédomine la transmission hétérosexuelle du VIH représentent 14,2 % (n = 44).
  • Trente-cinq cas (11,3 %) non associés aux pays endémiques ont été infectés par des contacts hétérosexuels. En les regroupant avec ceux de la catégorie d'exposition précédente, la transmission hétérosexuelle est reliée à 25,6 % (n = 79) des cas.
  • Huit pour cent (8,4 %; n = 26) utilisent des drogues par injection (UDI).
  • Les cas à la fois HARSAH et UDI représentent 3,6 % (n = 11).
  • Un nouveau diagnostic d'infection par des facteurs de coagulation est déclaré à Montréal chez un canadien d'origine âgé de 69 ans. Quatre anciens cas infectés par des dons de sang sont aussi rapportés chez trois immigrants de 22, 26 et 77 ans à Montréal et un canadien de naissance âgé de 42 ans dans la région de la Montérégie. Ils avaient eu un premier test positif avant le programme (deux en 1985 et les deux autres en 1988 et 2000). L'année de réception des dons contaminés est inconnue. L'incubation de l'infection étant plus ou moins longue, les cinq cas peuvent avoir été infectés avant l'implantation des mesures de sécurité transfusionnelle au Québec en 1985 ou avant leur arrivée au Canada pour les trois immigrants.
  • Neuf anciens cas de transmission verticale ont été enregistrés pour des résidants d'origine non canadienne, excepté un. Ce Canadien de souche et deux des immigrants sont nés au Canada et ont été infectés avant l'implantation du programme d'intervention sur l'infection par le VIH et la grossesse au Québec en 1997, puisqu'ils avaient entre 13 et 26 ans au moment du test positif déclaré. Les six autres immigrants âgés entre 6 et 21 ans ont été infectés à leur naissance en dehors du Canada.

La transmission homosexuelle prédomine chez les hommes, tandis que les femmes sont essentiellement infectées par des rapports hétérosexuels non protégés.

  • Chez les hommes, la majorité (71,9 %; 179/249) ont des rapports sexuels avec d'autres hommes, 8,0 % (n = 20) ont été infectés par des contacts hétérosexuels, 6,4 % (n = 16) par le partage de seringues pour s'injecter des drogues, 4,4 % (n = 11) sont à la fois HARSAH et UDI, et 5,2 % (n = 13) des immigrants de pays endémiques. En combinant ceux-ci avec les cas hétérosexuels non associés à ces pays, la voie hétérosexuelle n'est reliée qu'à 13,3 % (n = 33) des cas.
  • Parmi les femmes, la moitié (51,7 %; 31/60) sont des immigrantes de pays endémiques, 25,0 % (n = 15) des cas hétérosexuels non reliés à ces pays, et 16,7 % (n = 10) des cas UDI qui empruntent des seringues ou du matériel d'injection déjà utilisé par d'autres. Au total, 76,7 % (n = 46) ont été infectées par voie hétérosexuelle indépendamment de leur pays d'origine.

Le recours aux services de dépistage du VIH reste tardif puisque 22,4 % (37/165) des nouveaux diagnostics étaient rendus au stade des infections chroniques symptomatiques du VIH ou du sida au moment du prélèvement.

Les constats issus des données du premier semestre 2009 vont dans le sens des principaux constats décrits dans le rapport portant sur les cas cumulatifs 2002-2008. On ne détecte pas de changement prévisible dans la tendance des cas en 2009.

Les hommes, particulièrement les HARSAH, restent les plus touchés. On constate à nouveau parmi les femmes infectées par le VIH, une proportion élevée de celles qui proviennent de régions où le virus est endémique.

De toute évidence, le virus se transmet encore activement au Québec malgré les programmes de prévention de l'épidémie qui sont implantés dans la province. Combinée à la progression des autres ITSS observée parmi les HARSAH ici comme ailleurs au Canada et dans les pays développés, cette observation doit continuer d'interpeller les autorités de santé publique.

