Étude exploratoire de la relation entre l'exposition au bruit en milieu de travail, la perte d'audition permanente et la sécurité routière

Cette recherche porte sur la relation entre le fait d'être exposé au bruit en milieu de travail ou d'avoir une perte auditive permanente résultant d'une exposition au bruit et la sécurité routière. Les données utilisées proviennent de l'appariement entre des données audiométriques de l'INSPQ et des données de sécurité routière de la Société d'assurance automobile du Québec. La cohorte étudiée compte 78 008 conducteurs et conductrices. La capacité (ou acuité) auditive et le niveau de bruit en milieu de travail constituent les variables d'expositions. L'accident de la route où la personne examinée est conducteur, l'accident où la personne est un piéton de même que les infractions au Code de la sécurité routière survenus dans les cinq années suivant le dernier examen auditif sont considérés. L'âge du conducteur et son expérience en milieu bruyant sont des facteurs d'ajustement.

Les analyses ajustées pour l'âge confirment l'effet protecteur de l'âge, montrent que les variables d'exposition (bruit et audition) ont un impact sur la sécurité routière et que les associations identifiées sont comparables à celles que l'on observe au plan de la sécurité du travail. Les travailleurs exposés à des niveaux supérieurs ou égaux à 101 dBA ont un risque d'accident accru (RP = 1,11, IC95 [1,05; 1,17]) (tous accidents confondus). Une perte d'audition aux fréquences 3, 4 et 6 kHz est associé à un risque accru d'accident qui varie selon la sévérité de l'atteinte (perte 16 – 30 dB, RP = 1,07, IC95 [1,04; 1,11], perte 51 dB et plus, RP = 1,42, IC95 [1,35; 1,50]).

Il appert également que le fait d'être exposé au bruit en milieu de travail de même que le fait de présenter une perte auditive permanente se traduit par une diminution d'infractions pour excès de vitesse alors que la proportion d'infractions pour un autre motif qu'un excès de vitesse augmente. Par ailleurs, ni le travail en milieu bruyant, ni le statut auditif du travailleur peuvent être associés à une augmentation du risque d'accident comme piéton.

Enfin, alors que les conducteurs de sexe masculin présentent un risque d'accident de la route légèrement inférieur à celui de la population québécoise dans son ensemble (RT = 0,95), les conductrices de la cohorte sont plus souvent impliquées dans des accidents avec blessés graves ou légers que l'ensemble des conductrices québécoises.

Les résultats justifient que l'on poursuive l'étude des effets pervers de l'exposition au bruit en milieu de travail sur la sécurité des personnes. Environ un conducteur sur neuf serait exposé au bruit (≥ 80 dBA) en milieu de travail. Les effets pervers du bruit en milieu de travail débordent le milieu de travail, cette problématique devient une préoccupation sociale.

Autor(es)
Serge André Girard
Institut national de santé publique du Québec
Michel Picard
Université de Montréal
Richard Larocque
Institut national de santé publique du Québec
Michel Lavoie
M.D., Institut national de santé publique du Québec
ISBN (Print)
2-550-43692-X
Santecom Number
Date de publication