Adaptation des soins et services de santé : que peuvent nous apprendre les personnes qui font usage de drogues par injection?

 

Une récente étude doctorale sur la signification de la santé et du prendre soin de soi a été réalisée auprès de 32 personnes qui font usage de drogues par injection (UDI) à Montréal, dont plusieurs sont atteintes du VIH et du VHC. Cette étude qualitative visait également à obtenir la perspective de ces personnes sur ce qui pourrait être fait pour leur permettre de mieux prendre soin d’elles-mêmes. Les personnes participantes ont spontanément parlé des lacunes perçues dans les services de santé et offert plusieurs pistes en vue de l’amélioration de leurs expériences de soin.

Synthèse des résultats

Les analyses révèlent ce que les participants pensent des services de santé offerts à Montréal, ce qui est apprécié, moins apprécié ou ce qui est jugé inadéquat. Les analyses ont également pu dégager les principales difficultés rencontrées par les participants UDI lorsqu’ils consultent dans les services de santé montréalais. Ces principales difficultés sont :

  • L’accès difficile et restreint à différents services (p. ex : critères d’admissibilité, liste d’attente, démarches administratives lourdes);
  • L’inadéquation des services (p. ex : formation du personnel jugée insuffisante sur l’approche de réduction des méfaits ou en dépendance);
  • L’offre de services fragmentée et non intégrée (p. ex : devoir recevoir des soins dans des établissements différents, approche en silo, rupture de traitement par agonistes opioïdes);
  • Le manque d’écoute (p. ex : consultations médicales expéditives, rareté des professionnels de l’écoute comme les psychologues ou de pair-aidants);
  • La stigmatisation et la discrimination (p. ex : recevoir un diagnostic de VIH sans offre de suivi ni traitement, non-soulagement de la douleur, se faire demander de signer un refus de traitement par le personnel soignant);
  • Le manque d’accompagnement pour les personnes les plus vulnérables et désaffiliées (p. ex : personnes très malades, itinérantes, souffrant de troubles mentaux).

Afin d’améliorer leurs expériences au sein des services de santé, des pistes de solutions ont été proposées par les personnes qui ont participé à l’étude :

  • Accroître l’accès à des services de santé et sociaux de proximité offerts par différents professionnels dont des médecins, infirmières, psychologues;
  • Idéalement, offrir ces services dans une clinique médicale sans-rendez-vous ouverte 24 heures sur 24;
  • Offrir des traitements variés et des services globaux au même endroit (par ex. : traitement du VHC, du VIH, et traitement par agonistes opioïdes, consultations psychologiques);
  • Améliorer la qualité de l’accueil et de l’écoute au sein des services de santé et des services communautaires;
  • Valoriser la paire-aidance et le savoir expérientiel des personnes UDI.

Discussion

Bien que le traitement des ITSS, la réduction des méfaits par la distribution de matériel d’injection, l’éducation sur l’injection à moindres risques et l’accès au traitement par agonistes opioïdes soient toutes des mesures essentielles à la lutte au VIH et au VHC, elles ne sont pas suffisantes. Compte tenu des multiples problèmes de santé de plusieurs personnes UDI et de leurs difficultés à accéder aux soins de santé, une offre globale et intégrée comprenant à la fois des services ponctuels et à long terme est à privilégier selon plusieurs experts (CDC, 2012; Fischer et al., 2005; Islam et al., 2012; Millson et al., 2004; Navarro et Leonard, 2004; Noël et al., 2007).

Ces résultats renforcent la nécessité d’examiner les mécanismes sociaux sous-jacents qui contribuent à maintenir certaines personnes dans une grande précarité sociale. Notamment, il importe de se pencher sur l’imputabilité des institutions et de la collectivité alors que les personnes UDI rencontrées dénoncent faire l’objet de forte moralisation et discrimination sociale.

Nous vous invitons à consulter le document ci-joint pour en savoir davantage sur cette étude. Vous pouvez également consulter les liens suivants, pour plus d’information :

Rédigé par
Hélène Poliquin (INSPQ)
Date de publication
29 mai 2019