5 octobre 2012

Étude sur la qualité de l’air intérieur d’une vingtaine de services de garde à l’enfance situés à Montréal

Résumé scientifique
Le texte qui suit est le résumé d’une publication scientifique (ou d’une étude) n’ayant pas été réalisée par l’Institut national de santé publique du Québec. Cette analyse critique ne peut donc pas être considérée comme la position de l’Institut. Son objectif est de porter à l’attention des lecteurs des éléments récents de la littérature scientifique, et ce, sous un éclairage critique découlant de l’expertise des auteurs du résumé.
Auteur(s)
Mélissa St-Jean
Santé Canada
Jean-Marc Leclerc
M. Sc., conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec

Mise en contexte

Au Canada, comme dans la plupart des pays industrialisés, et ce, en grande partie en raison de l’arrivée des femmes sur le marché du travail, la proportion d’enfants qui fréquentent les services de garde à l’enfance (SGE) a nettement augmenté. À Montréal, en 2008, plus de 210 000 enfants fréquentaient des centres de la petite enfance (CPE) et des garderies privées. Pour les enfants, une mauvaise qualité de l’air intérieur (QAI) dans ces établissements représente un risque potentiel de développer certains problèmes de santé, principalement des atteintes du système respiratoire. Malgré le fait que la QAI dans les SGE peut affecter la santé respiratoire des enfants, peu d’études ont porté sur ce sujet.

Objectifs de l’étude

Afin de mieux comprendre la QAI dans ces milieux, Santé Canada a réalisé, en collaboration avec le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) et le Centre universitaire de santé McGill (CUSM), une étude dans des SGE de 40 places et plus, localisés à Montréal. Les objectifs étaient d’en évaluer la QAI et d’identifier les caractéristiques du bâtiment qui pouvaient l’influencer. Ce texte constitue un résumé de l’article «Indoor air quality in Montréal area day-care centres, Canada», paru récemment dans Environmental Research.

Méthodologie

L’échantillonnage s’est déroulé à l’hiver 2008. Les caractéristiques et le fonctionnement des établissements ont été recueillis à l’aide de questionnaires administrés aux directeurs. Les dimensions des locaux échantillonnés et le nombre d’enfants qui y étaient présents ont été notés. L’humidité relative, la température, les concentrations de dioxyde de carbone (CO2), de formaldéhyde et d’une centaine de composés organiques volatiles (COV) ont été mesurées dans les locaux fréquentés par des enfants âgés entre 18 et 48 mois. Le CO2, un gaz produit notamment par la respiration humaine, a été mesuré à titre d’indicateur de la ventilation.

Résultats de l’étude

Le taux de participation a été de 42 %. En tout, 21 SGE ont participé à l’étude, principalement des centres de la petite enfance. Les caractéristiques des SGE participants sont présentées au tableau 1. La majorité d’entre eux ont rapporté avoir un système de ventilation mécanique et un système de chauffage électrique. De plus, la plupart des SGE avaient une surface d’aire de jeu par enfant égale ou supérieure à l’exigence du ministère de la Famille et des Aînés (MFA), c’est-à-dire 2,75 m2/enfant âgé de plus de 18 mois.

Tableau 1. Caractéristiques des 21 SGE montréalais participants

Caractéristiques des bâtiments

n

%

Moyenne

Écart-type

Type de SGE

Centre de la petite enfance (CPE)

18

85,7

   

Garderie privée

3

14,3

   

Âge de construction du bâtiment (années)

   

34,4

30,4

Mode de ventilation

Mécanique

17

81,0

   

Naturelle

4

19,0

   

Type de système de chauffage

Électrique

13

61,9

   

Gaz ou huile

8

38,1

   

Nombre d’enfants inscrits au SGE

   

68,2

15,3

Surface d’aire de jeu par enfant (m2/enfant)

   

3,1

0,6

Le tableau 2 rapporte les résultats relatifs à la température, l'humidité relative, le CO2 et le formaldéhyde. La température et l’humidité relative moyennes mesurées dans les aires de jeu rencontraient les exigences du MFA (20°C et 30%). Autrement, les concentrations moyennes de formaldéhyde mesurées dans les SGE étaient toutes en-dessous de la ligne directrice de Santé Canada pour une exposition à long terme (50 μg/m3).

En l’absence d’une recommandation sur les concentrations de CO2 dans les SGE, une valeur de référence maximale de 1000 ppm de CO2 a été utilisée pour indiquer que la ventilation était insuffisante, valeur correspondant au seuil de confort proposé par l’American Society of Heating, Refrigerating and Air-Conditioning Engineers (ASHRAE). En tout, plus de 85 % des SGE avaient des concentrations moyennes de CO2 qui dépassaient 1000 ppm (n=18). Même si, à de telles concentrations, le CO2 n’est pas dangereux pour la santé, des concentrations plus élevées que 1000 ppm dans l’air intérieur suggèrent que les bâtiments concernés sont mal ventilés.

Lorsque la ventilation est insuffisante dans un bâtiment, les polluants de l’air intérieur peuvent s’y accumuler et atteindre des concentrations élevées, pouvant poser un risque pour la santé des occupants.

Tableau 2. Concentrations des paramètres de l’air intérieur mesurés dans les 21 SGE participants

Paramètres

Minimum

Maximum

Moyenne a

Ecart-typeb

Température (°C)

20,7

23,9

22,3c

0,7d

Humidité relative (%)

23,3

44,6

31,3c

4,5d

CO2 (ppm)

723

2252

1333

391

Formaldéhyde (μg/m3)

11,8

44,8

22,9

8,2

a Moyenne géométrique; b Écart-type géométrique; c Moyenne arithmétique; d Écart-type arithmétique.

Les résultats ont montré que les SGE dont la surface d’aire de jeux par enfant suivait les exigences du MFA avaient des concentrations moyennes de CO2 significativement inférieures à ceux qui ne se conformaient pas aux exigences. Les SGE présentant des concentrations élevées de CO2, signe d’une ventilation inadéquate, avaient également des concentrations significativement plus élevées d’acétaldéhyde. L’étude a également montré que les bâtiments dotés d’un système de ventilation mécanique avaient des concentrations significativement plus faibles de formaldéhyde et d’acétaldéhyde. De plus, la présence d’un système de ventilation mécanique ainsi qu’une grande surface d’aire de jeu par enfant diminuaient significativement les concentrations de CO2.

Conclusion

L’étude a montré que les concentrations de CO2 dépassaient le critère de confort proposé par l’ASHRAE dans la majorité des SGE. Elle a également fait ressortir que la présence d'un système de ventilation mécanique pouvait réduire de manière significative certains polluants retrouvés dans l’air intérieur. Enfin, il appert nécessaire d'assurer une surface d’aire de jeu par enfant suffisante et une ventilation adéquate dans les SGE afin de maintenir une QAI qui respecte les valeurs guide recommandées par les instances.

Référence

St-Jean, M., St-Amand, A., Gilbert, N. L., Soto, J.C., Guay, M., Davis, K., Gyorkos, T.W. 2012. Indoor air quality in Montréal area day-care centres, Canada. Environmental Research, 118: 1–7.