Les données du programme de surveillance n'estiment ni la prévalence ni l'incidence du VIH au Québec. Elles portent sur les cas confirmés par le LSPQ depuis le début du programme et dont la collecte épidémiologique est complétée, tandis qu'elles excluent les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) diagnostiquées avant et non reconfirmées depuis avril 2002, les cas dépistés après cette date qui ne peuvent être enregistrés dans le système actuel et dont la majorité ne le sont pas à cause de l'absence d'un NAM, ainsi que les PVVIH non dépistées qui ignorent leur séropositivité.

L'élimination des doublons basée sur l'obtention du NAM pour tous les tests positifs est associée à une proportion élevée de spécimens positifs impossibles à déclarer et qui proviennent majoritairement des immigrants. Le programme a été implanté en 2002. La même année, une nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et son règlement rendaient obligatoire l'examen médical incluant un test de dépistage du VIH pour tout requérant de résidence permanente au Canada et certains requérants de résidence temporaire. Ce changement a entraîné l'ajout non anticipé d'un nombre important de cas positif sans NAM.

Afin d'augmenter la capacité du programme à documenter les cas exclus du système actuel et qui sont majoritairement des immigrants, le groupe de travail de l'Institut national de santé publique du Québec sur le développement de la surveillance du VIH/sida propose de faire la collecte épidémiologique à propos des cas positifs sans NAM.

Les données du programme ne permettent pas de différencier les infections récentes et celles anciennes parmi les nouveaux diagnostics. Avec des données dans lesquelles le nombre de cas incidents est inconnu, il devient pratiquement impossible d'interpréter toute variation dans les nouveaux diagnostics. Afin d'améliorer la capacité du programme à suivre la tendance de l'incidence du VIH au Québec, le groupe de travail propose d'ajouter un test d'infection récente au processus de détection du VIH pour les besoins de surveillance.

Les suggestions ci-dessus ne permettront pas au programme de répondre pleinement aux objectifs de surveillance de l'infection par le VIH.

Le système actuel classe les cas dans des catégories principales d'exposition selon une procédure hiérarchisée, tandis que les comportements qui expliquent la présence du VIH, par exemple le recours aux méthodes préventives pendant les rapports sexuels, aux pratiques sécuritaires d'injections de drogues, au traitement préventif de la transmission verticale pendant la grossesse, ne sont pas documentés. Le fait d'être un HARSAH, un UDI ou originaire d'un pays endémique détermine la catégorie d'exposition de la majorité des cas, mais n'explique pas la présence du VIH.

L'enregistrement anonyme ne permet pas de déclarer les cas pour lesquels les informations servant à évaluer le risque ne sont pas disponibles auprès du médecin traitant et de compléter la déclaration lorsque le médecin obtient ces informations lors des visites ultérieures. Il rend impossible tout suivi des cas après leur déclaration, limitant l'utilité du programme pour les PVVIH, puisque les données qu'il génère ne peuvent servir à identifier les cas perdus de vue dans le réseau de la santé après leur déclaration et à intervenir lorsque c'est nécessaire, par exemple auprès de ceux moins portés à consulter pour le suivi de l'infection déclarée.

Le groupe de travail recommande de mener une réflexion avec tous les partenaires impliqués dans la lutte contre le VIH/Sida au Québec visant à trouver une solution qui garantit la confidentialité des données et qui permet de compléter la collecte de celles-ci afin de documenter adéquatement le portrait de l'épidémie et de rendre le programme plus utile aux PVVIH et leurs partenaires.


1Agence de la santé publique du Canada. Estimations de la prévalence de l'incidence du VIH au Québec en 2008. Données non publiées.

Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-58408-7
ISBN (imprimé)
978-2-550-58407-0
ISSN (électronique)
1913-3405
ISSN (imprimé)
1913-3391
Notice Santécom
Date de publication